La Chronique Agora

Le principal problème de la politique

▪ Ce matin, avant notre départ pour New York, nous avons vu une vingtaine de gros camions garés autour de la place sur laquelle donnent nos bureaux à Baltimore. Des équipes vêtues de noir déchargeaient des caisses, des câbles, des échafaudages… bloquant les trottoirs avec toutes sortes d’équipements.

"Que se passe-t-il ?" avons-nous demandé au bureau.

"Ils filment un épisode de la série House of Cards. C’est censé se passer à Washington — mais le quartier ressemble à Washington, et c’est bien plus simple et moins cher de tourner ici".

Les principaux personnages de la série — des politiciens, des journalistes, des "fixeurs" et des apparatchiks du Capitole — sont sans scrupules, sans pitié, opportunistes, meurtriers et vicieux. Nous avons arrêté de regarder — ça ressemblait trop à la vraie vie. Sauf que dans la vraie vie, la plupart des personnages ne sont de loin pas aussi rusés, hardis ou attirants.

Lorsque nous avions 10 ans, notre institutrice avait dit à notre classe que nous pouvions tous devenir président lorsque nous serions grands. Nous avions jeté un oeil autour de la pièce, surpris. Maintenant que nous voyons qui finit par se faire élire, nous pensons qu’elle avait raison.

Aucun défaut de caractère, aussi grave soit-il, ne barre l’accès au Parlement ou au Sénat

▪ Le défaut inhérent de la politique
Aucun handicap — moral ou intellectuel — n’est si insurmontable qu’il empêche d’être élu. Aucun défaut de caractère, aussi grave soit-il, ne barre l’accès au Parlement ou au Sénat. Aucun manque de charme, d’intelligence ou d’humour n’empêche une carrière brillante dans la politique. On a fait la remarque, au sujet du vice-président Hubert Humphry, que la seule chose qui se tenait entre lui et la présidence était un battement de coeur. Mais un coeur qui bat est aussi la seule véritable exigence pour devenir président.

Bien sûr, c’est aussi le seul critère pour voter.

Benêt ou escroc, tout le monde a droit au suffrage. Dans une démocratie fonctionnant correctement, les gens qui ont un intérêt personnel en jeu se désistent : il y a conflit d’intérêt — un conflit entre ce qui est bon pour eux et ce qui est bon pour tous les autres. Cela s’applique encore aux groupes civilisés, qu’il s’agisse de conseils d’entreprises ou de conseils de fabrique.

Les gens qui ont un cheval dans la course "déclarent leur intérêt" et vont attendre dehors jusqu’à ce que le vote soit terminé. Mais dans la politique moderne, tout le monde peut voter. Et devinez quoi ? Tout le monde vote en fonction de ses propres intérêts.

Que peut-on attendre d’une telle forme de gouvernement ? Tout le monde fait semblant d’agir pour le bien du pays — les politiciens comme les électeurs — et tout le monde s’intéresse surtout à son nombril.

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