La Chronique Agora

Un nouveau credo

** Nous avons tenu notre propre Concile de Nicée la nuit dernière… à environ trois heures du matin… après une bonne dose de méditation et de boisson. Et nous sommes parvenu à une sorte de credo. Voici les choses telles que nous les considérons actuellement :

** I. Nous pensons que la Grande Modération a pris fin. Elle a cédé le pas à une période de volatilité… une période de Grande ‘Flation — avec les deux sortes, l’Inflation et la Déflation, luttant parfois l’une contre l’autre… unissant parfois leurs forces… parfois incertaines de la direction à prendre ou de ce qu’elles font. La déflation, comme nous le savons tous, est l’oeuvre du Diable. Mais l’inflation est l’oeuvre, en majeure partie, de la banque centrale américaine. Selon des estimations statistiques sur le sujet (le Trésor US ne déclare plus les chiffres), le M3, la mesure la plus large de la masse monétaire américaine, est en hausse de près de 20% par an. Si la production était stable, cela signifierait des augmentations de prix de 20% par an également. Peut-être plus.

* Jusqu’à présent, cela ne s’est pas produit — sauf dans quelques régions-clé, auxquelles nous allons venir dans une minute.

** II. Nous pensons que la Déflation fait son travail sur les bulles d’hier — en particulier dans les secteurs de la finance et de l’immobilier résidentiel US. L’Inflation, par contre, se concentre sur les bulles de demain — les matières premières, les soft commodities, les métaux précieux et le pétrole.

* Quant à la déflation, nous la voyons à l’oeuvre dans le secteur de l’immobilier, où les mises en chantier sont à leur plus bas depuis 17 ans… ce qui met la confiance des consommateurs à un plancher qu’on n’avait plus vu depuis 1993. Le Livre Beige de la Fed a confirmé que la récession était en chemin — si elle n’était pas déjà arrivée.

* Selon le magazine Forbes, les pires marchés sont ceux de Miami, Denver, Baltimore et Chicago. Nous ne connaissons guère les autres régions, mais jusqu’à cette dernière bulle, les prix de l’immobilier à Baltimore baissaient depuis 80 ans. A présent, ils semblent revenir à la tendance.

* Le Los Angeles Times ajoute que les prix sont laminés par les propriétés saisies — qui sont remises sur le marché. Selon USA Today, la situation va empirer avant de s’améliorer. Et les mises en faillite — générées en majeure partie par la chute des prix de l’immobilier — ont grimpé de 37% l’an dernier.

* Nous n’avons que peu d’informations au sujet du secteur financier — sauf que Merrill Lynch a passé entre six et huit milliards de dollars en pertes et profits.

* Mais nous nous méfions des chiffres. Ils bégaient. Ils sont évasifs. Ils mentent. Et pourtant, le monde entier se concentre sur les chiffres… sur l’argent… et nous gagnons notre vie en écrivant à leur sujet. Mais qu’en savons-nous vraiment ? Que nous disent réellement les chiffres ?

* En ce qui concerne l’inflation… cette semaine, nous avons vu non seulement un record historique pour le pétrole… mais également pour toutes les matières premières. L’or a grimpé de 37% ces 12 derniers mois. Le cuivre — souvent considéré comme une mesure de la santé économique — frôle un sommet. En Europe, l’inflation des prix à la consommation augmente à son rythme le plus rapide de ces 16 dernières années.

** III. Nous pensons que ces ‘flations auront pour effet combiné de réduire la valeur nette des Etats-Unis d’Amérique. Leur crédit et leur débit seront laminés par l’inflation comme par la déflation. Plus important, la valeur de la main d’oeuvre américaine sera diminuée… si bien que les Américains ne seront plus en mesure de rembourser leurs dettes et de faire concurrence (étant donné leurs compétences et leurs capitaux) sur les marchés mondiaux.

** IV. Enfin, nous pensons que c’est ainsi que le capitalisme est censé fonctionner — les gens n’obtiennent pas ce qui veulent, ni ce qu’ils attendent, mais ce qu’ils méritent. Les Américains sont au sommet du monde depuis plus d’un demi-siècle. Ils se sont donné trop d’importance… ils ont défié les dieux. Ils ont essayé de faire des choses que les mortels ne peuvent pas faire — vivre au-dessus de leurs moyens et refaire le monde à leur image… grâce à de l’argent emprunté, rien de moins. Il va falloir leur rabattre le caquet.

* Mais attendez… vous vous demandez probablement… comment se fait-il que les Américains ne puissent pas rester au sommet du monde pendant 50 années supplémentaires ? Il n’y a aucune loi l’interdisant. Et peut-être bien que ce sera le cas… mais pas avant qu’ils aient été battus assez sévèrement pour changer leurs habitudes. S’ils doivent continuer à dépenser de l’argent au rythme actuel, ils doivent trouver un moyen d’en gagner plus. Au lieu de cela, il est quasi-certain qu’ils devront réduire leurs dépenses. Mais c’est bien le but de toute cette tendance — réduire les salaires, les dettes et le pouvoir de dépense des Américains. Et c’est tout juste s’ils s’en aperçoivent !

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