La Chronique Agora

Bienvenue en captivité

** "Elizabeth a cru que j’avais perdu la tête, la première fois que je l’ai amenée ici", avons-nous expliqué à nos amis alors que nous arrivions au ranch. "Le terrain devient de plus en plus difficile… de plus en plus désolé… de plus en plus vide. Nous sommes arrivés à cette vallée, et elle a dit qu’elle ne voyait pas pourquoi nous étions venus jusque là. Dans quel but ? Il n’y a rien".

* Après trois heures de route environ, nous commencions à nous poser la question aussi.

* On passe environ la moitié de sa vie à essayer de gagner de l’argent ; l’autre moitié, on la passe à essayer de le dépenser. Pour cette dernière partie, nous avons eu recours aux hauts plateaux andins

* Mais si l’on en juge par ce qui se passe dans l’économie américaine, la plupart des gens n’auront pas besoin d’aide. Et si l’on en juge par la chute du dollar, nous non plus.

** Ces cinq dernières années, l’Américain moyen a vu sa richesse s’accroître uniquement parce que le prix de sa maison grimpait. A présent, même cela disparaît. Et malheureusement pour lui… et pour l’économie US en général… il a déjà dépensé la richesse qui est en train de disparaître. Chaque année, la valeur "retirée" des maisons par le biais de prêts hypothécaires a grimpé… jusqu’à atteindre un sommet en 2005/2006. Les dépenses de consommation ont grimpé aussi — nourrissant la croissance du PIB des Etats-Unis. L’immobilier a constitué entre 90% et 100% des gains de ces cinq dernières années, selon certaines estimations. Mais cette année, cette "valeur hypothécaire" a été divisée par deux… et les prix des maisons chutent dans tout le pays, pour la première fois depuis la Grande dépression.

* Alors que les salaires américains n’ont pas grimpé depuis 30 ans, en Asie, ils augmentent de 10% par an environ. Les Asiatiques gagnent de l’argent… et s’enrichissent. Par la même occasion, ils accumulent d’énormes quantités de dollars. Bon nombre de ces dollars terminent dans d’immenses fonds de private equity appartenant aux gouvernements. Lénine disait que les capitalistes vendraient les cordes dont il se servirait pour les pendre. Eh bien, la Chine communiste est prête à en acheter. Actuellement, ses fonds possèdent 2 000 milliards de dollars. Cette somme devrait grimper à 17 000 milliards en 2010 — assez pour acheter toutes les sociétés cotées en Bourse aux Etats-Unis… et il resterait de la monnaie.

* Que feront-ils de tout cet argent ? Eh bien… et vous, qu’en feriez-vous ?

* La semaine dernière, le dollar a atteint de nouveaux plus bas. L’euro est quasiment passé à 1,42 $. Dans la mesure où nous vivons en Europe… payons nos factures en euros… mais gagnons notre vie en dollars… chaque jour, votre correspondant perd plus qu’il ne gagne. Nos actifs libellés en dollars baissent. Nous commençons à nous en lasser. A coup sûr, c’est aussi le cas d’autres détenteurs de dollars — y compris les ministres des Finances étrangers. Que feront-ils ? Ils essaieront d’échanger leurs dollars contre quelque chose de solide, tant qu’ils le peuvent encore. Des entreprises. Des terrains. De l’or.

* Tout ce qu’ils peuvent avoir.

* Ce qu’ils vont faire, c’est utiliser leurs dollars papier pour acheter des actifs les plus précieux des Etats-Unis.

* Les dollars sont bien entendu sans valeur, à la base. Les USA peuvent en créer autant qu’ils le veulent, pour un coût négligeable. Mais les entreprises… les usines… les terres… les ressources — elles, par contre, ont une vraie valeur. Lorsque les étrangers les achètent, la richesse même des Américains — et leur indépendance — sont réduites.

* Mais faut-il s’en étonner ? "L’emprunteur est l’esclave du prêteur", dit la Bible. Bienvenue en captivité.  

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