▪ La vapeur s’est brusquement inversée à Paris le jeudi 29 juillet vers 15h38 (soyons précis, l’heure c’est l’heure !). Mais d’un point de vue technique, la septième séance de hausse a bien eu lieu avec l’inscription d’un septième plus haut intraday consécutif.
Prétendre que nous avions anticipé une rechute de 1,8% du CAC 40 en 90 minutes serait mentir : nous vous avons en effet recommandé de profiter d’une incursion au-dessus des 3 700 points (et de l’Euro-Stoxx 50 vers les 2 800 points, objectif testé au point près !) pour mettre la dernière main à la constitution de positions destinées à vous prémunir contre la matérialisation d’une troisième correction indicielle majeure en trois mois.
Nous soulignons que les signaux de ralentissement économiques se multiplient aux Etats-Unis. Le « gouvernator » Schwarzenegger a décrété l’état d’urgence budgétaire en Californie — en comparaison des déboires de l’ex-septième puissance mondiale, la Grèce n’affronte que quelques embarras passagers ! Et enfin, les politiques d’austérité mises en oeuvre en Europe devraient impacter négativement la consommation des ménages dès la rentrée.
▪ Comme nous le précisons régulièrement, nous n’attendons pas que les indices testent précisément les objectifs correspondant au consensus des chartistes. Cela nous a souvent évité de rater le coche pour une maudite poignées de points… ceux qui permettent à quelques fier-à-bras un peu chanceux de claironner qu’ils ont pris position à 0,05% du plus haut ou du plus bas d’un mouvement boursier moyen terme.
Le CAC 40 a en tout cas manqué de très peu le test de la résistance unissant les deux précédents zéniths majeurs du 13 mai (3 775 points) puis du 21 juin (3 750 points) puisque l’objectif se situait à 3 735 points. Il n’a flirté avec les 3 720 que l’espace de quelque secondes, même pas le temps de saisir le moindre ordre de vente à ce niveau, ni même de le modifier à 3 715 points.
Le CAC 40 ricoche globalement pour la troisième fois d’affilée sous la MM100, qui gravite vers 3 700 points. Une clôture au plus bas du jour le 29 juillet (vers 3 651 points) semblait marquer un net refus indiciel devant ce seuil technique.
Même si cela peut sembler purement symbolique, le CAC 40 a terminé en-deçà des deux précédents planchers de séance (3 645 et 3 656 points les 27 et 28 juillet). Les volumes relativement étoffés (4,1 milliards d’euros) témoignent d’une vigoureuse reprise en main de la tendance par les vendeurs au cours des 90 dernières minutes de la séance.
La principale incertitude résidait alors dans l’ouverture d’un gap baissier le 30 juillet : l’enjeu était la validation d’une figure de type « îlot de retournement » (après l’ouverture d’un gap haussier au-dessus de 3 636 points le 26 juillet), ce qui induit en théorie un gros risque d’accélération des dégagements sous les 3 600 points.
Si le PIB américain venait conforter les spéculations au sujet d’un évanouissement de la croissance, il apparaissait logique de parier sur une radicalisation du repli des actions, avec les 3 530 en ligne de mire sur le CAC 40 — c’est-à-dire le support ascendant court terme qui croise les MM25 et MM50, lesquelles se trouvent également regroupées à ce niveau.
▪ Mais nous avons bien compris que l’imposture médiatique des stress tests, suivie presque immédiatement par l’enterrement des mesures de sécurisation du système financier les plus impopulaires auprès des banques (le projet Bâle III), marquent la volonté des banques centrales — cette fois-ci, c’est la BCE qui s’y colle — de prendre toutes les mesures et de consentir à tous les renoncements propres à soutenir les marchés.
