L’Etat a besoin de plus en plus d’argent. En principe, il le prend aux riches mais ces derniers contrôlent l’Etat. Du coup, la dette a permis de combler le trou.
J’ai prononcé vendredi un discours devant un groupe d’investissement, à Londres. Les investisseurs veulent savoir ce qui nous attend. Les cours vont-ils augmenter ? Vont-ils baisser ? « Oui », répondrons-nous.
Au mieux, nous les aiderons à relier entre elles quelques données supplémentaires…
La semaine dernière, nous nous sommes penchés sur une donnée importante : la proposition de baisse d’impôt de Trump, qui provoque désormais indignation et perplexité dans tout le pays. Qui en profitera ? Qui paiera ?
D’abord, nous avons considéré que cette proposition était abjecte et inimaginable. Elle était idiote et inconséquente.
En outre, elle n’allait jamais passer. Alors pourquoi prendre la peine de se pencher dessus ?
Mais plus nous regardions, plus elle semblait dotée d’une sorte de force d’attraction, elle aspirait vers elle d’autres données majeures pour former une sorte de système planétaire… avec des lunes en orbite formant des schémas cycliques… des comètes et des astéroïdes apparaissant soudain, sans crier gare… et des tourbillons de poussière semant la confusion partout.
C’est l’univers dans lequel nous vivons !
Cette proposition de baisse d’impôt nous aide à le voir.
Le trou noir de la dette
Pourquoi le Congrès US ne peut-il faire passer une réforme fiscale sérieuse ?
Parce que l’Etat a besoin d’argent. Or il ne peut le prendre qu’aux gens qui en ont : les riches.
Mais les riches contrôlent le gouvernement et les commissions qui élaborent la fiscalité. Alors l’Etat est coincé. Et par conséquent, toute l’économie.
Comme sous l’ancien régime en France, avant que l’on ne commence à couper les têtes, le Deep State ne peut se réformer lui-même. Mais il faut quand même calmer la population : à coups de retraites, de médicaments et de prestations sociales qui coûtent cher.
Ces deux contradictions peuvent coexister – temporairement – avec le crédit.
Voilà pourquoi toutes les principales économies gèrent d’énormes déficits… et pourquoi un trou noir de la dette aspire vers le fond toutes les principales économies du monde… et les rapproche de plus en plus d’une crise de la dette.
Reprenons là où nous en sommes restés vendredi. Bien que la dette du gouvernement américain ait augmenté 20 fois depuis 1980, il n’y a aucun signe « d’éviction » sur les marchés obligataires (cet « effet d’éviction » illustre que l’augmentation des emprunts du gouvernement provoque une hausse des taux d’intérêt pour tout le monde).
Comment ça ?
Un crédit infiniment élastique
Vendredi, nous avons expliqué que ce nouvel argent falsifié… disponible aux taux très bas de la Fed… signifiait que le crédit était presque totalement élastique.
Lorsqu’il a commencé à se tendre – en 1987, 2000 et 2007, par exemple – la Fed a encore plus tiré dessus.
Les Etats-Unis ont alourdi leur dette de près de 10 000 Mds$ depuis 2007. Mais grâce à la Fed, qui a fourni tout l’argent qu’exigeait le système – et plus encore – les taux d’intérêt n’ont pas augmenté. Au contraire, ils ont encore baissé.
Ce fut le casse-tête d’Alan Greenspan, ex-président de la Fed.
Voici un casse-tête encore plus fort : comment est-il possible que la dette totale américaine – consommateurs, gouvernement et entreprises – comparée au PIB, ait pu augmenter de 35 000 Mds$ depuis 1980 ?
Ce sont 35 000 Mds de dépenses du secteur privé qui n’auraient pas existé si « l’effet d’éviction » – qui reliait autrefois argent réel, production, épargne et dette – avait été respecté.
Comment se fait-il que tout ce nouveau pouvoir d’achat, fondé sur le crédit, n’ait pas déclenché une envolée des prix ?
Le pouvoir d’achat doit bien aller quelque part. Oui, mais où ? C’est ce que nous verrons demain.