La Chronique Agora

Seuls Apple et la Fed font bouger les marchés…

▪ Le marché s’était figuré la séance du 12 septembre comme une sorte d’Everest constitué d’un empilement de strates de suspense économique, politique et boursier, assorti de son cortège de spéculations tous azimuts… mais le Toit du Monde a finalement accouché d’un gravillon.

Soumis au réchauffement du climat observé sur les marchés ces 10 derniers jours, le front des glaciers himalayens ne s’est pas davantage effondré dans un fracas assourdissant. C’est tout juste s’il a doucement fondu sur place, libérant juste de quoi alimenter un timide ruisseau qui peine à se frayer un chemin dans la moraine.

Comme nous l’avions suggéré la veille, tout et son contraire était envisageable mercredi (y compris jusqu’au dernier quart d’heure). Nous avions recommandé un peu lâchement de ne pas faire de pari directionnel dans ce contexte propice aux évolutions de type « portes de saloon ».

▪ Un scénario de stagnation guère surprenant
Nous sommes à peine surpris du scénario de stagnation qui s’est matérialisé hier : quel que soit le pari initial, les chances de gagner étaient en réalité quasi-nulles !

Lorsque les juges de Karlsruhe ont commencé à lire le résumé de leurs délibérations, les indices boursiers ont reperdu en quelques minutes plus de la moitié de leurs gains initiaux, avant d’en reprendre le double au bout d’un quart d’heure.

Moins de 90 minutes après l’ouverture de Wall Street, les +1,2% affichés par les indices paneuropéens en milieu de matinée s’étaient transformés en -0,1%… et il ne restait qu’une demi-heure de cotations : que faire alors ? Jouer le fait accompli et liquider les positions constituées la veille ou peu après l’ouverture ? Reprendre du papier en espérant une initiative miracle de la Fed ce jeudi ?

Nous avons le sentiment que beaucoup d’opérateurs n’ont plus rien osé faire. Ils se sont agenouillés devant leurs écrans en priant pour qu’un événement exogène ne vienne pas mettre leur portefeuille ou leur stratégie en porte-à-faux ces prochaines 24 heures.

Le CAC 40 en particulier illustre à merveille le scénario que nous décrivons. En progression de 1% vers 10h30, il n’affichait plus que +0,18% au final (à 3 543, son niveau d’ouverture), après avoir laissé craindre vers 17h que la journée s’achèverait sur une consolidation. L’indice hexagonal réplique en grande partie le profil de la séance de vendredi et de lundi, avec des clôtures proches ou légèrement inférieures à l’ouverture.

▪ Pourquoi vendre ?!
Tout se passe comme si les « bonnes nouvelles » attiraient les acheteurs (ils prennent la main au fil des dépêches encourageantes) puis dans un second temps remobilisaient les vendeurs qui n’attendaient qu’une occasion pour leur déboucler des positions qui leur brûlent les doigts.

Le consensus est 100% haussier : il n’y a qu’à se laisser porter ! Alors pourquoi vendre ?

C’est un peu le symétrique des séances ou de « mauvaises nouvelles » s’enchaînent : les gérants s’allègent, les vendeurs reprennent des positions jusque vers 15h puis se font contrer en fin de séance alors que Wall Street déjoue soudain les anticipations baissières. Les mains les plus fragiles doivent réduire leur levier ou se racheter… et les vendeurs à découvert finissent paradoxalement par alimenter la hausse.

Ce n’est probablement pas un hasard si le CAC 40 s’est mis à grimper juste après avoir enfoncé 3 400 le 5 septembre. Et ce n’est probablement pas un hasard non plus si le CAC 40 a commencé à consolider sous les 3 575 points alors qu’un large consensus haussier le voyait retracer le zénith annuel des 3 600 avant la clôture… ou le communiqué de la Fed ce soir — et dans ce cas, il reste un espoir.

▪ La Fed et Apple, seuls sur les marchés une fois de plus
Le comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) débutait ce mercredi. Ben Bernanke devrait annoncer « quelque chose » ce soir, bien après la clôture des marchés européens. Certains ont une idée très précise de ce que prépare le patron de la Fed : un volet de rachat de MBS de 300 milliards de dollars, et un volet planche à billets du même montant.

D’autres estiment au contraire qu’il n’annoncera rien ce jeudi alors que Wall Street tutoie ses sommets historiques, de peur d’être accusé de chercher à enrichir d’abord les banques et les ménages les plus riches. En effet, 5% de la population américaine détient 80% des actions, les 95% restant se partageant les 20% restants (ce n’est qu’une vue de l’esprit car 40% des Américains ne possèdent aucune épargne en action).

Il existe au moins un consensus auquel nous adhérons : Wall Street le prendra mal si la Fed n’annonce rien de concret.

En attendant, les indices américains ont clôturé à l’unisson des places européennes. Il y a eu une hausse de 0,1% s’agissant du Dow Jones et un gain de 0,3% pour le Nasdaq. Ce dernier doit sa performance au seul titre Apple : il a clôturé en hausse de 1,4% à 671 $ après avoir présenté un iPhone 5 qui présente la particularité très remarquée d’être plus cher que l’iPhone 4s (dont le prix de vente est abaissé de 100 $).

Le plus gros évènement marketing de l’année se solde… par l’annonce de soldes sur les anciens modèles de smartphones d’Apple. Mais bon, les experts nous promettent que cela va rajouter 0,5 point de PIB aux Etats-Unis !

Avec la mise en oeuvre d’un QE3, la Fed n’est même pas certaine de parvenir à un résultat identique… En revanche, le prix de l’essence ne tarderait pas à tutoyer les deux euros le litre.

Quoi qu’annonce Ben « Dollarman » (le nouveau super-héros de l’Amérique que nous vous présentions hier), le grand gagnant du mois de septembre demeurera l’euro. La monnaie unique engrangeait hier +0,4% face au dollar, à 1,2910. Cela semble la placer sur une trajectoire ascendante moyen terme : le débordement des 1,2650 écarte le scénario d’un simple rebond technique dans la zone des 1,22 $.

Si l’euro poursuivait sa course au-delà des 1,30 $ (et des 100 yens, ce qui n’est pas anodin, au-delà de cette parité symbolique), qu’est-ce que l’Europe aurait à y gagner, si ce n’est une nouvelle chute des exportations des pays du sud et une aggravation des déséquilibres structurels à l’intérieur de l’Eurozone ?

La faiblesse du dollar.

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