Cela avait fantastiquement fonctionné durant l’été 2009. Avouez qu’il était tentant de rejouer la même partition dans un marché déserté par une majorité d’opérateurs… D’autant qu’il est aisé de le manipuler à sa guise lorsque certaines firmes produisent entre 20% et 50% des ordres exécutés au quotidien sur les marchés (y compris les dérivés de type ETF et CFD).
Il faut vraiment avoir la foi du charbonnier pour rester persuadé que les indices demeurent gouvernés par le pur hasard — ou une subtile main invisible — alors que les ficelles sont tellement grosses qu’elles pourraient servir d’amarres à une plate-forme pétrolière au milieu du golfe du Mexique.
Désolé d’insister sur ce point, mais avec les sept sommets consécutifs du CAC 40, ce qui constituait autrefois un exploit exceptionnel (et même historique) semble devenir une habitude totalement banale depuis le 8 juin dernier ! Nous venons d’observer la troisième série d’affilée en l’espace de deux mois ; mais par deux fois déjà, ce genre d’obnubilation haussière s’est conclue par une vague de consolidation tout aussi inexorable.
Ceci démontre bien plus que l’extrême versatilité psychologique du marché. Il s’agit de l’exploitation cynique par quelques leaders d’un phénomène assumé de « suivisme généralisé ». Ce dernier systématise la perpétuation de chaque mouvement boursier, qu’il repose ou non sur des bases solides et rationnelles.
▪ La manipulation intentionnelle des marchés par les banques centrales — à des fins politiques et budgétaires évidentes aux Etats-Unis –, c’est un risque que nous ne saurions éluder. Nous y sommes de nouveau confrontés alors que s’achève un mois de juillet marqué par de brillantes performances boursières.
Beaucoup d’investisseurs espèrent que le mois d’août va débuter sur les mêmes bases et que toutes les mauvaises nouvelles seront systématiquement ignorées, la presse priée de vanter des lendemains économiques qui chantent et des profits d’entreprises qui enchantent.
Cela s’est déjà produit en 2009, cela pourrait se répéter en 2010, à quelques mois des élections de mi-mandat aux Etats-Unis, alors que l’emploi stagne et que la pauvreté gagne du terrain. N’oublions pas que plus de 40 millions d’Américains ont recours à l’équivalent de nos Restos du Coeur pour préserver un niveau d’alimentation correct.
Les prix immobiliers ne rebondissent pas (ou remontent si lentement dans quelques poches de prospérité résiduelles) et le niveau moyen des salaires baisse : connaissez-vous un autre recours qu’une hausse artificielle temporaire de la Bourse pour entretenir un sentiment de richesse au sein de la classe moyenne supérieure et des classes les plus privilégiées ?
L’histoire ne se répètera peut-être pas… cependant la réaction de Wall Street à la première estimation du PIB américain du second trimestre 2010 sera éclairante. Le chiffre peut être mauvais mais les indices US peuvent se remettre à grimper.
Il ne faudra pas être extra-lucide pour comprendre le message : la Bourse « doit » monter, et nous savons tous que personne n’a les moyens de se mettre en travers des projets d’une banque centrale, à part peut-être Goldman Sachs si le patron de la Fed, par extraordinaire, n’est pas issu de ses rangs !
Nous venons d’assister le 29 juillet à une correction inattendue des indices qui testaient d’importantes résistances : une consolidation « spontanée » après six à sept séances de hausse consécutives reste l’explication la plus plausible. Rien n’est gagné en ce concerne la baisse !
Le revirement de Wall Street pouvait cependant être relié au Beige Book de la Fed, publié ce jeudi, et qui mettait en évidence de nombreuses zones de fragilité de la croissance aux Etats-Unis. Le tout sur fond de consommation atone et de secteur immobilier toujours orienté à la baisse… sans oublier le durcissement des conditions d’octroi de crédit aux entreprises et aux particuliers. Les taux hypothécaires sont certes très bas mais les emprunteurs éligibles se font de plus en plus rares.
Parmi les gens que vous connaissez, par exemple, combien en font partie ?