La Chronique Agora

Bienvenue dans la Bulle époque

Bill est de retour en Europe, où il fait connaissance avec les restrictions de circulation ; pendant ce temps, les autorités dépensent, dépensent, dépensent… et la bulle enfle.

Après l’Argentine et les Etats-Unis, nous voilà en Irlande. Nous venons de finir notre quarantaine, deux semaines après notre arrivée. Le pays tout entier est mis aux arrêts, cependant. Nous n’avons pas le droit de nous éloigner de plus de 5 km de chez nous… à moins d’avoir une bonne raison.

Les confinements ont-ils servi à quelque chose ? Nous n’en savons rien. Mais l’Irlande ne compte que 93 morts pour 100 000 personnes. Les Etats-Unis en sont à 163.

Le confinement ne nous dérange pas, personnellement. Nous travaillons depuis chez nous de toute façon, et il n’y a nulle part où nous aimerions vraiment aller.

Il nous faut des provisions, cependant.

« Est-il possible d’aller en ville ? » avons-nous demandé à notre homme à tout faire, Matt. « Ça fait un peu plus que 5 km. »

« Bah… ne vous inquiétez pas. C’est la campagne. Tout le monde dépasse les 5 km. Les routes font des lacets ; 5 km ne vous mènent nulle part.

« Qui plus est », a-t-il ajouté avec un sourire en coin, « c’est 5 km à vol d’oiseau ».

Evidemment, nous avons été arrêté par la Gardai (la police locale)… à un barrage routier :

« Vous êtes un peu loin de chez vous, non ? »

« Pas à vol d’oiseau », avons-nous répondu.

« De quel genre d’oiseau parle-t-on ? Vous êtes au minimum à 16 km de Youghal. Des oiseaux américains, sans doute. Allez, circulez… et rappelez-vous de la limite des 5 km. »

Pendant ce temps, sur les marchés…

Dans le monde de l’argent, tout est possible. Tout est en jeu. Rien n’est vrai. Rien n’est droit ou équilibré. Tout est sujet à interprétation et manipulation, mensonges et balivernes.

Nous sommes en pleine Bulle époque. C’est la meilleure des époques… et la pire. Majestueuse et sordide. Un Age de l’inflation, où personne ne sait rien et où même les leçons les plus sûres de l’Histoire sont oubliées.

La presse financière commence à évaluer la remarquable gabegie à 1 900 Mds$ de Joe Biden.

Le Wall Street Journal, par exemple, note que les allocations deviendront probablement permanentes. Il s’inquiète déjà des impôts nécessaires pour les financer :

« Un groupe de législateurs progressistes, dont la sénatrice Elizabeth Warren, a récemment proposé une soi-disant taxe sur les ultra-millionnaires. Cette législation créerait une taxe annuelle de 2% sur la valeur nette des ménages et des trusts comprise entre 50 millions et un milliard de dollars, avec une surtaxe additionnelle de 1% lorsque le milliard est dépassé. »

Le Financial Times, de son côté, prend une perspective plus historique. Biden « construit un pays », selon le journal. Et la nation toute entière s’éloigne petit à petit du gouvernement limité de Ronald Reagan pour se rapprocher des gros budgets bien dodus de Franklin Roosevelt et Lyndon Johnson.

Pourquoi pas, après tout ? Avec autant d’argent gratuit à disposition, déclare Maya MacGuineas, du Comité pour un budget fédéral responsable, les législateurs sont « presque insensibles » aux restrictions budgétaires.

Le maire de Chattanooga, Andy Berke, ajoute : « Les gens frappent à notre porte pour demander des logements abordables, des formations professionnelles et une amélioration des transports… Le public est heureux de voir le gouvernement fédéral agir après bien trop d’années de dysfonctionnement. »

Marche arrière impossible

Au moins The Economist a-t-il remarqué la falaise qui se profile.

« Les responsables politiques d’aujourd’hui ont une place garantie dans l’Histoire économique – mais ils ne seront peut-être pas considérés comme des héros. La raison en est que les Etats-Unis mènent une expérience économique imprévisible en trois volets, caractérisée par des niveaux historiques de relance budgétaire, une attitude plus tolérante de la Fed vis-à-vis des dépassements temporaires des objectifs d’inflation, et une énorme épargne refoulée dont personne ne sait si les consommateurs vont la thésauriser ou la dépenser. Cette expérience n’a pas d’équivalent depuis la Deuxième guerre mondiale. Le danger pour les Etats-Unis comme pour le reste du monde est que l’économie surchauffe.

[…] Le plan de relance de M. Biden est un immense pari. S’il s’avère payant, les Etats-Unis éviteront le piège lamentable de l’inflation et des taux bas dont le Japon et l’Europe semblent prisonniers. D’autres banques centrales pourraient imiter le nouvel objectif de la Fed. Les mesures de relance budgétaire massives pourraient devenir la réponse normale aux récessions. Le risque, cependant, est que les Etats-Unis se retrouvent avec des dettes croissantes, un problème d’inflation et une banque centrale dont la crédibilité est mise à l’épreuve. »

Un immense pari ? Pour quelles probabilités ?

Non, il n’y a pas de raison théorique de penser que la productivité réelle peut être remplacée par de la fausse monnaie.

Non, il n’y a aucun exemple dans l’Histoire où l’impression monétaire aurait réussi à créer une croissance économique et une prospérité durables et réelles.

Non, il n’y a aucun moyen d’arrêter l’impression monétaire. Les ménages, les entreprises et le gouvernement en dépendent désormais.

Non, il n’y a pas de manière indolore de revenir à des taux d’intérêts normaux, ni à des politiques budgétaires/monétaires normales.

Non, il n’y a aucune raison plausible de penser que cela ne se terminera pas en désastre, comme tous les autres épisodes d’impression monétaire galopante de l’Histoire.

Mais ma foi… nous sommes en pleine Bulle époque. Tout est possible… même des choses impossibles.

Distribuer 1 900 Mds$ d’argent qu’on n’a pas… à des gens qui n’en ont pas besoin, ne l’ont pas gagné et ne le méritent pas ? Personne ne vous prêtera une telle somme, autant l’imprimer soi-même.

Un pari ? Peut-être. Mais nous prendrons le pari opposé.

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