La Chronique Agora

Une crise garantie par le gouvernement

** Les Américains ont voté pour le changement… et ils vont l’avoir. Mais le changement auquel ils vont assister n’est peut être pas celui qu’ils attendaient de la part d’Obama. Il se peut que quelque chose de bien plus sinistre arrive.

– Après une élection et une inauguration historiques, le président élu Obama va prendre ses fonctions avec à la clé une très longue liste de défis à relever. Ces défis — d’une contraction économique à des faillites de grande ampleur dans les entreprises en passant par un endettement national en pleine explosion — vont sans aucun doute réduire son programme.

– Espérons qu’Obama comprendra que l’économie a besoin d’incitations, de bénéfices et d’investissements. L’économie ne peut pas être imposée et régulée sans qu’il y ait potentiellement de graves conséquences. L’ancien président de la Fed, Paul Volcker (également le dernier président de la Fed à avoir appliqué une surveillance adulte à la communauté bancaire) est un conseiller d’Obama. Obama devrait donc être informé des conséquences de dépenses superflues et d’impression de billets façon période Carter.

– Du moins Obama doit-il contrôler le potentiel du Congrès démocrate à transformer une récession en crise.

** N’oubliez pas que les présidences ressemblent rarement aux campagnes. Le président Bush a fait campagne pour un gouvernement limité et une politique extérieure humble et c’est l’inverse qui s’est produit. Pour couronner le tout, il y a eu l’illusion d’une vraie croissance, avec une bulle du crédit et une bulle de l’immobilier qui ont mené à la pire répartition des ressources de toute l’histoire.

– L’économie de marché a été injustement accusée d’être responsable de cette crise financière. Mais ce n’est pas l’économie de marché qui nous a amenés à ça ; c’est l’association des dépenses gouvernementales et d’un capitalisme de copinage. On a dit bien des choses sur la façon dont il faudrait re-réguler Wall Street, mais le fait est que le problème n’aurait jamais pris de telles proportions sans les conflits entre agences de réglementation.

– Les conflits entre agences, c’est la mentalité du "pile je gagne, face tu perds". Les PDG, les traders et les usines à titres adossés aux créances hypothécaires ont été payés plus pour prendre plus de risques. Nous ne devrions donc pas être surpris qu’ils aient trop fait jouer l’effet de levier pour augmenter les rendements sans tenir compte des risques.

– Une grande partie du problème actuel est le résultat de conseils d’administration totalement complaisants et incompétents. Carl Icahn a de bonnes idées sur la manière dont cela peut être abordé sans régulation excessive. Icahn explique comment la majorité des conseils d’administration se comporte comme des bureaucrates gouvernementaux. Selon moi, nous avons besoin d’une économie dans laquelle tout le monde se comporte comme des propriétaires, pas comme des "PDG-pillards".

** Le fait que notre système bancaire soit construit sur de l’argent papier a également contribué à cette crise. Le Trésor et la Fed ont laissé les institutions prendre une telle ampleur qu’elles sont devenues trop importantes, au point de n’avoir jamais tort. Sans les subsides des contribuables (c’est-à-dire Fannie et Freddie — deux des pires institutions du capitalisme de copinage de toute l’histoire) et les subsides des baisses de taux de la Fed, les prix des maisons aurait augmenté au même rythme que les revenus domestiques. Mais non, les prix des maisons ont explosé. Un capital précieux a été jeté par la fenêtre quand les acheteurs se sont laissé berner par la psychologie de bulle.

– Quand les craintes actuelles concernant la déflation seront écartées par la prise de conscience du caractère illimité de l’argent papier, nous assisterons probablement à un retour de l’inflation et des taux d’intérêt à long terme plus élevés.

– Mais pour l’instant, la demande obligataire demeure élevée (les taux restent bas). Le gouvernement va donc certainement continuer à produire des quantités record de nouvelles obligations et les utiliser pour remédier aux faillites en chaîne, et non à des fins productives. En d’autres termes, le gouvernement va continuer à donner des milliards de dollars à des morts-vivants comme AIG — une entreprise qui ne produit rien, si ce n’est des pertes spectaculaires et des gros titres embarrassants — plutôt que de donner des milliards de dollars à des entreprises qui produisent des biens essentiels comme des barils de pétrole ou des tonneaux de blé. Quand le gouvernement donne des crédits faciles à des industries non-productives, l’approvisionnement en devises augmente proportionnellement à l’approvisionnement en biens et en services. On appelle ce phénomène l’ "inflation".

– Les besoins d’emprunts massifs du gouvernement dans les prochains mois vont absorber une grande quantité de "capitaux privés" qui auraient sinon financé diverses entreprises productives. Cela signifie que les fermiers, les mineurs et les fabricants vont devoir lutter pour trouver les crédits et les investissements dont ils ont besoin pour financer leur production. Et si les fermiers ne parviennent pas à obtenir des crédits, ils ne peuvent plus semer ; l’approvisionnement en céréales va chuter… et les prix augmenter.

– Comme l’avait observé Albert Einstein, "on ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l’ont engendré". Si le gouvernement fédéral propose des "solutions" à cette crise avec le même type de raisonnements que ceux avec lesquels ils nous ont conduits ici, nous risquons de traverser une très longue période de difficultés économiques. Le statut des Etats-Unis en tant que destination pour les capitaux étrangers est en jeu.

– Si le nouveau gouvernement n’agit pas avec sagesse et ne comprend pas comment nous en sommes arrivés là, la seule "garantie gouvernementale" que nous avons… c’est la crise.

Par Dan Amoss (*)

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