La Chronique Agora

L’Ukraine signera-t-elle la fin de l’empire américain ?

▪ Que diable ! Avec des succès comme l’Irak, l’Afghanistan, l’Egypte et la Syrie… il est tout à fait logique que les Etats-Unis envoient des troupes en Ukraine, non ?

Lorsque nous avons lu ça dans le Washington Post, nous avons pensé que c’était peut-être un poisson d’avril tardif. Puis nous avons découvert que l’auteur était sincère ; apparemment, James Jeffrey est idiot tout au long de l’année :

"Le meilleur moyen d’envoyer un message sérieux à Poutine et peut-être d’empêcher une campagne russe contre des Etats de l’OTAN plus vulnérables est d’adosser notre engagement concernant l’inviolabilité des territoires de l’OTAN sur des troupes terrestres — le seul déploiement militaire qui puisse rendre de tels engagements sans équivoque. L’administration [américaine] a envoyé des avions de chasse en Pologne et dans les Etats baltes pour renforcer les patrouilles et les exercices de l’OTAN, et c’est tout à son honneur. Mais ces déploiements, comme la présence temporaire de navires en Mer Noire, comportent des faiblesses intrinsèques en tant que signaux politique. Ils ne peuvent pas occuper le terrain — le critère ultime de tout calcul militaire — et peuvent être facilement retirés si des problèmes se présentent. Les troupes, même en nombre limité, envoient un message bien plus puissant. Plus difficiles à retirer une fois déployées, elles peuvent faire comprendre que les Etats-Unis sont sérieux en ce qui concerne la défense des frontières est de l’OTAN".

Pourquoi pas ? Les Etats-Unis ont un empire mondial. Toutes les bulles doivent trouver leur épingle. Et tous les empires doivent s’auto-détruire. Ce que M. Jeffrey propose en réalité, c’est simplement d’accélérer le processus en augmentant le nombre de déploiements militaires irréfléchis.

Qu’on en finisse… que les Etats-Unis puissent redevenir un pays normal, sans "alertes rouges" bidon…

Nous sommes bien de son avis. Qu’on en finisse… que les Etats-Unis puissent redevenir un pays normal, sans "alertes rouges" bidon… plans d’espionnage à grande échelle… et un budget "sécurité" de milliers de milliards de dollars qui réduit en fait la sûreté du pays.

Nous doutons que ce soit si simple, cependant. Les empires n’entrent pas sans violence dans cette bonne nuit. Ils brûlent… râlent et s’enragent contre la mort de la lumière.

Ils font aussi un effroyable gâchis. Les empires dépendent de la force militaire pour leur survie — et pour atteindre leurs objectifs budgétaires. En général, ils passent par le vol. Durant les guerres puniques, par exemple, les Romains ont comblé un déficit alarmant en conquérant la ville de Tarente. Ils ont ensuite volé tout ce qui était transportable… et vendu les citoyens comme esclaves. Problème réglé — au moins pendant un moment.

Les Etats-Unis sont uniques dans les annales de l’histoire impériale. Ils s’imaginent toujours récolter de riches récompenses — en statut sinon en argent — grâce leurs conquêtes… et ce n’est jamais le cas

▪ Pourquoi le cas des Etats-Unis est unique
Les Etats-Unis sont uniques dans les annales de l’histoire impériale. Ils s’imaginent toujours récolter de riches récompenses — en statut sinon en argent — grâce leurs conquêtes… et ce n’est jamais le cas. Woodrow Wilson pensait qu’il serait considéré comme un grand homme d’Etat international. Au lieu de ça, les Européens se sont moqués de lui et de ses 14 points. ("Le bon Dieu n’en avait que dix", a déclaré Clemenceau). Lyndon Johnson imaginait de profonds remerciements de la part des Vietnamiens. Tout ce qu’il a obtenu, c’est un "non merci" du peuple américain. Quant à George W. Bush, il imaginait que les richesses pétrolières d’Irak reviendraient vers son pays… et s’est retrouvé avec la guerre la plus coûteuses et la plus infructueuse de l’histoire américaine.

C’est uniquement parce qu’ils sont si riches que les Etats-Unis ont pu se permettre ce genre d’aventures. Or tout ça est en train de prendre fin. Pendant une bonne partie des trois dernières décennies, la machine de guerre impériale a été financée uniquement par le crédit — fourni en grande partie par la banque centrale. Combien de temps cela peut-il encore durer ? Impossible à dire. Probablement pas plus longtemps que la bulle de crédit elle-même.

En attendant, les sous-traitants de la défense, les lobbyistes militaires et les zombies du secteur de la sécurité continueront à militer pour plus d’interventions — en Syrie… en Ukraine… ou n’importe où. La bulle doit bien trouver son épingle quelque part !

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