Les projets fantasques dont le seul mérite est de capter des subventions publiques ou de servir de vitrine aux politiques de décroissance doivent disparaître.
Les chiffres sont formels : la transition énergétique ne se fera pas selon la version romancée que nous vend une partie de la classe politique.
Ceux qui pensent qu’il suffirait de « faire payer les riches » (comprendre : « les autres »), et ceux qui imaginaient que l’humanité allait prendre avec le sourire le chemin de la décroissance en seront pour leurs frais.
Le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) confirme trois éléments majeurs qui viennent battre en brèche les arguments de certains politiques qui veulent faire de la transition énergétique un programme écologique ou égalitariste.
Le premier est que l’humanité ne prend pas la voie de la préservation de l’environnement avant tout. Elle ne cherche pas à réduire son effet sur les écosystèmes ou à limiter sa consommation d’énergie, mais à conserver et améliorer son niveau de vie.
Le deuxième est que la transition énergétique est chère – très chère, même. Il s’agit donc d’un effort significatif qui représentera un coût colossal pour l’ensemble des citoyens. Celui-ci est désormais chiffré, et il se monte en milliers de milliards d’euros par an.
Le troisième élément est que la transition énergétique est compatible avec le capitalisme et le libéralisme. Les investissements nécessaires à la migration vers le zéro carbone peuvent être – et sont déjà en grande partie – assurés par des capitaux privés, du fait de leur rendement positif. Pas besoin, donc, de nationaliser nos économies et réguler tous nos faits et gestes au nom d’un idéal décarboné : le secteur privé prend déjà, par lui-même, le chemin de la décarbonation.
Pas de décroissance dans la soif d’énergie
Certains écologistes prônent la baisse globale du niveau de vie pour réduire la consommation d’énergie. Il est vrai que, dans l’histoire de l’humanité, consommation d’énergie et richesse ont toujours été positivement corrélées.
Rien n’étant plus sobre que la pauvreté. Certains y voient le levier idéal pour réduire nos émissions de CO2.
Les derniers chiffres de l’AIE prouvent que ce n’est pas la voie dans laquelle l’humanité s’engage. La consommation d’énergie continue de croître (23 966 TWh en 2020, 25 300 TWh en 2021), et le monde continue d’investir massivement tant dans l’amélioration de l’efficacité énergétique (la quantité d’énergie consommée par point de PIB créé) qu’en offre absolue d’énergie.
Même si la croissance mondiale est prévue pour être atone cette année sur fond d’inflation occidentale et de ralentissement chinois, la consommation globale d’énergie devrait encore augmenter entre 1% et 2%, et plus du double pour la consommation d’électricité. Dans le même temps, l’augmentation de l’efficacité énergétique devrait s’établir entre 1% et 2%. Ainsi, la hausse de niveau de vie de l’humanité sera assurée, en 2023, à 50% par l’augmentation de consommation d’énergie et à 50% par l’augmentation d’efficacité de l’énergie utilisée.
Cette année encore, le PIB mondial continuera de croître, ainsi que la production d’énergie. N’en déplaise aux déclinistes, cette tendance n’a aucune raison de s’interrompre.
Impossible de « faire payer les autres »
La transition énergétique a été initialement présentée aux populations sur des bases fallacieuses. La première est qu’elle ne coûterait que quelques milliards d’euros ; la seconde qu’il était possible de la financer en concentrant l’effort sur des acteurs économiques ciblés (groupes pétroliers, milliardaires, usines chinoises).
Le point commun entre ces mensonges ? Dans tous les cas, il s’agissait de faire croire que les efforts seraient soit insignifiants, soit portés par « quelqu’un d’autre ».
La réalité est que les entreprises n’utilisent pas les énergies fossiles par volonté de nuire, de polluer, ou d’asservir d’innocentes victimes, mais parce qu’elles ont des caractéristiques uniques et qu’elles sont bon marché par rapport aux services rendus.
Le corollaire est que s’en passer coûtera cher et que, si les énergies renouvelables ont des avantages indéniables en termes de pérennité et de protection de l’environnement, elles sont dans un premier temps un investissement coûteux.
L’an passé, les montants mobilisés pour les énergies vertes ont atteint un record historique, et devraient dépasser les 1 700 Mds$ pour la seule année 2023. C’est moitié plus que les investissements dans les énergies fossiles, et l’enveloppe annuelle est en constante augmentation.
Evolution des dépenses dans les énergies renouvelables (en vert) et fossiles (en bleu). Source : AIE.
Le seul développement du photovoltaïque va engloutir, chaque jour, un milliard d’euros – c’est plus que les investissements dans l’exploration et la production de pétrole. Le changement est de taille lorsque l’on sait que le pétrole captait, il y a seulement dix ans de cela, près de cinq fois plus de flux financiers que le solaire.
Or, le retour sur investissement à court terme des énergies renouvelables est inférieur à celui des fossiles. Ces milliers de milliards d’euros sont un coût net pour l’économie, qui est réglé par toutes les entreprises et les citoyens.
Le fait que cet investissement soit rentable à long terme ne change rien à son prix dans l’immédiat, et celui-ci s’exprime en milliers de milliards de dollars par an qui sont fatalement prélevés sur l’économie réelle.
Les subventions ne peuvent pas tout – et tant mieux
Selon l’AIE, la transition énergétique ne pourra se faire par le seul volontarisme étatique. Pour l’agence, il est surtout vital que les pouvoirs publics s’obligent à maintenir un paysage législatif stable, condition sine qua non pour que le secteur privé ait suffisamment de visibilité pour déployer ses capitaux en toute connaissance de cause.
Le fait est qu’au vu des montants à mobiliser, la dépense publique n’est plus suffisante. Le temps du seul financement de la recherche fondamentale par les Etats est révolu – ces budgets « à fonds perdus » ne représentent d’ailleurs plus qu’une infime partie des investissements dans la transition énergétique.
Dépenses de R&D gouvernementales dans l’énergie, en milliards de dollars
Les dépenses publiques de R&D augmentant moins vite que les enveloppes globales d’investissement, leur importance relative continue de baisser.
Ce passage de flambeau est une bonne nouvelle. Il signifie que le secteur privé a trouvé un modèle d’affaires qui lui permet de financer la transition énergétique avec une espérance de gains positive. Le signal est d’autant plus positif que les taux d’intérêt ayant bondi depuis 2022, les investisseurs n’ont plus aucun intérêt à financer des projets dont le rendement est inférieur à celui des emprunts d’état.
Selon l’AIE, toutes dépenses confondues, le privé devra assumer les deux-tiers des coûts de la transition énergétique. Ces acteurs économiques n’étant ni des philanthropes, ni des gouvernements qui jouent avec l’argent des autres, ils s’assureront qu’il ne s’agit pas de placements à perte.
Nous devrions voir disparaître – et c’est tant mieux – les projets fantasques dont le seul mérite est de capter des subventions publiques ou de servir de vitrine aux politiques de décroissance. Place aux fermes photovoltaïques, aux parcs éoliens, et autres électrolyseurs qui génèrent des kWh pour leurs utilisateurs, et des euros pour leurs exploitants.
C’est de cela dont nos économies ont besoin.