La Chronique Agora

La croissance ralentit en Chine ? Intéressez-vous à l’Indonésie !

▪ Moody’s vient de relever sa notation.

Si la nouvelle est passée à peu près inaperçue, c’est qu’elle ne concerne pas un pays européen. Ni même américain. Il s’agit de l’Indonésie. C’est en particulier sa note sur la qualité de ses emprunts qui a été relevée mercredi. Désormais, l’Indonésie peut s’enorgueillir d’un Baa3. Ce mouvement fait suite à l’appréciation de Fitch le mois dernier. S&P devrait le mois prochain à son tour relever sa note sur l’Indonésie.

A présent, Jakarta emprunte à 5,375%. Soit à des taux plus bas que l’Italie ou l’Espagne ! Comme quoi, la propension à casser les reins de la reprise économique n’est pas inscrite dans les gènes des agences de notation. Ces récents mouvements d’ascenseur des notations à l’échelle mondiale doivent nous permettre de dégager une stratégie d’investissement.

▪ Où sont les prochains pays AAA ?
Si l’on sort quelques minutes du débat européen, du narcissisme et des batailles d’ego, il est facile d’y répondre : en Asie.

Non, pas seulement en Chine, en Asie. La nuance est importante, comme vous allez le constater dans les lignes qui suivent.

▪ L’Asie voit ses notes s’améliorer
A l’inverse de l’Europe, l’atmosphère en Asie a tendance à être plus sereine. Hard landing ou soft landing, le débat sur la Chine reste d’actualité. Le journal anglophone China Times titrait encore récemment « un soft landing est possible avec une croissance de 9,2% en Chine en 2011« .

Pourtant la question est en train de perdre son intérêt. La Chine a le doigt posé sur l’interrupteur. Au moindre ralentissement un peu trop prononcé, elle facilitera le crédit aux banques et relancera les investissements.

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Chine, Inde, Russie, Brésil… le potentiel des BRIC n’est plus celui qu’on croit

Désormais, les profits potentiels se trouvent ailleurs. Où exactement ? Quelques éléments de réponse sont ici

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Ce que je retiens, c’est que cette relative sécurité profite à ses voisins. Et en particulier aux pays producteurs de matières premières, car la demande est assurée de rester forte. L’appréciation de la note de l’Indonésie correspond à une bonne gestion de l’économie indonésienne depuis que Susilo Bambang Yudhoyono est arrivé au pouvoir en 2004. Mais que Jakarta aurait-elle pu faire sans ses exportations de fer, d’étain et de charbon en direction de la Chine ?

La situation est similaire avec le charbon mongol, le fer brésilien ou encore le caoutchouc en Thaïlande.

▪ Où va l’Asie ?
A l’instar de l’Indonésie, les pays producteurs de matières premières représentent-ils encore une opportunité, alors que la situation économique en Europe risque de les ralentir ? La conférence de la COFACE (Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur), à laquelle j’ai assisté lundi dernier, m’a apporté une première réponse.

Elle a été donnée par Yves Zlotowski, économiste en chef de la COFACE : il faut se préparer au risque que les pays émergents « se replient sur eux-mêmes ».

▪ Une dépendance encore forte de l’Asie vis-à-vis de l’extérieur…
En cas de nouveau krach de la Zone euro ou de ralentissement américain, l’impact sur l’Asie serait probablement lourd. Les conséquences ne porteraient pas tant sur la production que sur son financement.

Ce graphique vous montre l’importance de l’exposition des banques européennes sur l’Asie émergente (hors Chine et Inde) en milliards de dollars :

Comme le rappelait récemment dans L’Usine Nouvelle Eric Fishwick, chef économiste d’un courtier spécialisé sur l’Asie, « les banques européennes ont arrêté de financer les échanges mondiaux ».

Le risque d’un ralentissement prononcé de l’Asie, dans le sillage de l’Europe, est donc possible. Pourtant, si les pays asiatiques venaient à se replier « sur eux-mêmes », ils auraient les moyens de s’accommoder de ce ralentissement.

▪ … qui pourrait rapidement s’éroder
L’Asie est capable, elle, de répondre à une éventuelle crise de liquidité. Toujours selon Eric Fishwick, Singapour, la Suisse asiatique, est dans les starting-blocks pour débloquer de nouvelles lignes de crédits aux entreprises asiatiques. La Banque asiatique de développement, le FMI local, s’y est également préparée.

Ces acteurs seront d’autant plus réactifs que les perspectives de croissance en Asie restent très bonnes. C’était bien le message implicite de Moody’s.

▪ Mon conseil
Afin de profiter des prochains relais de croissance mondiaux, je vous conseillerais de regarder du côté des pays voisins de la Chine. Portés par la demande chinoise, ces pays amorcent tout juste leur développement.

L’Indonésie est exactement dans cette situation. Quatrième puissance démographique mondiale, le pays est en pleine ascension. Tiré par la demande en matières premières, l’archipel est également en train de commencer à monter en gamme.

Sa récente décision de taxer les exportations de minerais était destinée à forcer l’industrie à transformer le métal sur place. Et cette logique vaudra pour de nombreux pays en Asie.

2012 risque donc d’amorcer un tournant pour le commerce asiatique. Il est temps de monter à bord avant que ce continent ne prenne ses distances avec l’Europe.

Première parution dans l’Edito Matières Premières & Devises du 19/01/2012.

 

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