Le monde change – de plus en plus vite. Distorsions, tensions et inégalités en découlent : le retour à la réalité ne se fera pas sans crise.
Dans les périodes historiques dites normales, le monde change graduellement. Il évolue pour s’adapter aux conditions sans cesse changeantes, à la fois de l’intérieur et de l’extérieur.
Tout système évolue, dit-on, en fonction de ses antagonismes internes et externes, en fonction du jeu des forces antagoniques. C’est cela la vie, c’est cela la dialectique du mouvement, c’est cela l’adaptation, c’est le cours de l’Histoire… et il n’y pas de fin de l’Histoire, bien sûr !
Le gradualisme de cette adaptation fait que les changements sont tolérés et tolérables. Chacun s’adapte. La masse suit, il y a peu de laissés pour compte. C’est une sorte de grande marche en avant dont le rythme, modeste et progressif, permet le maintien de la cohésion des sociétés et l’efficacité des structures et institutions.
De l’accélération naissent les tensions
L’accélération artificielle du mouvement du monde sous la houlette particulière et spécifique de la finance dans les années 60 vient bouleverser l’harmonie. Les consensus antérieurs sont fracassés, pulvérisés.
C’est normal, puisque qu’il s’agit, pour les promoteurs de l’accélération de l’Histoire, d’un projet égoïste, articulé autour d’un seul principe : « the winner takes all », le gagnant ramasse toutes les mises !
Il s’agit pour cette hyperclasse de s’attribuer une part plus grande du surproduit global de la société. Cela crée des inégalités, des tensions, par ce que l’on appelle le développement inégal.
Les bénéficiaires de la marche en avant se coupent du monde, ils s’isolent et refusent de prendre conscience claire du problème que leur programme pose aux peuples. Ils font des Davos !
Pour continuer sans se remettre en cause, ils mentent, ils inventent des récits, des romans dont le but est à la fois la fois de masquer la situation qu’ils ont créée et de la justifier.
Ils manipulent les savoirs, les principes, les perceptions, les théories et jusqu’aux fondements même de la constitution des sujets humains – ils les reprogramment dans le transhumain.
La disparition/dissimulation du vrai monde
Le monde continue sa marche en avant… mais dans le brouillard et l’opacité créés par les élites, il s‘enfonce dans un ensemble de fausses représentations dont, peu à peu, les contours du réel disparaissent ; le vrai monde est escamoté, occulté, rejeté.
C’est la grande divergence entre l’imaginaire, le symbolique, et le réel – divergence qui garantit la fin des capacités d’adaptation par perte de contact.
Le réel gagne toujours, simplement parce qu’il est le réel, et la réconciliation est inéluctable. Il y a toujours une heure des comptes, une statue du Commandeur.
Les forces de rappel sont là : que ce soit celle de la pesanteur, celle de la rareté, celle de la mort, celle de la valeur ou simplement celles des rapports de forces.
La description du monde actuel comme un monde de bulles dépasse largement le monde financier, elle va à l’essentiel : tout est bullaire, gonflé, inflaté, déformé, en apesanteur, déconnecté du monde tangible.
L’idéologie moderniste est une religion, un opium, une drogue qui fait planer. Elle crée un environnement de fantômes, de zombies, d’ectoplasmes, de virtuel, d‘illusions – qui produit à son tour ses profiteurs, faux prophètes, faux magiciens et vrais illusionnistes.
Il y aura une Grande Réconciliation : c’est-à-dire que les ombres vont rejoindre les corps dont elles ont été séparées, les mots vont recoller à leurs contenus, les phrases à leur sens – et la fausse monnaie symbole/totem/fétiche de notre névrose sera dévalorisée.
Cela se fera brutalement : on appelle cela une crise.
La disparition de la vérité est une nécessité pour certains
Nous sommes en guerre sur tous les fronts : guerre contre la déflation, guerre contre la surproduction, guerre contre le sous-investissement, guerre contre le surendettement, guerre contre le climat, guerre contre les rebelles sociaux, guerre des kleptos contre tout le monde, guerre de tous contre tous ; vient s’ajouter à cela la guerre contre le virus !…
… Et tout cela sur fond de guerre électorale au sein de l’Empire.
Y a-t-il quelque chose d’étonnant dans la disparition de la vérité et de l’information objective ? Non, c’est la nécessité.
Nous sommes plongés dans un monde faux, dans un imaginaire destructif, noyés sous la drogue monétaire… même pas euphorisante pour les masses.
La fracture, les fractures, se creusent entre le réel et l’imaginaire, entre les groupes sociaux et entre les nations.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]