La Chronique Agora

Assouplissement quantitatif : réponse à une énormité (1/2)

sac de cash dans un caddie

Les économistes s’étonnent que l’assouplissement quantitatif n’ait pas relancé la croissance. Les raisons à cela sont pourtant évidentes…

Les banques centrales ont créé de l’argent pour acheter des obligations d’États ou d’entreprises, ou des actions, ou des ETF qui se retrouvent dans leur bilan.

Après avoir fait cela avec plusieurs milliers de milliards d’euros et de dollars, les « économistes et les membres de ces banques » s’étonnent que cela n’ait pas relancé la croissance, que cela n’ait pas fait baisser le chômage et surtout que cela n’ait pas relancé l’inflation.

De manière directe. Si je vous donne 1 M€ et que vous le mettez dans un coffre, cela relance-t-il l’inflation et la croissance ? Si vous répondez oui à cette première question, vous pouvez arrêter de lire, c’est peine perdue.

De manière indirecte. Les banques qui ont vendu ces obligations ou ces actions aux banques centrales (avec plus-values) devaient appeler leurs clients pour leur proposer du crédit.

Je me demande bien pourquoi elles feraient quelque chose d’aussi idiot !

Pourquoi iraient-elles prendre un risque dans l’économie réelle pour gagner des cacahuètes en montant des dossiers de crédit, alors qu’elles peuvent beaucoup plus simplement racheter des actifs financiers avec de forts leviers pour les revendre ensuite aux banques centrales avec d’énormes plus-values ?

Même si les banquiers ne sont pas très malins, ils ont compris depuis longtemps où était leur intérêt.

D’une part, pour qu’un crédit existe, il faut être deux, un prêteur et un emprunteur. Or, même si le banquier voulait prêter, il faudrait quelqu’un pour emprunter. C’est précisément sur cette demande de crédit que le quantitative easing (QE) a une action exactement inverse à celle que nos banquiers centraux lui prêtaient.

En achetant des obligations, les banques centrales font baisser les taux, les amenant à zéro et même parfois en-dessous. L’idée sous-jacente est que si on baisse les taux, on incite les entreprises à emprunter et à investir.

Cette équation n’est vraie que dans les livres et pour les économistes de salon. Une entreprise n’investit que si elle a de la demande, si des gens achètent ses produits. Elle n’investit pas parce que les taux sont bas.

Le fait d’avoir des taux proches de zéro crée des surcapacités et permet à des entreprises non-performantes de se maintenir en vie. Ainsi, le QE est plutôt source de pressions déflationnistes.

Par ailleurs, le QE va faire augmenter le prix des matières premières, augmentant par conséquence les prix à la production et réduisant les marges des entreprises. Des entreprises au départ performantes mais n’ayant que peu de capacités à monter leurs prix dans une économie mondialisée vont plutôt choisir d’agir sur leurs coûts pour conserver leurs marges.

La première source de coûts ? Les salaires. Elles vont donc licencier pour conserver leurs marges. Le QE est donc déflationniste, augmente le chômage, réduit l’activité…

En revanche, il augmente les cours des Bourses, le prix des actifs financiarisés (dont l’immobilier et l’énergie), la dette publique… et comme la dette publique est financée par nos impôts, le QE augmente également la pression fiscale.

L’augmentation des impôts, des taxes en tout genre, des coûts pour se loger, pour se nourrir, pour étudier, pour se chauffer – que ne reflète évidemment pas l’indice d’inflation dont je vous parlerai plus loin – vont finalement étrangler définitivement la moindre possibilité de reprise d’activité.

Si vous avez compris pourquoi le QE était nocif pour l’économie réelle, vous êtes désormais plus intelligent que la plupart des économistes qui se posent toujours la question de pourquoi cela n’a pas marché.

Le QE est un système dont on ne peut pas sortir

Les taux

La dette devenant le seul moteur de l’activité et étant d’ores et déjà à des niveaux considérables, alors que la croissance est très faible et totalement insuffisante pour payer les intérêts et rembourser le capital, les banques centrales sont condamnées à maintenir les taux à zéro. C’est une fuite en avant perpétuelle. La situation du Japon, qui ne peut pas sortir des taux à zéro, est amenée à se généraliser.

La dépendance aux marchés

Depuis 2008, les banques centrales se sont mises non seulement à acheter des obligations mais aussi des actions, des indices et des ETF et sont ainsi devenues market dependent [« dépendantes aux marchés », ndlr.].

Sur certains marchés, elles sont les seules acheteuses, ce sont elles qui fixent les prix. Dès lors, nous sommes dans un régime de prix administrés.

Les banques centrales ne sont pas les seules à dépendre des marchés. Les fonds de pension américains, les assureurs-vie français, tous les grands gestionnaires de fonds, voyant les rendements des obligations baisser, ont introduit de plus en plus de risque dans leurs portefeuilles. Que ce soit du risque de crédit ou du risque action, en situation de retournement violent des marchés, il les mènera à la faillite rapidement.

Les grandes banques généralistes ne sont pas, contrairement à ce que l’on vous a dit, plus solides qu’en 2008. Au contraire, elles sont bien plus en risque. Elles utilisent les mêmes leviers, ont encore des centaines de milliards d’actifs pourris et ne supporteraient pas une forte dépréciation des marchés.

Lorsqu’une récession arrive, et la prochaine est déjà là, les marchés baissent de 30% à 40% et le nombre de prêts non performants explose, fragilisant encore plus les banques.

Le transfert de richesses et la disparition de la classe moyenne

Les QE servent à effectuer un transfert de richesses de la classe moyenne vers les très riches. Ceux qui détiennent les actifs financiers bénéficient de la hausse des cours et des bulles créées par les QE.

D’une part, la politique des banques centrales permet aux États de continuer de s’endetter, ce qui les conduit à augmenter les impôts et les taxes. D’autre part, les taux zéro font augmenter la proportion de créances pourries, mettant en risque de faillite les banques dans lesquelles tout un chacun dépose son argent.

Les 0,1% les plus riches – sauf cas particulier de l’idiot riche, l’intelligence n’étant pas fonction du compte en banque – ne déposent pas leur fortune dans les mêmes banques que le vulgum pecus et ne sont pas investis sur les mêmes actifs. Ils peuvent donc attendre sereinement l’effondrement à venir qui les rendra encore plus riches.

Nous verrons la suite dès demain

Assouplissement quantitatif : réponse à une énormité (2/2)

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