La Chronique Agora

Russie, Crimée et matières premières : un mélange explosif…

▪ Quels changements la situation en Crimée implique-t-elle pour la Russie — mais du point de vue d’un investisseur ? Nous voyons quelques éléments de réponse aujourd’hui…

Bien évidemment, la Russie est un géant des matières premières. La production russe est importante pour le secteur manufacturier mondial, et de nombreux produits sont concernés. La Russie est un producteur et exportateur majeur de pétrole, de gaz naturel, de minerais, de métaux raffinés et de minéraux industriels. Selon une récente analyse de la société britannique Roskill, les secteurs de l’extraction, de l’énergie et de la chimie sont essentiels pour l’économie russe et représenteraient 80% des revenus d’exportation de la Russie en 2013.

La Russie est plus qu’un gros producteur et exportateur d’énergie et de matériaux ; le pays est aussi un acteur important dans la chaîne de production occidentale

Cependant, il est important de comprendre que le rôle de la Russie dans les matières premières est multi-dimensionnel. C’est-à-dire que la Russie est plus qu’un gros producteur et exportateur d’énergie et de matériaux ; le pays est aussi un acteur important dans la chaîne de production occidentale. Ainsi, les sanctions contre les entreprises russes pourraient avoir des répercussions négatives sur de nombreuses entreprises et économies européennes.

Regardons de plus près quelques éléments de la chaîne d’approvisionnement en métaux liée à la Russie. Cela affecte toutes sortes de choses en Occident, des tuyaux de forage à la production automobile en passant par la construction et l’électro-ménager. De la manière dont je vois les choses, si cette chaîne est interrompue à cause des sanctions russes, nous aurons vite des problèmes.

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Des matières au cas par cas
Le nickel : Le nickel est essentiel pour la fabrication d’acier inoxydable et de bien d’autres choses. Le principal acteur russe dans ce domaine, Norilsk Nickel, extrait des minerais en Russie mais raffine ses produits en Finlande. Dans l’ensemble, la Russie est le deuxième plus grand producteur de nickel au monde, après la Chine. La Chine de son côté consomme la majeure partie de son nickel en interne, ce qui fait de la Russie un fournisseur clé dans le monde. En 2013, la Russie représentait 26% des exportations mondiales de cathodes de nickel, ou environ 13% de la consommation mondiale totale de nickel. Sans le nickel russe, l’industrie sidérurgique mondiale sera rapidement perturbée.

Le cobalt : La Russie est également un important fournisseur de cobalt, utilisé dans l’acier et d’autres alliages. La Russie représente environ 6% de la production minière mondiale de cobalt, et 3% de la production raffinée. La majeure partie de la production russe de cobalt est liée à ses opérations Norilsk en Finlande, où le cobalt est obtenu à partir de la production de nickel. A 6% et 3%, comme vu, les chiffres du cobalt russe sont relativement bas dans l’ensemble, mais si les sanctions occidentales étouffent d’une manière ou d’une autre les opérations de Norilsk en Finlande, les effets se feront sentir sur l’offre mondiale de cobalt raffiné.

Le vanadium : La Russie est le troisième plus grand producteur au monde de vanadium — fournissant environ 10% de l’offre mondiale. Le vanadium est essentiel pour durcir l’acier et d’autres alliages ; c’est également un élément-clé pour l’avenir des batteries. Si l’offre de vanadium est mise à mal, toutes sortes de projets sidérurgiques et énergétiques pourraient être perturbés.

L’Europe est un grand importateur de tungstène russe, et une bonne partie de l’industrie européenne sera à la peine pour rattraper des pertes dues aux sanctions

Le tungstène : La Russie est le deuxième plus grand producteur de tungstène au monde (derrière la Chine) et représentait environ 6% de l’offre mondiale en 2013. Ne vous laissez pas tromper par ce petit chiffre brut : environ 70% du tungstène est du ressort de la Chine. Le tungstène est essentiel pour fabriquer des machines-outils et des pointes de forage. Il est essentiellement utilisé pour des choses nécessitant des métaux durs, denses, avec des points de fusion élevés. L’Europe est un grand importateur de tungstène russe, et une bonne partie de l’industrie européenne sera à la peine pour rattraper des pertes dues aux sanctions.

Le titane : La Russie est un grand fournisseur de titane pour l’aérospatiale aux Etats-Unis et en Europe, représentant environ 12% des importations. Deux des principaux acheteurs sont Boeing et Airbus, dont le fonctionnement pourrait être ralenti par le manque d’offre de titane, à court terme en tout cas.

Je pourrais continuer encore longtemps avec d’autres matières premières et énergétiques sortant de Russie, mais vous voyez l’idée. Les politiciens occidentaux ont peut-être l’impression qu’ils doivent « faire quelque chose » au sujet de l’annexion de la Crimée par la Russie — et mettent donc les sanctions en place.

▪ La Chine sort grande gagnante…
Sur le front de l’investissement, les sanctions occidentales pourraient avoir comme conséquences de donner aux dirigeants russes encore plus de raisons de regarder vers l’est — et les marchés chinois. La Chine est grande consommatrice de matières premières et de produits raffinés… et elle serait probablement en mesure d’acheter et d’utiliser les ressources russes qui ne partent plus à l’ouest.

Les différentes matières évolueront différemment, bien entendu ; certaines plus que d’autres…

Alors quelles sont les prévisions d’investissement pour tout cela ? Risqué ou pas ? Des cieux ensoleillés et un karma positif ? Eh bien, je n’aime pas les événements militaro-politiques précipités, comme la Russie s’emparant de la Crimée — peu importe à la profondeur des « liens » entre les deux pays. Mais ce qui est fait est fait.

De ce que je connais de la Russie et de ses dirigeants, la Crimée ne reviendra pas à l’Ukraine. Les politiciens occidentaux peuvent pousser de hauts cris, mais la Russie est la Russie, et les dirigeants russes travaillent à ce qu’ils considèrent comme leurs intérêts nationaux.

Quoi qu’il en soit, à court terme, les sanctions pourraient avoir des conséquences désagréables. En Occident, nous pourrions voir des perturbations sur des métaux essentiels en provenance de Russie, ce qui mettrait à mal de nombreuses entreprises occidentales — des constructeurs automobiles à l’aérospatiale et plus encore. Je peux imaginer des ralentissements, des licenciements et encore plus de mesures de relance de la part des banques centrales.

Je prévois également de belles opportunités pour des valeurs énergétiques européennes comme Statoil et Total

Je prévois également de belles opportunités pour des valeurs énergétiques européennes comme Statoil et Total, alors qu’elles mettent tout en oeuvre pour réduire le risque énergétique russe pesant sur leur approvisionnement.

A moyen terme, les chaînes d’approvisionnement se rééquilibreront en fonction des nouveaux risques politiques et économiques affectant les échanges avec la Russie. Les responsables d’achats sourceront de plus en plus leurs matières ailleurs qu’en Russie — même si cela revenait simplement à acheter des matériaux chinois fabriqués à partir de minerais russes. La Chine sera la gagnante de toute réorientation de la Russie vers l’est.

A long terme, nous verrons probablement de nouvelles opportunités d’investissement dans des entreprises orientées vers l’Occident, à mesure qu’elles travailler à pallier les manques dus aux pertes de matériaux et de marchés russes. Les gouvernements occidentaux se tourneront vers des acteurs importants pour faire avancer les choses — comme Freeport-McMoRan Copper & Gold, pour n’en nommer qu’un seul.

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