La Chronique Agora

Châteaux en Espagne

Aux dernières nouvelles, la BCE n’anticipe pas de récession en Zone euro. Pourtant seule l’Espagne semble sur une trajectoire économique prometteuse.

La BCE table sur 1,7% de croissance en 2019 et en 2020, et 1,5% en 2021. Ces prévisions sont-elles crédibles ?

Natixis étalait ses doutes dans une note du 10 décembre.

Malgré tous les risques qui coagulent, la banque estime qu’il est « difficile de défendre aujourd’hui un scénario de récession dans la Zone euro. »

Certes, continue Natixis :

« Il y aura certainement freinage de la croissance de la Zone euro en 2019. Mais les facteurs de soutien de l’activité sont nombreux : politiques budgétaire et monétaire expansionnistes, très bonne situation financière des entreprises, désendettement des ménages et absence de bulles sur les prix des actifs, recul du prix du pétrole ».

Ce diagnostic appelle plusieurs remarques.

Tout d’abord, je ne partage pas le point de vue selon lequel la Zone euro serait exempte de bulles sur les prix des actifs.

Ensuite, tout repose sur la poursuite de la gabegie budgétaire et monétaire et sur les très volatils cours du pétrole. La banque estime d’ailleurs que la croissance de la Zone euro est particulièrement sensible à cette dernière variable.

Dans une autre note en date du 13 décembre, elle estime :

« Se tromper d’un million de barils par jour sur la production mondiale de pétrole en 2019 [sur environ 90 millions de barils produits par jour au mois de décembre], c’est se tromper de 13 $ le baril sur le prix et de 0,4 point sur la croissance de la Zone euro » !

D’ailleurs, les dernières statistiques économiques relatives aux deux plus grosses économies de la Zone euro sont assez sinistres.

Les deux plus grosses économies de la Zone euro bientôt confrontées à la récession ?

 L’indice de production français est mal orienté.

Indices PMI de la France en décembre 2018

En Allemagne, tant le climat des affaires que les carnets de commandes de produits manufacturés ont rejoint des niveaux alarmants :

Climat des affaires allemand en décembre 2018


Eurozone : l’Allemagne confrontée à une récession ?
La probabilité d’une récession allemande est sous-estimée (PIB allemand ; carnets de commandes chinois du Guangdong ; carnets de commande allemands de produits manufacturés)

Source : The Daily Shot du Wall Street Journal du 18 décembre 2018

Comment s’étonner de cette détérioration de l’activité économique ?

Les mêmes causes produisent les mêmes effets !

Le 21 novembre, Natixis rappelait trois des raisons qui expliquent que la Zone euro ne parvient pas à dépasser la barre des 2% de croissance :

  1. « L’effort d’investissement en nouvelles technologies et de robotisation des entreprises de la Zone euro est faible, ce qui contribue à expliquer la faiblesse des gains de productivité ;
  2. Le niveau de compétences de la population active et la qualité du système éducatif sont en moyenne faibles ;
  3. L’arrêt de la circulation des capitaux entre les pays de la Zone euro en 2010 empêche que l’épargne de la Zone euro y finance les investissements efficaces. »

 

Vous aurez remarqué que l’on a affaire à des problèmes d’ordre fondamental qui auront donc des conséquences de long terme.

Aucune décision de politique budgétaire ou monétaire ne saurait en effet permettre du jour au lendemain aux entreprises de rattraper leur retard en termes de modernisation de leur capital, ni aux étudiants ou à la population active d’être plus qualifiés, ni à la confiance de revenir entre les pays prêteurs et les pays emprunteurs au sein de la Zone euro.

Le capital humain est le nerf de la guerre pour une croissance pérenne

Peut-être vous dites-vous qu’en France, des ingénieurs on en a, et que le problème tient simplement au fait que beaucoup d’entre eux quittent l’Hexagone pour des pays où les charges sociales permettent aux entreprises de mieux les rémunérer.

Ce n’est pas moi qui vais vous dire le contraire. Mais : si la Zone euro dans son ensemble affiche des difficultés de recrutement et un taux de chômage élevé, cela est dû à un déficit de compétences, de qualification de la main d’œuvre.

C’est un enjeu véritablement central puisque s’il y a une pénurie de travailleurs qualifiés pour utiliser par exemple des machines plus modernes, il n’est pas forcément intéressant pour les entreprises de moderniser leur capital, et l’économie s’enlisera peu à peu dans une production bas de gamme…

Réformes : comment procéder ?

Un pays trouve grâce aux yeux de Natixis sur le plan de la méthode pour mener des réformes.

Si l’objectif d’un politicien est avant tout d’être efficace plutôt que d’être réélu, celui-ci doit bien sûr d’abord rendre l’environnement des affaires favorable aux entreprises et réduire la taille de l’Etat dans l’économie, avant de faire d’éventuels cadeaux aux ménages : « d’abord redressement de l’offre, puis amélioration des finances publiques, et seulement alors soutien de la demande et du revenu des ménages. »

Soit tout le contraire de ce qui a été fait et de ce qui est prévu par exemple en Italie et en France où, à force de ne mener que des politiques d’aide, on finit par récolter des demandes pour plus d’aides.

 

Voilà où en est la France d’Emmanuel Macron, alors même que le retournement cyclique est encore à venir…

Malgré tous les cadeaux que le gouvernement pourra faire à court terme, si rien de radical n’est fait sur le plan de l’offre et pour réduire la taille de l’Etat dans l’économie, nous n’avons devant nous qu’un choix entre deux possibilités, comme l’explique Natixis :

 « Accepter la poursuite de la désindustrialisation ; accepter une correction à la baisse du coût du travail. »

En 2009, l’Espagne a choisi la deuxième solution : quatre ans de modération salariale dont je vous laisse apprécier l’intensité.

La voie espagnole vous semble-t-elle traçable en France sans révolution ?

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