La Chronique Agora

Comment rétablir la confiance entre le « monde n°2 » et le « monde n°1 » ?

Le 23 mai, dans l’émission ONPC, la chanteuse Camélia Jordana s’est émue du fait que :

« Il y a des hommes et des femmes qui se font massacrer quotidiennement, en France, tous les jours, pour nulle autre raison que leur couleur de peau. […] C’est l’une des raisons pour lesquelles les gens sont fâchés après la police. […] Aujourd’hui j’ai les cheveux défrisés. Quand j’ai les cheveux frisés je ne me sens pas en sécurité face à un flic en France. Vraiment. »

Aujourd’hui, je voudrais soumettre à votre sagacité une solution qui n’a à ma connaissance été évoquée par aucun politique français, suite à cette affaire qui a pourtant enflammé les réseaux sociaux pendant une bonne semaine.

Une police qui assumerait sa fonction dans le strict respect de la loi et sur l’ensemble du territoire national, on a encore le droit d’y songer ?

Rien ne m’effraie plus que l’idée d’une France qui se transformerait en un pays où les forces de l’ordre se permettraient toutes les exactions en étant systématiquement couvertes par le pouvoir exécutif, à l’instar des modèles vénézuélien ou iranien.

Heureusement, nous n’en sommes pas encore là. Il faut cependant reconnaître que, comme c’est le cas dans d’autres démocraties occidentales, il arrive que des policiers abusent tragiquement de leur autorité et que des individus qui ont la même couleur de peau que Camélia Jordana, mais aussi que moi, en fassent les frais.

Pour compléter le décor français, rappelons qu’au-dessus des policiers se succèdent des dirigeants politiques forts en gueule mais beaucoup moins téméraires lorsqu’il s’agit de prendre la question de l’insécurité à bras le corps. En conséquence, la France continue d’être grignotée par les zones de non-droit.

Résultat : les années passent et la situation continue de s’aggraver au point de reléguer le principe d’intégrité du territoire national au rang de vague souvenir constitutionnel, dans une tambouille délétère à base de crimes et délits qui explosent et de plaintes contre la police qui se multiplient.

A entendre toutes les fleurs de nave à qui l’on tend criminellement un micro sur les plateaux de télé, on a l’impression que l’un ne pourrait pas aller sans l’autre.

Je ne sais pas ce que vous en pensez, cher lecteur, mais il me semble que nous méritons mieux que cela. Dans un monde normal, chaque citoyen, quelle que soit sa couleur de peau, devrait être en droit d’escompter deux choses assez élémentaires de la part de l’Etat vis-à-vis des agents de police :

  1. Qu’ils soient soutenus a. par leur hiérarchie en vue de maintenir l’ordre public sans concession et quoi qu’il en coûte, et b. par des juges qui ne se prendraient pas pour des assistantes sociales ;
  1. Qu’ils soient responsables de leurs actes, c’est-à-dire qu’ils soient sanctionnés lorsqu’ils outrepassent leurs droits.

Le problème n°1, celui du règne du laxisme en matière de maintien de l’ordre et d’application des peines, est assez complexe et exige d’être traité en plusieurs billets, ce à quoi je m’essaierai prochainement.

En revanche, il existe une solution aussi simple qu’efficace pour venir à bout du problème n°2.

Il existe en effet un « troisième monde » dans lequel Camélia Jordana pourrait tailler une bavette avec les forces de l’ordre sans avoir préalablement usé de son fer à lisser.

Police vs usagers : une solution simple pour résoudre le problème des bavures et mettre tout le monde d’accord

Le problème soulevé par l’actrice est celui de la responsabilité des agents de police dans le cadre des bavures. Par effet miroir se pose également la question des campagnes de victimisation bidon qui empoisonnent l’espace médiatique à chaque fois qu’un délinquant vient s’écraser contre la portière d’une voiture de police ou contre un train.

Une solution, très facile à appliquer, consiste tout simplement à équiper les forces de l’ordre de caméras corporelles portatives, lesquelles ont vocation à être allumées dès qu’un agent met le pied sur le terrain.

Grâce à ce genre d’outil, la transparence de l’action policière est assurée et la confiance est instaurée. Camélia Jordana pourrait ainsi sortir dans la rue sans se soucier de son style capillaire.

Au final, tout le monde est gagnant puisque, comme l’expliquait France 24 début 2017 :

« Ces dispositifs sont utilisés depuis plusieurs années outre-Atlantique, et ils ont incontestablement fait leurs preuves. Par exemple, à Rioalto, l’une des premières communes de Californie à avoir adopté ce système, une étude de terrain effectuée dans les années 2010 a prouvé que la présence de caméras embarquées avait pacifié les relations entre la police et la population.

Après un an d’utilisation des ‘body-camera’, on a enregistré une baisse de plus de 80% du nombre de plaintes contre la police pour brutalité. A cela, deux explications : la présence de caméras a sans doute prévenu nombre de comportements inappropriés de la part de la police, et elle a également fait chuter les plaintes abusives. »

Mêmes résultats en Grande-Bretagne. Comme l’indiquait Radio Canada en octobre 2016 :

« L’utilisation de minicaméras (caméras-piéton) attachées à la poitrine ou à l’épaule des policiers a mené à une réduction de 93% des plaintes de la population contre la police, montrent les résultats d’une étude américano-britannique. […]

Cette étude supervisée par le Dr Barak Ariel et ses collègues de l’Institut de criminologie de l’Université Cambridge est la plus importante à ce jour à tester leur efficacité. Pas moins de 2 000 policiers américains et britanniques y ont participé. »

Transparence et responsabilité : une recette qui fonctionne aussi dans le domaine de la sécurité

Voilà une solution qui devrait mettre d’accord ceux qui défendent la police aveuglément, et ceux qui « sont fâchés après la police ».

Grâce à la transparence apportée par la vidéo, le policier et l’usager sont plus responsables, donc les uns et les autres sont incités à commettre moins d’abus. Pour le reste, la vidéo permet de faire la distinction entre les plaintes fondées et les jérémiades d’enfants gâtés.

En attendant, n’en déplaise à Camélia Jordana, il est assez difficile de soutenir qu’en France, les voyous et les truands craignent particulièrement les policiers, comme nous le verrons en détails samedi prochain.

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile