La Chronique Agora

Des choix difficiles en perspective

plafond de la dette, Etats-Unis, Fed, Janet Yellen

Après avoir longtemps repoussé la réalité, les autorités américaines sont enfin confrontées aux flammes…

Oh oh. Il va bientôt falloir faire des choix difficiles. Yahoo Finance rapporte :

« Le temps presse pour trouver un accord [sur le plafond de la dette].

La secrétaire d’Etat au Trésor, Janet Yellen, maintient qu’un accord doit être trouvé et qu’il n’est ‘pas acceptable que nous soyons incapables de payer nos factures’.

Si aucun accord n’est trouvé d’ici le 1er juin, ses priorités seront de payer les intérêts de la dette existante et de veiller à ce que les bénéficiaires de la sécurité sociale et les militaires reçoivent leurs chèques à temps, a-t-elle déclaré dimanche lors de l’émission ‘Meet the Press’ diffusée sur la chaîne NBC.

‘Si les négociations échouent ou sont trop lentes, il faudra faire des choix difficiles quant aux factures qui resteront impayées.’ »

Dans la Rome antique, la priorité absolue était de payer l’armée. Si les soldats n’étaient pas payés (surtout à la fin de l’empire, lorsqu’il s’agissait essentiellement d’armées de mercenaires germains et slaves), le pouvoir encourait le risque de voir tous ces soldats s’attaquer à Rome elle-même.

L’embarras de la Fed

Mais c’est là tout le problème auquel font face les autorités fédérales. Elles sont les otages de leurs propres manigances. Telles des escrocs insouciants, elles doivent de l’argent à toute la ville. Si elles ne paient pas, les conséquences seront lourdes.

Quelle situation terrible (du point de vue de Joe Biden, de Mme Yellen et des autorités fédérales). Ils ont consacré toute leur carrière à esquiver les choix difficiles et les conséquences désagréables. Lorsque Joe Biden est arrivé à Washington en 1973, la dette fédérale n’était que de 400 Mds$. Aujourd’hui, elle s’élève à près de 32 000 Mds$ ; chaque centime de cette différence représente un autre choix difficile qui n’a pas été fait. Et pourquoi faire un choix difficile, alors que rien ne vous oblige à le faire ? Ne choisissez pas et prenez tout. La blonde et la brune. Le beurre et l’argent du beurre. Les as et les huit. La Russie et la Chine.

Mais ce sont des choix difficiles que les autorités fédérales auraient dû faire depuis le début. Et s’ils l’avaient fait, nos décisions d’aujourd’hui ne seraient pas si difficiles à prendre. Nous n’aurions pas à faire face à une dette supplémentaire estimée à 20 000 Mds$ au cours des dix prochaines années. Ni à une guerre en Ukraine et 800 bases militaires dans le monde entier. Nous n’aurions pas une inflation de 5%. Nous n’aurions pas un déficit budgétaire de 2 000 Mds$ cette année… ni des taux d’intérêt qui doivent être maintenus à un niveau bas pour éviter la faillite. Et les familles américaines qui travaillent dur ne s’appauvriraient pas.

Mais attendez… Un nouveau Deus ex Machina a fait son apparition… l’IA. Sommes-nous sauvés ? Pourquoi ne pas laisser les machines faire les choix difficiles à notre place ? Elles ne sont pas influencées par les émotions ou les préjugés, n’est-ce pas ? L’IA n’a pas de genoux qui tremblent ni d’échine qui se raidit. Elle pourrait simplement examiner le budget fédéral de manière logique et mettre en évidence les choses qui ne sont pas vraiment nécessaires… non ? Pas besoin de relever le plafond de la dette ?

Chère lectrice, cher lecteur, il est temps de creuser nos méninges, n’est-ce pas ?

Humains, bien trop humains

Les autorités fédérales sont aussi des êtres humains. Et comme chacun d’entre nous, ils veulent se sentir bien dans leur peau… se sentir importants… en dépensant beaucoup.

