La Chronique Agora

Changement de valeurs

** Les actions continuent leur bonhomme de chemin. Le pétrole est redescendu sous les 100 $ le baril. Et l’or fait une pause.

* Pendant ce temps, nous lisons les nouvelles que nous attendions :

* Les reventes de maisons sont à un plancher de neuf ans aux Etats-Unis. Le ralentissement de l’immobilier atteint désormais les budgets familiaux. Le boom du logement de 1997-2007 a fait grimper la valeur réelle de l’immobilier US résidentiel de 8 000 milliards de dollars environ. Les Américains ont "retiré" 3 000 milliards de cette somme, selon une étude que nous avons lue récemment. Ce coup de fouet à 3 000 milliards a été la cause d’une bonne partie — sinon de toute — la croissance du PIB US ces cinq dernières années. Maintenant que les prix des maisons chutent, la richesse implicite des logements résidentiels diminue. Au lieu de retirer de l’argent des maisons, les prêteurs hypothécaires exigent qu’on l’y remette. Des millions de familles seraient déjà "à l’envers" — c’est-à-dire avec plus de prêt que de maison. Si elles vendent — et bon nombre d’entre elles doivent vendre — les prêteurs s’attendent à ce qu’elles remboursent la différence.

* Les Américains n’ont que trois actifs principaux. Ils ont l’immobilier — des maisons, pour la plupart. Ils ont des actifs financiers — des actions et des obligations. Et ils ont la valeur de leur propre labeur. Tous ces actifs stagnent… voire baissent. Et ça pourrait continuer comme ça pendant de nombreuses années.

* Dans ces conditions, les ménages n’ont pas le choix. Ils doivent réduire leur niveau de vie.

** Bien entendu, ils ont lutté. Lorsque le boom de l’immobilier n’a plus fourni de cash facile, les Américains ont eu recours aux cartes de crédit. Mais les taux sont bien trop élevés… et les sociétés de cartes de crédit ont vite appris à se méfier. Les Américains se sont donc tournés vers leur épargne retraite.

* Les Américains "cassent leur tirelire retraite", décrit le Houston Chronicle. Mais ils n’ont guère de fonds sur leur compte… et ils vieillissent à un rythme alarmant.

* En fin de compte, ils n’ont plus eu le choix… et voici le titre qui en découle :

* "Les Américains de tous niveaux se serrent la ceinture", déclare le Christian Science Monitor. Mais il y a un détail intéressant ; tout comme nous l’avions prévu, la frugalité redevient une vertu. Voilà ce que nous dit l’article :

* "Voir les choses différemment, tel est le thème des conversations des Américains ces derniers temps, quel que soit leur niveau de revenu, alors qu’ils revoient leur habitudes de consommation. Près de deux consommateurs sur trois envisagent de réduire les dépenses de loisir en 2008, selon une nouvelle étude réalisée par HSBC Bank USA. Quatre sur cinq veulent augmenter la quantité d’épargne".

* "Même dans les plus hautes sphères du luxe, on a vu un ralentissement des dépenses", déclare Milton Pedraza, PDG de The Luxury Institute, à New York. "Elles comprennent notamment les yachts, les jets, les voitures et les résidences secondaires".

* "Quant à ceux qui ne font pas partie de cette stratosphère économique, leur nouvelle prudence est souvent une nécessité, générée par les incertitudes concernant les emplois, le coût élevé du carburant, la facture du chauffage et le prix des soins de santé. Pour d’autres […] c’est volontaire et représente, au moins en partie, un changement de valeurs. Ils considèrent la crise économique comme une occasion de remettre de l’ordre dans leurs priorités".

* Si on les laissait faire, les gens s’adapteraient. Ils réduiraient leurs dépenses. Ils se débrouilleraient. Ils augmenteraient leur épargne et se préparerait à tout ce que l’avenir leur réserve. Les quelques années qui viennent seraient difficiles pour pas mal de gens. Beaucoup ont besoin de réduire massivement leurs dépenses. Mais tout de même, les Américains sont résistants. Et ils ont d’excellentes ressources. Ils accepteraient le changement, s’ils le devaient.

* Mais ils ont aussi le gouvernement. Et le gouvernement veut empêcher le changement de la pire des manières possibles. Quelle serait la pire des manières d’empêcher une correction ? Simple — toujours plus de liquidités et de crédit… bref, plus d’inflation. Sauf que l’inflation ne fonctionne que quand les gens s’y laissent prendre — c’est-à-dire lorsqu’elle les fait se sentir plus riches… comme l’inflation sur le marché immobilier… ou sur le marché actions. L’inflation des prix à la consommation, elle, a l’effet opposé — elle les fait se sentir plus pauvres.

* Dans le monde entier, l’inflation semble s’être transmise des maisons et des actions aux prix des matériaux de base — comme le pétrole, le blé et le cuivre. A présent, elle se propage aux prix à la consommation. Au Mexique, le gouvernement a dû geler le prix des tortillas. En Chine, les prix du riz sont mis au pilori. En Argentine, le gouvernement maintient les prix de l’énergie pour qu’ils ne grimpent pas.

* Et aux Etats-Unis, les autorités fédérales distribuent du cash… et font artificiellement baisser le prix du crédit.

* Si seulement c’était aussi simple !

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