La Chronique Agora

Un nouveau virus mortel

▪ Un nouveau virus fait des ravages dans le monde ces derniers jours. Pire que la grippe A, il a déjà atteint trois pays, et la contagion menace de s’étendre comme un feu de paille. Les autorités — malgré des interventions répétées — sont incapables d’endiguer l’épidémie. Le nom de cette redoutable maladie ? La "dégradation de la dette souveraine".

La Grèce a été atteinte la première. Mme Lagarde, ministre de l’Economie, ne voulait "même pas penser" à une possible contagion à d’autres pays… mais visiblement, elle n’aura pas vraiment le choix. Le virus est en effet passé au Portugal, puis à la Grèce. En Grande-Bretagne, on se tâte le front d’un air inquiet. La France clame avec conviction qu’elle va très bien, Madame la Marquise, sans que personne ne lui ai demandé quoi que ce soit. Personne n’est à l’abri.

Angel Gurria, à la tête de l’OCDE, compare la crise au virus Ebola : "c’est comme Ebola. Lorsque vous réalisez que vous êtes atteint, vous devez vous couper la jambe pour survivre", disait-il en citation dans le Guardian. Dur… mais réaliste.

Toutefois, la comparaison de Bill aujourd’hui me semble plus pertinente : une MST. La fièvre de l’endettement des Etats n’est pas une maladie qui frappe au hasard ; c’est une conduite à risque qui entraîne des conséquences graves. Demandez à l’Islande ou au Zimbabwe ce qu’ils pensent des emprunts gouvernementaux excessifs et de l’usage "non protégé" de la planche à billets.

Et ce n’est pas tout : que font les autorités pour résoudre le problème ? On exige des "engagements" et des "plans d’austérité" dont on sait parfaitement qu’ils ont autant de valeur curative qu’un cataplasme sur une jambe de bois… et puis on jette des milliards d’euros dans la bataille. Plus de 100 milliards, pour être précis. D’où vient cet argent ?

Angela Merkel s’indigne et sous-entend que la Grèce n’aurait pas dû rejoindre la Zone euro ; dira-t-elle la même chose de l’Espagne, dont le PIB représente cinq fois celui de la Grèce ou du Portugal ?

De toute façon, malgré les déclarations d’intention, tirades vertueuses et autres repentances de façade, les choses sont claires : les Etats, au lieu d’avaler l’amère pilule qui pourrait les mener à la convalescence, se conduisent — si vous me pardonnez cette comparaison — comme des adolescents pressés de "conclure" alors qu’ils ont oublié leurs préservatifs à la maison.

▪ La journée d’hier a donc été mauvaise, comme on pouvait s’en douter, sur les marchés européens. Le CAC 40 a reculé de 1,5% en clôture, après avoir perdu jusqu’à 2,5% en séance ; il a terminé la journée à 3 787 points. En une semaine, il a franchi à la baisse le seuil des 3 900 puis des 3 800 points… A Londres, le Footsie a chuté de 2,61% : les Anglais se sentiraient-ils particulièrement menacés ? A Francfort, enfin, le DAX a reculé de 1,22%.

C’est l’euro, bien entendu, qui a le plus souffert de la crise qui agite l’Europe. La monnaie unique continue de chuter, à 1,3124 $ hier en fin de journée, son plus bas niveau depuis un an.

Faut-il rappeler que la faiblesse de l’euro ne signifie pas pour autant que le dollar est une monnaie forte ? Visiblement, quelques investisseurs l’ont oublié, préférant — contre toute raison — se réfugier dans le billet vert que dans le métal jaune : ce dernier a chuté de 3,25 $ entre le premier et le second fixing londonien hier, à 1 161 $.

▪ Du côté des marchés américains, la Fed a permis de sauver les meubles ; elle maintient ses taux "d’urgence" vieux de bientôt 10 ans… et a "fait preuve d’un optimisme mesuré mercredi", selon Investir.fr, "expliquant qu’elle percevait une amélioration de l’économie et un début d’amélioration sur le marché de l’emploi, tout en promettant de maintenir ses taux à leurs niveaux actuels pour une ‘période prolongée’."

Tout ça a mis du baume au coeur des places US, qui ont réussi à clôturer dans le vert — de justesse pour le Nasdaq, qui a grappillé 0,01% à 2 471,73. Le Dow Jones faisait mieux, avec +0,48% et 11 045,27 points, tandis que le S&P 500 gagnait 0,65%, à 1 191,36 points.

Je rappelle, juste au passage, que les agences de notation ont déjà évoqué la possibilité de dégrader la note de la dette souveraine américaine ; tout l’Atlantique n’arrêtera pas la marche du virus…

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile