▪ Les marchés perdent 10% en 12 séances, le pétrole 25% au cours du même intervalle… et voilà la BCE qui passe en mode "illimité".
Ce n’est pas une interprétation ni une figure de style sensationnaliste mais bien le coeur du message que Mario Draghi a voulu faire passer jeudi dernier.
Il ne s’agit pas d’une petite phrase lâchée entre deux portes. Il a répété à plusieurs reprises, et en réponse à des questions portant sur des sujets différents, qu’"il n’existe aucune limite à l’ampleur du recours aux outils à la disposition de la BCE". Et, pour dissiper la moindre sensation de flou concernant les rachats d’actifs et la fixation des taux directeurs, il a rajouté qu’"il n’existe pas de plafond en termes de volume ni d’intensité".
Cette formulation devrait titiller notre mémoire. Elle a été popularisée il y a quatre ans par la Banque nationale suisse (BNS) s’agissant de la défense d’une parité fixe entre l’euro et le franc helvétique (soit 1,20 ChF pour 1 euro du 06 janvier 2011 au 15 janvier 2015).
La BNS avait affirmé dès début septembre 2011, avec force et de façon réitérée jusque début janvier 2015, que les achats d’euros et l’abaissement des taux directeurs étaient "sans limites"… jusqu’à ce qu’elle craque une semaine plus tard et matérialise en quelques secondes la plus lourde perte de son histoire avec un franc suisse bondissant au-delà de la parité, jusque vers 0,8520 en séance.
Vu l’ambiance apocalyptique sur les marchés le vendredi 15 janvier 2016, personne n’avait songé à fêter le premier anniversaire de la capitulation de la BNS.
"Il s'agit d'une technique de Renseignements exploitée par au moins cinq présidents américains…" "C'est le coeur d'un outil que j'ai créé pour prédire les attaques terroristes pour la CIA et le Pentagone…" Aujourd'hui, pour la toute première fois en France, cette technique peut être utilisée pour éliminer l'incertitude en Bourse et potentiellement vous indiquer le moment où il faut acheter et le moment de vendre… … pour des gains de 1 616% à terme, voire plus. |
Si la BCE a laissé comprendre qu’elle pourrait recalibrer son QE à la hausse dès le prochain rendez-vous de début mars dans le but "d’apporter tout le soutien à la croissance et s’opposer aux pressions déflationnistes", il ne faut pas se laisser enfumer par des justifications n’ayant d’autre vertu que d’être intellectuellement acceptables.
La BCE ne peut en rien influer sur la croissance mondiale, en panne de pétrodollars |
En effet, la BCE ne peut en rien influer sur la croissance mondiale, en panne de pétrodollars ; elle ne peut pas davantage peser sur le niveau de l’inflation, largement tributaire de l’évolution du prix des matières premières et de l’énergie.
▪ Une efficacité de façade
Le recours à la planche à billets en mode illimité — sous forme d’effet d’annonce — est seulement destiné à dégrader la valeur de l’euro face au dollar et au yuan, et dans une moindre mesure face au yen et à la livre sterling.
C’est la seule efficacité de la combinaison "QE + taux négatifs" reconnue par l’ensemble des économistes.
Ces armes monétaires restent toutefois d’une efficacité limitée quand les adversaires disposent exactement du même arsenal… mais bénéficient d’une expérience plus ancienne et d’une détermination encore plus farouche, comme la Banque du Japon
Si l’effet d’annonce relève du domaine de la forme, que dire du fond, c’est-à-dire de l’"illimité" ?
Quand un malade est en soins intensifs, il est question de traitement d’attaque et de doses massives qui ont vocation à être progressivement réduites. Quand le corps médical évoque la mise en oeuvre de doses illimitées, en revanche, il s’agit généralement de l’administration d’antalgiques dans le cadre de soins palliatifs.
Tout le monde sait ce que cela signifie : c’est irréversible… et la fin est proche.
