La Chronique Agora

30 000 milliards de raisons

dollar, dette, inflation

La fausse monnaie et la livre sterling sont les grands perdants des politiques récentes.

Fin septembre, la livre a plongé en quelques heures de près de 5% pour atteindre son plus bas niveau historique. Cela a eu lieu juste après que le nouveau chancelier de l’Echiquier (le ministre des Finances local), Kwasi Kwarteng, a promis de poursuivre les réductions d’impôts, alimentant ainsi les craintes que les politiques fiscales du nouveau chancelier fassent exploser l’inflation et la dette publique.

La livre sterling est en baisse par rapport au dollar. Mais pourquoi ? Notre collègue Tom Dyson s’interroge :

« Pourquoi le dollar est-il si fort alors que l’économie entre en récession, que le marché boursier est en pleine correction et que le gouvernement est endetté de 31 000 milliards de dollars ? »

Il aurait pu ajouter que le dollar perd de sa valeur à un taux annuel de 8,3%.

Qu’est-ce que cela signifie ? La Grande-Bretagne se dirige-t-elle vers plus d’inflation ? La politique de réduction des impôts de M. Kwarteng est similaire à celle de Donald Trump en 2017. Elle est conçue pour allumer un feu sous l’économie, et que celle-ci s’élève dans les airs.

Les investisseurs s’attendent plutôt à ce qu’elle fasse gonfler encore plus l’inflation ; ils vendent donc des livres sterling et achètent des dollars.

Le dollar reste roi

Le dollar est toujours la monnaie de référence dans le monde. Mais, à mesure que le dollar augmente, d’autres monnaies semblent vouées à leur perte. Surtout celles des marchés émergents. Ils ont emprunté des dollars bon marché. Maintenant, on s’attend à ce qu’ils remboursent leurs emprunts avec une devise beaucoup plus chère.

Et qu’en est-il des Américains ? N’ont-ils pas emprunté des dollars eux aussi ? Et chaque hausse de taux ne rend-elle pas leurs dollars plus chers et leurs dettes plus difficiles à rembourser ? Sont-ils aussi fichus ?

Hier, nous avons abordé un sujet provocateur. Peut-être que l’inflation n’est pas si mauvaise pour tout le monde. Et peut-être que les autorités – au Royaume-Uni comme aux Etats-Unis – ne sont pas aussi désireuses de la combattre qu’elles le semblent.

Mais revenons en arrière.

Il y a des règles universelles. Et il y a des politiques. Les règles – ne pas tuer, ne pas voler, conduire du bon côté – profitent à presque tout le monde. Les politiques tels que les plans ou les grands programmes économiques profitent cependant toujours à quelques-uns, au détriment du plus grand nombre.

Et l’inflation ?

L’inflation est une politique. C’est une taxe. Comme toutes les taxes, elle frappe certains plus durement que d’autres. Et plus vous descendez dans la montagne de la richesse, plus la chute est dure.

Un bon cadeau

Pendant les 20 premières années de ce siècle, l’inflation était un cadeau pour l’élite. La Fed a gonflé la monnaie et acheté des obligations, injectant 8 000 milliards de dollars d’argent frais dans Wall Street. Cet argent frais a fait baisser les taux d’intérêt et augmenter le prix des actifs tout en épargnant les prix à la consommation.

Mais la politique de taux zéro de la Fed a poussé les gens à emprunter beaucoup trop d’argent. Cet excès est maintenant intégré dans la dette – 30 000 Mds$ pour le gouvernement américain, 60 000 Mds$ pour les entreprises et les ménages. Quelqu’un doit payer cette dette.

Et c’est peut-être la seule chose sur laquelle les élites républicaines et démocrates sont d’accord – elles ne le feront pas.

En ce moment, la Fed augmente le coût de la dette. Les actions et les obligations ont baissé – de 15 à 20%, voire plus pour certaines.

Jerome Powell dit qu’il va continuer à le faire, en parlant ouvertement d’un taux des fonds fédéraux qui atteindrait environ 4%. À chaque pas, Powell croit qu’il devient plus grand, qu’il suit les traces géantes de Paul Volcker et qu’il se positionne pour un prix Nobel… ou au moins la couverture du TIME. Il sera l’homme qui sauvera la planète en vainquant l’inflation.

Mais, pour maîtriser l’inflation, il faudra faire plus d’efforts. Paul Volcker a dû porter le taux des fed funds à 20% – soit 700 points de base au-dessus de l’indice des prix à la consommation (IPC) de l’époque – afin de maîtriser l’inflation.

La Fed d’aujourd’hui a encore un long chemin à parcourir.

Mode de survie

Souvenez-vous, soit vous soutenez l’inflation… soit l’économie de la bulle meurt. Et si elle meurt, le cimetière se remplit… d’obligations, d’actions, d’entreprises, de prêts, d’hypothèques, de biens immobiliers – presque tous les actifs. Une grande partie de la richesse de l’élite est enterrée.

Et, pendant que le prix des actifs va en enfer… le gouvernement va au purgatoire. Pas complètement mort, mais avec beaucoup moins de marge de manœuvre.

De notre collègue Dan Denning :

« Le gouvernement américain ne peut pas se permettre de payer 1 000 Mds$ d’intérêts sur ses milliers de milliards de dollars de dette qui doivent maintenant être refinancés à des taux d’intérêt beaucoup plus élevés. »

Les dépenses devraient être réduites – de manière drastique. Finie, la « relance ». Finis, les cadeaux. Finies, les incitations au chômage. Finis, les chèques à l’Ukraine. Finie, la transition vers l’énergie verte… le gouvernement américain serait en mode de survie.

Le reste de l’économie serait également en mode rétropédalage… sous le coup d’une augmentation considérable des charges d’intérêts. La « liquidité » (l’argent liquide, quand on en a besoin) disparaîtrait. Les prêteurs verraient les défauts de paiement arriver de toutes parts. Les Etats-Unis entreraient dans une profonde dépression, probablement accompagnée d’émeutes, de grèves, de chaos social et de violence politique.

Est-ce que cela va se produire ?

Nous ne le pensons pas. Un honnête homme, lorsqu’il ne peut pas payer ses dettes, l’admet et accepte les conséquences. Il se serre la ceinture. Il se soumet docilement au chapitre 7 ou au chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites. Il essaie de s’amender.

Mais un homme avec 30 000 Mds$ de dettes et une planche à billets dans son sous-sol ? Il a une autre option : l’inflation. Chaque année, l’inflation réduit le poids de sa dette.

Il est heureux d’imprimer de l’argent. Il paie ses dettes avec ses faux billets. Et tout le monde se demande pourquoi les choses deviennent si chères.

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