▪ Nous soupçonnions depuis vendredi que la hausse échevelée des indices ne correspond ni à un courant acheteur identifiable, ni à une « intuition » que de belles et bonnes décisions seront prises ce mercredi à l’issue de la réunion de toutes les élites de l’Eurozone.
La rechute des indices mardi nous renforce dans cette conviction. Le but recherché a certainement consisté à mettre le maximum de distance entre les indices boursiers et les niveaux de rupture qu’ils tutoyaient encore jeudi dernier.
Les franchissements de résistance observés à Wall Street à cinq minutes de la clôture vendredi et lundi ne trompent plus personne… Cela permet juste de piéger quelques vendeurs à découvert qui ne souhaitent pas aller au bout de leurs stratégie baissière — pour les rares qui osent encore analyser le monde qui les entoure et se projeter au-delà des 10 prochaines minutes.
Le CAC 40 est revenu mardi à la case départ, moyennant un repli de 1,43% qui renvoie l’indice phare sous les 3 180 points, après un deuxième test des 3 225 points en tout début de séance.
Les volumes échangés restaient désespérément insignifiants (à peine 2,5 milliards d’euros traités sur les 40 poids lourds du CAC) pour la deuxième séance consécutive. Beaucoup d’opérateurs se sont abstenu de prendre position dans la crainte que quelques questions épineuses restent en suspens.
Quelles que soient les solutions qui émergeront du sommet d’aujourd’hui, tout le monde ne semble pas promis aux même lendemains qui chantent ou qui déchantent !
Il suffit d’observer l’envolée météorique du DAX 30 qui avait atteint 1,5% mardi vers 14h, soit +6,5% en trois séances !
Voilà de quoi édifier ceux qui douteraient encore du fait que le point de vue allemand — rigueur budgétaire, contrôle total du Bundestag sur le FESF, euro extra-fort — triomphera lors du sommet de la « dernière chance pour l’Europe » (selon François Fillon).
▪ Comme nous le pressentions dès dimanche soir, la BCE ne devrait pas être impliquée dans le nouveau schéma du FESF, conformément aux voeux d’Angela Merkel. Cette dernière a évoqué une dépréciation de la dette grecque de l’ordre de 50% à 60%, ce qui devrait nécessiter pour le secteur bancaire de nouvelles recapitalisations, après un hypothétique « effort volontaire » pour tirer un trait sur leurs créances.
Les banques vont batailler ferme pour obtenir la possibilité de limiter les provisions et d’évaluer leur portefeuille au coup par coup. Cependant, Angela Merkel estime que l’opération coup de balai ne doit pas laisser le moindre grain de poussière dans les coins.
Les banques françaises ont accusé le coup, perdant entre 4% et 5% en fin de journée… et le CAC 40 y a laissé des plumes : jusqu’à -1,7% vers 17h.
Pas le DAX 30 : il terminait pratiquement à l’équilibre ! Cette surperformance radicale du marché allemand trahit le retour des spéculations sur l’éclatement de la Zone euro, un scénario à l’issue duquel les entreprises et l’Etat allemand seraient les seuls à rester debout.
Même si les dirigeants européens parviennent à se mettre d’accord sur la mise en oeuvre d’un FESF, le contrôle total que le Bundestag compte exercer sur son utilisation équivaut pratiquement à un droit de veto.
Les tensions risquent de s’exacerber dans la mesure où ce plan ne suffira pas à lui seul à régler les problèmes de dettes. L’Europe a encore beaucoup de chemin à faire pour restaurer sa situation financière et rebâtir les fondations nécessaires à la croissance.
Il suffit de d’évoquer la situation très compliquée à laquelle l’Italie se retrouve confrontée. Silvio Berlusconi est mis sous pression par Angela Merkel pour une réduction supplémentaire des déficits alors que le Parlement italien, et notamment la Ligue du Nord, pourrait s’y opposer.
Un compromis de circonstance semble avoir été trouvé in extremis mardi soir sur le principe d’une retraite repoussée à 67 ans, comme en Allemagne — mais outre-Rhin, tout dépend en réalité du nombre d’années de carrières, des travailleurs peuvent en effet cesser leur activité dès 60 ans. Quoi qu’il en soit, cette mesure suffira-t-elle à dissuader la spéculation de s’attaquer à la dette italienne ?
▪ Wall Street semblait en douter. Le dernier quart d’heure s’est une nouvelle fois avéré décisif avec une accélération à la baisse qui aggravait les scores de -0,5% supplémentaires.
Le Dow Jones rechutait ainsi de 1,75% au contact des 11 700, après avoir testé les 11 900 points à l’ouverture. Le S&P plonge de 2% et le Nasdaq efface l’intégralité de ses gains de la veille (-2,3% après 2,35% lundi).
Nous sommes plus que jamais confrontés au risque de voir l’Eurozone succomber aux démons de la division et des rancoeurs… mais aussi et surtout au concept très germanique d’une rigueur qui résout tous les problèmes de compétitivité et d’excès de dette. Pourtant, sans croissance, l’Europe va droit dans le mur… de la dette.