▪ Prêt à prendre votre pilule ?
Mario ne s’est pas contenté de nous faire entrer de plain-pied dans le cycle des soins palliatifs monétaires. Il a également introduit le concept de "granularité" au sujet des montagnes de créances douteuses qui lestent le bilan des banques espagnoles, italiennes, portugaises… Et n’oublions pas les banques allemandes : il y a les provisions colossales passées par la Deutsche Bank au titre de l’exercice 2015 et qui ne constituent qu’un hors d’oeuvre en regard des 30 000 procédures judiciaires intentées à l’encontre du n°1 allemand, les plus nombreuses étant liées aux subprime et aux manipulations de marché.
La "granularité"… Voilà un concept qui nous promet de savoureux fous-rires quand le château de cartes des dettes va s’effondrer !
Ce n’est qu’une remise au goût du jour — sémantiquement savante — de la minoration du risque associée aux subprime |
En effet, ce n’est qu’une remise au goût du jour — sémantiquement savante — de la minoration du risque associée aux subprime.
Rappelez-vous de l’argutie développée il y a huit ans par des magiciens des produits dérivés comme Angelo Mozzilo et Blythe Mathers (inventeurs des CDO et des CDS)… ou encore des Goldman Sachs et autres Lehman pour nous enfumer au sujet des subprime.
Si on décortique un empilement de créances (de type CDO, ABS, RMBS, etc.) tranche par tranche, par maturité, par séniorité, par type d’émetteur (dette souveraine ou corporate), il y a toute une échelle de "recouvrabilité" à prendre en considération. Pour l’essentiel, le risque restant cantonné à des catégories de dettes marginales high yield, il n’y a pas de risque de défaut global… donc notation "AAA".
En ce qui concerne les encours obligataires susceptibles de partir en vrille, la BCE nous jure qu’en application de sa mission de supervision globale, elle a déjà passé les provisions suffisantes… tout en reconnaissant dans son rapport de supervision publié début janvier qu’elle juge la situation "préoccupante".
▪ Gardez la foi !
Il nous suffit d’avoir une foi inébranlable dans la clairvoyance des services d’analyse du risque de l’institution de Francfort — en application des règles prudentielles recommandées par les experts du comité Bâle III… et de nous convaincre que le risque de contamination est "limité".
Sur les 200 milliards d’euros de dettes douteuses qui plombent le système bancaire italien, les 400 milliards de dettes hypothécaires espagnoles ou portugaises… où la BCE met-elle le curseur du risque de défaut ?
Quel taux de défaut le système peut-il supporter ?
Combien de "granulés" la BCE compte-t-elle nous faire avaler avant de découvrir que c’est hautement toxique ?
Combien de temps le citoyen européen va-t-il mettre pour découvrir que si les derniers textes votés en catimini par les parlements fin 2015 (dont le nôtre) ont bien pour but de mettre à l’abri les contribuables (c’est-à-dire environ 50% de la population qui paye l’impôt) d’un nouveau Lehman ou AIG… c’est pour mieux faire assumer le risque aux actionnaires des banques, et en cas de défaillance grave, aux déposants… qui représentent, eux, 99% de la population ?
Vous comprenez mieux maintenant l’acharnement des gouvernements et des banques à dissuader les citoyens de détenir des espèces et d’autres supports monétaires tangibles. L’essentiel est que le maximum d’actifs (comptes de dépôts, livrets, épargne sous forme d’instruments obligataires, etc.) n’existent que sous forme d’inscription numérique immédiatement saisissable par les Etats sur injonction de la BCE et du FMI en cas de coup dur.
Ce coup dur sera surtout le coup d’envoi du "grand reset" évoqué de façon à peine voilée par Christine Lagarde, candidate à sa propre succession et donnée grande favorite à la tête du FMI.
Pour achever le grand oeuvre de transformation globale du système financier amorcé en septembre 2008… et définitivement adopté mi-mars 2009 ?