La Chronique Agora

Du CAC 40 au Russell 2000… pourquoi cette baisse ?

▪ Vu les scores de clôture sur les places boursières, de nombreux opérateurs ont pu trouver la séance de mercredi plutôt saumâtre. Heureusement, vers 17h15, alors que l’ambiance s’alourdissait franchement à Wall Street et par la force des choses sur l’EuroStoxx 50, une interview sur BFM Business nous a rempli d’allégresse et d’hilarité : figurez-vous qu’il existe encore des gérants pour penser que le CAC 40 a encore 25% à 30% à reprendre avant de retrouver ses niveaux de valorisation de l’été 2007.

Nous n’avons pas la même lecture des ratios cours/bénéfices et encore moins des perspectives d’accroissement des profits en 2014 (entre +15% et +18% selon les permabulls).

Et que dire du retard abyssal accumulé face aux indices américains en quatre ans et demi ? La sous-performance du CAC 40 dépasse algébriquement plus de 50% par rapport au S&P 500.

▪ Le véritable secret des entreprises américaines
Faut-il ambitionner pour autant de voir les valeurs du CAC 40 afficher des PER moyens de 20 et des méthodes de gestion des coûts salariaux comparables à ceux des chaînes de distribution hard discount ?

Car le véritable secret des entreprises américaines, ce sont les marges. Elles sont incommensurablement supérieures (merci à l’inventivité des comptables) à celles de leurs concurrentes de la vieille Europe, mais également de la Chine où la plupart des groupes industriels historiques font… des pertes.

Et puis il y a la générosité des sociétés cotées aux Etats-Unis envers les actionnaires. Elles offrent des taux de distribution des bénéfices inégalables et des programmes de rachats de titres à gogo.

Si les profits n’augmentent pas faute de croissance, au moins les dividendes peuvent continuer de progresser au rythme voulu de 10% à 15% par an… jusqu’à ce que l’endettement de l’entreprise dépasse son chiffre d’affaires, mais ce n’est pas grave puisque l’argent est gratuit !

Le stratège en chef de Goldman Sachs, David Kostin, recommande — faute de réelle conviction dans la hausse globale des profits en 2014 — d’acheter en priorité les entreprises qui se déclarent favorables ou se montrent très proactives en matière de rachats de leurs propres titres.

Nous verrons si cette thématique d’investissement résiste à l’épreuve du temps ; à force de voir le serpent dévorer son propre corps, il finit par ressembler à une pauvre bouée de sauvetage… Dans l’immédiat, il semble qu’il n’y ait plus grand monde pour acheter quoi que ce soit.

▪ La fin du plafond de la dette ?
Les permabulls, qui se fichaient royalement des fondamentaux il y a tout juste une semaine, se demandent pourquoi Wall Street corrige alors que le Congrès US vient d’annoncer mardi soir avoir conclu un accord budgétaire valable pour les deux ans à venir. Les porte-paroles démocrates et républicains précisaient que tout devrait être formalisé d’ici vendredi.

Reste à tomber d’accord sur le relèvement du plafond de la dette… Mais la date limite est fixée au 7 février 2014 : il n’y a donc vraiment pas d’urgence à s’en préoccuper.

Les cambistes pour leur part valident l’hypothèse d’un tapering tardif (mars 2014) et prudent: pas plus de 10 milliards de dollars de réduction… juste pour voir, comme le démontre le repli du dollar sous les 1,38/euro.

Il n’y a plus un nuage à l’horizon, l’activité redémarre aux Etats-Unis et au Japon mais l’argent des banques centrales (Fed et Banque du Japon) va continuer de couler à flots encore très longtemps… Alors qu’est-ce qui ne va pas ?

La séance de mercredi a pris une tournure assez inhabituelle. Il n’existe pratiquement aucun exemple depuis fin juin où un rebond de 1% des indices à la mi-séance ait été pris à contrepied aussi brutalement.

▪ Douche froide sur les marchés
Les places européennes ont fini en net repli. L’Euro-Stoxx 50 perd 0,45% — et Milan plonge même de 1,5% malgré un assez large vote de confiance au gouvernement de transition que Silvio Berlusconi s’était juré de faire tomber.

Le CAC 40, qui avançait jusque vers 4 128 points vers 13h45, retombait dans le rouge (-0,1% à 4 086,8) pour en terminer au plus bas depuis le 9 septembre dernier, à 4 086 points.

Il existe très peu d’exemples cette année où Wall Street ait rapidement basculé dans le rouge (au-delà des -1,1% au final) alors qu’une hausse de 0,2% était anticipée — histoire de permettre au S&P ou au Nasdaq d’inscrire une nouvelle rafale de records décennaux ou historiques.

Le Dow Jones chute de 0,8%, le Nasdaq (-1,4%) revient s’appuyer sur les 4 000. Les pertes atteignent même 1,65% sur le Russell 2000 et le Dow Transport. C’est une vraie douche froide !

Ce n’est rien, Wall Street est juste victime d’une overdose de bonnes nouvelles qui viennent s’ajouter aux statistiques trafiquées du marché du travail, de l’immobilier, du coût de la vie (par opposition aux chiffres officiels de l’inflation) et de la confiance des ménages.

Les investisseurs japonais, eux, bénéficient du puissant moteur de la baisse inattendue de la croissance au troisième trimestre et de la dégradation inexorable de la balance commerciale. La faiblesse historique du yen contre toutes les devises — c’est un comble — n’y change rien.

Sans l’appui de fondamentaux déplorables, les indices ne peuvent pas monter. Quand les chiffres viennent enfin conforter la tendance haussière, il n’y a juste plus personne à plumer du côté des vendeurs.

Il y a par contre une fortune à faire en truffant de « papier » les acheteurs… puisqu’ils sont pratiquement tous convaincus que le repli actuel constitue une occasion inespérée de se renforcer.

Il faut se dépêcher de ramasser tout ce qui vient, et surtout des bancaires (pour cause de taux zéro jusqu’en 2016), puisque le S&P 500 va s’envoler vers les 2 000 et le CAC 40 vers les 5 000 lors des 12 prochains mois.

C’est d’autant plus inéluctable que l’or va descendre sous les 1 000 $ dans l’intervalle. Normal : pourquoi cesser de vendre de l’or pour acheter des actions… puisque ça fonctionne très bien comme ça depuis la fin du monde (programmée pour le 21 décembre 2012).

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