▪ L’introduction en Bourse de Facebook ressemble de plus en plus à la fin d’une ère. La fin des plans sur la comète des réseaux sociaux. La fin du rebond post-crise. La fin de la confiance résiduelle que le public portait à l’industrie financière. La fin de l’énergie juvénile des Etats-Unis… de son époque de croissance, d’innocence et d’espoir dans l’avenir.
A présent, les taux de croissance sont bas ; ils chutent depuis 30 ans. Les baby-boomers ne sont plus des bébés… ni des boomers. Les actions sont passées de mode ; les gens veulent des obligations, maintenant. Et 63% des électeurs américains pensent que leurs enfants s’en tireront moins bien qu’eux dans la vie.
Au moins Zuckerberg s’en sort. Il possède environ 500 millions d’actions et d’options. Mais chaque fois qu’elles perdent deux dollars, elles lui coûtent environ un milliard de dollars. Il a donc perdu cinq milliards de dollars depuis que l’entrée de l’entreprise sur les marchés, vendredi.
Tout de même, nous n’allons pas le plaindre. Il lui reste 15 milliards de dollars environ.
Non que nous nous souciions de l’argent qu’il a. Il pourrait en avoir deux fois autant qu’il serait toujours un benêt. Nous le savons : nous avons vu le film !
▪ Pourquoi les riches sont-ils riches ?
Plus sérieusement, les Américains se soucient bien trop d’argent. C’est ce que disent les gens qui n’en ont pas. Ils disent que trop d’argent est signe d’avidité. Que les gens qui ont trop d’argent ne peuvent pas comprendre les autres. Il y a perte du sentiment d’appartenance… de l’espace public. Les gens qui ont de l’argent vivent séparément du reste d’entre nous. Ils achètent les élections et utilisent trop d’énergie… ils laissent des pourboires dérisoires. Ils ont trop de pouvoir, trop d’influence et une trop grande part du gâteau.
Paul Krugman, Thomas Friedman et Barack Obama veulent résoudre ce problème en prenant l’argent des gens qui en ont. Et en leur compliquant la tâche pour en gagner plus.
Les gens de J.P. Morgan ont perdu quelques milliards. On pourrait penser que les anti-argent en seraient heureux. Mais non : ils veulent en faire une affaire fédérale. Quasiment tous les experts exigent plus de réglementation. « Si même les bons banquiers peuvent perdre autant », disent-ils, « nous devons les mettre sous contrôle ! »
L’idée qu’ils peuvent réglementer le système jusqu’à en éliminer le risque est insensée. Cela ne fonctionne pas ainsi. Plus ils réglementent, plus ils déforment le marché — et plus les investisseurs font des erreurs.
Les investisseurs achètent des bons du Trésor US par pleines brouettes, par exemple. Pourquoi ? Parce que les régulateurs de la Fed ont pris le risque d’acheter des actions. Si les taux d’intérêt grimpent, la Fed achètera elle-même des obligations.
Nos chers lecteurs et connaisseurs du grand n’importe quoi réglementaire apprécieront la flexibilité de la banque centrale américaine. Son but est de pousser les investisseurs vers des actifs risqués… en pesant sur les rendements des bons du Trésor « sûrs ». La conséquence imprévue de cette manoeuvre est la création de rendements dignes d’une dépression… et des plus-values pour les acheteurs obligataires. Les investisseurs fuient les actions… et se ruent sur les bons du Trésor dont la Fed essayait de les faire sortir. C’est ainsi que la Fed réussit à plier sa jambe droite assez loin pour botter son propre postérieur.
Les gens qui n’aiment pas les riches devraient passer un peu de temps à réfléchir de quelle manière les riches le sont devenus. Etaient-ils plus intelligents que les autres ? Plus avides ? Ou simplement plus chanceux ?
Selon nos humbles observations, nous dirions qu’ils sont un peu de tout ça. Mais la majeure partie de l’aubaine dont ont profité les riches ces dernières années provient des régulateurs !
Oui, cher lecteur, les riches sont devenus plus riches grâce aux ronds-de-cuir… non à cause des riches eux-mêmes. En 1971, Richard Nixon a modifié la devise américaine. L’ancienne monnaie — adossée à l’or — coulait vers les producteurs, qui travaillaient dur. Elle était épargnée, investie, mise au travail. La nouvelle monnaie n’était pas comme ça. Elle fréquentait d’autres cercles. Elle préférait une autre classe d’amis — les banquiers, les gestionnaires, les investisseurs, les spéculateurs, les brasseurs de produits dérivés, les opérateurs de private equity…
Ce changement est bien illustré par la différence entre le candidat à la présidentielle Mitt Romney et son père. Le vieux gérait une entreprise d’automobile. Il construisait des voitures. C’est là qu’on se faisait de l’argent, à l’époque. Il fabriquait la Rambler. Nous en avions une. Elle était bon marché. Elle était moche. Elle roulait. Que demander de plus ?
Mais le fils n’a jamais rien fait… sinon de l’argent. Il n’a pas géré d’entreprises productives. Chez Bain Capital, c’était un membre prééminent de la nouvelle classe — les personnes qui allaient trafiquer lesdites entreprises productives.
En 2007, cette classe avait une tête trop grosse pour son chapeau. Toute la structure de capital a commencé à vaciller. Seule, elle se serait effondrée… emportant les riches dans sa chute.
Laissé à lui-même — sans le généreux soutien des autorités — le Dow aurait pu retomber à 6 000 en 2008… et continuer à baisser. Il aurait probablement fait chuter J.P. Morgan… Goldman Sachs… Bank of America… et la majeure partie du reste de Wall Street. Même General Motors, qui était alors devenue une société financière, se serait retrouvée en faillite.
Et aujourd’hui… il n’y aurait de loin pas autant de riches dont se plaindre. Problème résolu.
Au lieu de ça, les bidouilleurs ont bidouillé de manière à ce que leurs bidouillages restent bidouillés.