Le Japon est pionnier des expériences monétaires ; les taux négatifs finissent par peser même sur la Banque du Japon et les Japonais se réfugient dans l’or et le cash.
Le Japon continue de déconcerter et d’étonner : 85% des obligations d’Etat japonaises ont maintenant des rendements négatifs. C’est comme une sorte de turbo destructeur de richesse qu’on ne pourrait arrêter.
C’est étrange. Fin juin, l’obligation à 10 ans affichait un rendement négatif, à -0,24%. Le rendement de l’obligation à 20 ans a chuté à 0,04%. Le rendement à 30 ans à 0,05%. Et le rendement de l’obligation à 40 ans est seulement à 0,065%.
Si vous n’achetez pas d’obligations japonaises et si vous n’êtes pas un épargnant japonais – ce qui est probablement le cas – vous pourriez alors vous demander pourquoi s’intéresser au si étrange marché japonais. C’est une bonne question.
Taux négatifs : Votre patrimoine survivra-t-il à cette expérience ?
Un bouleversement à court terme pourrait forcer les investisseurs à commettre des erreurs coûteuses. Si vous ne faites rien, votre propre patrimoine pourrait ne pas résister à ce chaos.
Le Japon est le laboratoire des réactions des banques centrales à la déflation. Ce qui se produit d’abord au Japon arrive généralement ensuite dans les autres pays. Lorsque les rendements deviennent négatifs et lorsque cela commence à déformer tout le système financier, cela vaut la peine d’y prêter attention.
Inutile, par exemple, d’acheter des obligations d’Etat. La Banque du Japon (BoJ) elle-même – le plus grand détenteur d’obligations d’Etat – a déprécié d’environ huit milliards de dollars son stock d’obligations souveraines en 2015. C’est ce qui se produit lorsque vous détenez jusqu’à maturité un titre à rendement négatif.
La Banque du Japon encaisse encore un revenu sur son portefeuille, principalement parce qu’elle a beaucoup d’obligations. Mais à mesure que la banque réduit doucement la valeur de ses obligations, le revenu généré est finalement entamé. Si les taux baissent et restent bas, le rendement global baissera lui aussi. Il pourrait même devenir négatif.
« Si les charges d’amortissement liées aux opérations d’achats obligataires par la BoJ deviennent trop élevées, il est possible que le revenu devienne négatif », a déclaré en avril Kazumasa Iwata, ancien gouverneur adjoint de la BoJ. Et qu’en est-il du risque du capital de la banque et de sa solvabilité ?
Il n’est pas ici question de discuter si les banques centrales peuvent faire faillite. Il suffit de dire que l’ancien Président de la Fed Ben Bernanke a répondu « non » lors d’un discours sur ce sujet il y a quelques années. Il admet que le ministre des Finances japonais, par exemple, pourrait augmenter la capacité de la planche à billets s’il y était obligé.
Mais cela ne serait certainement pas une bonne chose. C’est pourquoi, d’une manière ou d’une autre, nous nous approchons de la fin de cette expérience. Le monstre obligataire ne cesse de dévorer les rendements partout. Selon Bloomberg, les épargnants japonais, privés de rendements, les recherchent à présent dans les bons du Trésor US. Cela en a fait monter les prix encore plus… et a fait chuter les rendements aux Etats-Unis.
Le Japon n’est pas encore la Suisse, où toutes les obligations d’Etat affichent des rendements négatifs. Mais il en prend cette direction. Et si les Etats-Unis les suivent pour la simple raison que le capital mondial se rue vers les obligations US, l’or atteindra dans ce cas des sommets indescriptibles. [Ndlr : d’ailleurs, avant d’acheter la moindre once d’or, vous devriez lire ce message]
La confiance dans le système banquier s’effondrera. L’or et le cash en tireront bénéfice (tant qu’il sera encore légal de posséder du cash et qu’il n’aura pas de date d’expiration). C’est une position intenable pour les épargnants.
« Tout devient cher pour les investisseurs japonais, aucun rendement ne leur est laissé, que le risque, » commente Shuichi Ohsaki, chez Bank of America Merrill Lynch. « Il est possible que tous les rendements, y compris ceux de l’obligation à 40 ans, passeront en territoire négatif ».
Il a totalement raison. Comment gérer le risque lorsque votre seule option – si vous voulez un rendement – est de prêter à un Etat lourdement endetté pendant 40 ans avec un rendement bien maigre ?