La Chronique Agora

Un cycle intemporel

** "La question n’est pas de savoir quand nous atteindrons les 100 $, mais à quelle vitesse", déclarait Nauman Barakat à Bloomberg. Barakat, senior vice-président des futures sur l’énergie chez Macquarie Futures USA Inc., ne parlait pas du cours de l’action Macquarie Bank… mais bien du pétrole. "On ne trouve aucun facteur baissier sur le marché actuellement".

– Aucun ?

Eh bien, ce ne sont pas de bonnes nouvelles. Lorsque tout le monde est du même côté d’une transaction… ça devient vite bondé. Depuis trois semaines, nous nourrissons le soupçon parfaitement irrationnel qu’une correction guette le prix du pétrole. Ce soupçon n’a aucune base d’observation empirique. C’est simplement un sentiment que nous avons de temps en temps… comme si ça nous grattait entre les omoplates.

– Le pétrole a bon nombre de facteurs en sa faveur. Il y a une dynamique offre/demande. Le rapport Energy Watch paru la semaine dernière, par exemple, affirmait que le monde avait déjà atteint un niveau de production de Peak Oil. On pourrait penser que ce fait est également haussier.

– Tout de même, nous pouvons envisager au moins une raison pour laquelle le prix du pétrole chuterait radicalement : un krach boursier, suivi d’une bonne vieille récession mondiale. Bien entendu, nous ne sommes pas en train d’espérer que cela se produira. Mais même les haussiers du pétrole les plus déchaînés devraient se rappeler que les lois de l’offre et de la demande régissent tout… et voient tout.

– Si l’énergie devient trop chère, l’économie ralentira. C’est aussi simple que ça. On ne peut pas avoir une croissance à deux chiffres en Chine durant cinq années consécutives, des tensions géopolitiques exacerbées au Moyen-Orient et le Peak Oil en plus. Quelque chose va devoir céder. Nous pensons que ce sera le cours de l’or noir. Ceci dit, nous n’avons pas la moindre idée de quand cela se produira.

** Profitons-en pour regarder d’un peu plus près les cycles qui gouvernent les prix — tous les prix. Ces cycles sont incontournables — mais ils ne sont pas toujours évidents. Parfois, cependant, ils sont douloureusement visibles.

– Nous vivons une ère où on trouve plus de producteurs à bas prix, dans plus de secteurs différents, que jamais auparavant. Cela signifie que le prix de quasiment tout ce que vous pouvez acheter baisse, en termes réels, depuis 50 ans. Il est vrai que certains services sont plus chers. Mais cela fait naître une question intéressante :

– Plus une chose devient bon marché, plus elle est utilisée (en général). Le prix n’est pas une barrière. La baisse des prix accélère l’exploitation d’un élément. C’est particulièrement vrai dans le domaine des ressources naturelles. Mais nous savons ce que vous pensez sans doute : on ne peut pas utiliser une quantité infinie d’une ressource finie. En fin de compte, les prix bas devront se transformer en prix plus élevés à mesure que la ressource limitée devient de plus en plus limitée suite à l’accélération de la demande.

– Vous obtiendriez un bon point, pour une telle observation. Vous seriez également plus intelligent qu’un élève de cinq ans.

** L’introduction de taux de change flottants et de devises fiduciaires ne s’appuyant sur rien — sinon une garantie gouvernementale — a réellement pris de l’importance dans l’économie mondiale en août 1971, lorsque Richard Nixon a séparé le dollar US de l’étalon-or. Depuis, la masse monétaire et le crédit ont littéralement explosé.

– Et pour obtenir quelques bons points supplémentaires, nous nous demandons (en espérant que vous nous tiendrez compagnie) si cette explosion du crédit et de la masse monétaire n’a pas mené directement à une mauvaise allocation massive de capitaux humains et physiques. Une mauvaise allocation que vous ne verrez pas dans d’énormes monuments superflus comme les pyramides d’Egypte (même si les stades modernes en sont probablement l’équivalent).

– Non : selon nous, la gigantesque mauvaise allocation de capital depuis 1971 est simplement la population planétaire, dont la croissance est complètement déséquilibrée par rapport au taux naturel des 5 000 dernières années de l’histoire humaine. Plus de gens, ce n’est pas une mauvaise chose en soi. Après tout, nous sommes l’une de ces personnes que l’énergie et le crédit bon marché ont rendues possibles !

– Mais nous nous demandons simplement si la planète a les ressources nécessaires pour entretenir tant de monde. Et si ce n’est pas le cas, que va-t-il se passer ? Des guerres ? Des famines ? Des épidémies ? Des morts ? Ce serait un cycle, là aussi, mais d’une espèce plus intemporelle…

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