La Chronique Agora

Un trou de dette sans fond

** Vous avez vérifié vos ordres stops, cher lecteur ?

* Rappelez-vous, en novembre dernier, nous attendions le "Rebond Obama". C’est l’un des phénomènes les plus fiables du monde de l’investissement, disions-nous. Puis nous avons commencé à nous poser des questions. Mois après mois… et pas de rebond.

* Il a mis du temps à venir… puis, enfin, en mars, les prix ont pris le chemin de la hausse. Depuis le 9 mars, les marchés boursiers mondiaux ont repris 37% — une bonne moyenne pour un rebond post-krach.

* A présent, il semble que le rebond de marché baissier touche à sa fin. Le Dow Jones a chuté. Nous ne savons pas si c’est vraiment la fin — mais ça va se faire sans nous. Au point où en sont les choses, il est dangereux d’être trop investi en actions.

* Pourquoi ? Parce que la Bulle Epoque est terminée. La bulle du secteur financier a éclaté l’an dernier. Ca a marqué la fin d’un demi-siècle d’accumulation de dette. Il est plus probable de voir la dette jetée, mise à la poubelle, abandonnée, remboursée ou passée en pertes et profits.

* Lorsque le secteur financier ne gonfle pas les actifs, les prix tendent à baisser, non grimper. Et sans le secteur financier pour accumuler de la dette… et donner aux consommateurs américains l’argent nécessaire pour creuser des trous encore plus profonds… l’économie mondiale tout entière doit être restructurée. Les industriels de Chine ne peuvent plus compter sur les consommateurs de premier et dernier recours aux Etats-Unis. Les Américains n’achètent plus ce dont ils n’ont pas besoin avec de l’argent qu’ils n’ont pas. Parce que personne ne leur prête d’argent. Le commerce mondial s’enlise. Les navires patientent dans les ports ; où sont les conteneurs ? Les usines attendent les commandes et les magasins attendent les clients ; mais où sont-ils ? Ils ne vont pas venir… parce que s’il y a bien une chose que les Américains ont appris de cette crise, c’est qu’ils doivent cesser de dépenser autant d’argent. Ils n’ont pas le choix ; ils doivent rembourser leurs dettes, pas en rajouter.

* Nous avons entendu dire que la Chine est en train de se remettre. Nous n’y croyons pas. Qui achète ?

* On dit aussi que l’économie américaine est proche de son plus bas. Nous n’y croyons pas non plus.

** Attendez… demandons à Alan Greenspan. Voici ce qu’en dit Bloomberg :

* "L’ancien président de la Réserve fédérale Alan Greenspan a déclaré mardi que ‘les germes d’un plancher’ devenaient visibles dans la chute des marchés immobiliers américains’."

* "Durant un sommet de la NAR, l’Association américaine des agents immobiliers, Greenspan a déclaré qu’il y avait des raisons de penser que les stocks considérables de maisons non vendues étaient en train de se réduire et que cela devrait apporter de la stabilité aux prix".

* "Il me semble, si l’on juge par l’équilibrage de la formation des ménages […], les conversions, les fusions, les démolitions… que nous sommes proches d’une liquidation majeure de cet excès de stocks, dont je soupçonne et espère qu’il aura un rythme tel qu’il stabilisera les prix", a déclaré l’ancien président de la Fed.

* "Alors que j’observe le marché immobilier… nous commençons enfin à voir les germes d’un plancher" a-t-il ajouté.

* Nous pouvons imaginer les germes d’une reprise. Nous pouvons imaginer les signes d’un plancher. Mais nous n’avons pas la moindre idée de ce que peuvent être les "germes d’un plancher".

* Est-ce qu’ils germent vers le bas ? Et se transforment en plancher ? Que se passe-t-il ensuite ?

* En tout cas, ça confirme les choses, pour nous. Si l’ancien chef de la Fed pense voir "les germes d’un plancher", c’est que le plancher est encore loin. Comment le contraire serait-il possible ? On ne peut imaginer effacer les erreurs d’une accumulation de dettes longue de 50 ans en une seule année.

* Regardez le secteur automobile. Combien de temps faudra-t-il pour remettre General Motors sur le droit chemin… ou découper l’entreprise en petits morceaux… vendre les actifs… et remettre les parties saines au travail ? De nombreuses années. Combien de temps faudra-t-il pour éliminer les stocks immobiliers ? Des années. Combien de temps faudra-t-il à la Chine pour ajuster son économie à la consommation nationale ? Des années.

* Et combien de temps faudra-t-il au consommateur américain pour rembourser ses dettes jusqu’à ce qu’il retrouve une situation confortable ? Eh bien… une éternité. Il suffit de faire le calcul. Le taux d’épargne est passé à 5% du PIB. Cela représente 700 milliards de dollars par an. Mais l’excès de dette à lui seul est estimé (selon nos calculs) entre 20 et 30 000 milliards de dollars. A ce rythme, il faudrait 40 ans ou plus pour rembourser.

* Mais attendez encore un peu… alors que les consommateurs remboursent leurs dettes, leurs gouvernants empruntent plus que jamais. Alors que les consommateurs pourraient payer 700 milliards de dollars, le gouvernement américain emprunte 1 840 milliards de dollars — à ce rythme, les Américains ne sortiront jamais du trou.

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