▪ Quoi de neuf ? Les marchés semblent encore s’interroger… attendre… observer ce qui va se passer — tout comme nous.
Le Premier ministre grec a obtenu un vote de confiance de son parlement. Cela a semblé donner aux investisseurs une certaine confiance. L’idée, c’est que si les Grecs peuvent faire semblant de savoir ce qu’ils font, le reste de l’Europe peut leur donner plus d’argent.
Parallèlement, les autorités japonaises semblent adopter l’approche directe. Elles seraient en train d’intervenir sur les marchés boursiers, achetant lorsque les cours sont à la baisse. Voilà qui doit aussi donner confiance aux investisseurs.
Aux Etats-Unis tout le monde semble attendre de voir ce qui va se passer lorsque le QE2 prendra fin. Si les actions et les obligations baissent, les fédéraux interviendront à coup sûr, d’une manière ou d’une autre. Une nouvelle raison d’avoir confiance.
Donc — au moins au niveau le plus élevé, les grandes autorités financières mondiales sont en harmonie… chantant la même chanson… et tous les investisseurs de la planète sont confiants. Tous des crétins, et tous feront faillite ensemble.
▪ Chaque jour, l’image se révèle un peu plus. Comme si nous étions dans un bateau. Nous entendons le trafic sur la rivière. Les sirènes. Les travailleurs s’interpellant. Le bruit des moteurs. Mais le brouillard nous empêche de voir qui ils sont, ou ce qu’ils font.
A présent, le brouillard commence à se lever. Pas uniquement pour nous. Même le Financial Times commence à voir les choses un peu plus clairement.
C’est-à-dire qu’ils commencent à voir les choses comme nous !
Clive Crook, écrivant dans le journal de lundi, voit que les Etats-Unis prennent la direction du Japon. Après une récession, les Etats-Unis se reprennent généralement rapidement, note-t-il. Mais cette fois-ci, quelque chose ne va pas.
Cette fois-ci, c’est différent. Oui, cher lecteur, différent des récessions typiques d’après-guerre que les Etats-Unis ont vécues jusqu’à présent. Cela ressemble plus à la Grande dépression… ou à la « décennie perdue » du Japon.
M. Crook remarque également qu’une mauvaise chose mène à une autre mauvaise chose… et ainsi de suite. Lorsque les gens n’ont pas d’emploi, par exemple, ils ne peuvent pas dépenser. Et lorsqu’ils ne peuvent pas dépenser, les ventes baissent. Les entreprises réduisent donc leurs coûts… et il y a encore plus de sans-emplois.
Les Etats-Unis étaient censés être dynamiques. On pensait — à la fin des années 90… puis au milieu des années 2000 — que la flexibilité de l’économie américaine la protégerait d’une récession trop grave.
Si le secteur automobile implosait, par exemple, les travailleurs de Detroit déménageraient simplement à Los Angeles. Problème résolu. Mais s’il y avait aussi un retournement du marché immobilier ? Et s’il n’y avait pas d’emplois à Los Angeles non plus ? On s’aperçoit maintenant que durant une crise, les jointures économiques de l’Amérique sont rouillées. Les gens ne peuvent plus vendre leurs maisons. Ils ne peuvent donc pas déménager. Ils restent où ils sont, parce que même s’ils avaient un emploi, ils ne pourraient pas entretenir deux résidences.
Hélas… Problème non résolu.
Aujourd’hui aux Etats-Unis, on trouve environ 25 millions de personnes voulant transporter des conteneurs et soulever des ballots, mais les conteneurs et les ballots ont disparu. Il n’y a nulle part où trimer. Le surplus de main-d’oeuvre tend à faire baisser les prix… ce qui, avec des taux collés au zéro comme une tique à un chien paresseux, fait grimper les taux d’intérêt réels. C’est ce que Paul Krugman et Gauti Eggertsson ont appelé le « paradoxe du labeur ». Ces deux économistes pensent que c’est un paradoxe. En réalité, ce n’est que l’autre côté du cycle du crédit… La retraite, où tout tourne mal.
Les consommateurs réduisent leurs dépenses pour épargner de l’argent. Moins de demande entraîne une baisse des prix. Les consommateurs commencent donc à anticiper des prix plus bas… et réduisent encore plus !
A mesure que les entreprises sont mises sous pression, elles essaient d’en obtenir plus de la part de leurs employés. Qui veut embaucher lorsque le destin de l’économie est si incertain ? Lorsque l’économie va bien, une hausse de la productivité augmente les salaires. Maintenant, elle les réduit. Les entreprises ont besoin de moins d’employés pour répondre à une demande plus petite — et ils ont beaucoup de chômeurs parmi lesquels choisir. Non seulement ça, mais toutes choses étant égales par ailleurs, la hausse de la productivité réduit les prix… ce qui nourrit le désir d’épargner, plutôt que de dépenser… et pèse plus encore sur les prix en l’emploi.
Un autre paradoxe ? Peut-être — mais ce n’est qu’une nouvelle dose de glissades, de chocs et de coups que l’on prend tandis qu’on est ballotté par la phase baissière du cycle.