Montrer qu’ils sont des bienfaiteurs.  Donner de l’argent aux nécessiteux, et des pots-de-vin aux riches… pour être réélus. Ils veulent améliorer les choses pour tout le monde, surtout pour leurs grands financeurs de campagne. Et tant que les étiquettes de prix sont retirées… qu’il n’y a pas de véritable plafond de la dette… et qu’ils dépensent l’argent des autres, aucun choix difficile ne doit être fait.

De toute façon, quand on a plus de 80 ans, peu importe le prix – guerre, inflation, faillite – c’est quelqu’un d’autre qui paiera, pas vous.

Nous avons regardé par hasard la vidéo d’un TED Talk d’un expert en nouvelles technologies. Il parlait de « l’évolution de la relation entre les humains et les ordinateurs ». C’était « très profond », a-t-il dit.

Notre message aujourd’hui est le suivant : cette relation n’est probablement que superficiellement profonde.

Même en utilisant notre intelligence naturelle et traditionnelle, notre espèce a été capable de faire des progrès extraordinaires dans le monde extérieur. Nous ajoutons. Nous soustrayons. Nous trouvons l’hypoténuse. Nous utilisons la science et la technologie pour niveler les forêts et élever d’immenses tours de béton et de verre. Nous utilisons nos cerveaux pour accélérer les particules et ralentir le trafic. Nous pouvons maintenant appuyer sur quelques boutons et anéantir des villes entières… et faire en sorte que le ciel se remplisse d’énormes nuages de poussière radioactive.

C’est ça le progrès !

Le pays de la pure fantaisie

Mais la science et la technologie sont toujours confrontées à des choix difficiles – la loi de Boyle, le point d’ébullition de l’eau, la conductivité du cuivre, la gravité – nous nous plions aux lois de l’univers naturel. Elles ne se plient pas à nous.

Notre monde intérieur, en revanche, évolue plus lentement. Il est complexe. Et beaucoup plus difficile à manipuler. Nous sommes, plus ou moins, toujours le même animal sauvage qui s’est dressé sur ses deux jambes le premier. Nous avons des sentiments, des émotions – bien au-delà de tout ce que notre esprit pensant peut comprendre ou contrôler. Nous tombons amoureux. Nous frappons le sol de coups de pattes. Nous hurlons à la lune.

Dans nos familles et nos entreprises, là aussi, nous sommes toujours confrontés à des choix difficiles. Prendre des vacances ou réparer le toit ? Embaucher un autre employé ou donner une augmentation à ceux qui sont déjà en poste ? Mais dans les domaines de la guerre, de l’économie et de la politique, nous libérons la bête de ses contraintes. Une révolution culturelle… la libération des terres saintes… la discrimination positive…  Et la guerre à Moscou ! Tout est possible.

Pendant de nombreuses années, dans le cadre du processus budgétaire américain, les autorités ont ignoré le côté droit du menu. Il n’était pas nécessaire d’examiner les prix lorsque l’on pouvait emprunter tout l’argent que l’on voulait… à des taux réels inférieurs à zéro… et ne jamais avoir à le rembourser. Il n’y a pas de choix difficiles à faire au pays des fantasmes.

Alors, « lâchez les chiens de la guerre »… ouvrez les portes de l’enfer… distribuez de l’argent gratuit… donnez libre cours à la jalousie, à la haine, à l’envie, à l’orgueil – tous les sept péchés capitaux sont là… mais d’autres aussi que nous avons trouvés en cours de route. Un gouvernement important, doté de la monnaie de réserve mondiale, d’une planche à billet et d’une machine militaire bien plus puissante que n’importe quel rival, peut repousser l’échéance de ces choix difficiles pendant des décennies.

Mais pas pour toujours.

Mme Yellen sait parfaitement que le gouvernement américain n’a pas vraiment besoin d’emprunter plus d’argent.

Que se passe-t-il donc réellement ?  Et que peut y faire l’intelligence artificielle ?

Nous le verrons demain…

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile