La politique budgétaire laxiste d’Emmanuel Macron commence à faire naître des craintes encore discrètes mais profondes. Un premier signal vient d’être envoyé…
Dans l’avis qu’il a rendu sur le projet de loi de finances pour 2021, le Haut conseil des finances publiques, présidé par Pierre Moscovici (pourtant nommé par Emmanuel Macron), a lancé une diplomatique mais claire mise en garde au gouvernement sur le recours excessif à l’endettement public.
Voici un premier signal envoyé sur les craintes que la politique budgétaire laxiste du président à l’approche des élections de 2022 suscite au sein même de la nomenklatura française. Les mois qui viennent devraient alimenter ces peurs.
Selon la procédure budgétaire modifiée en 2012, le dépôt du projet de loi de finances sur le bureau de l’Assemblée nationale est désormais précédé d’un avis rendu par un comité Théodule, présidé par le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, dénommé le Haut conseil des finances publiques.
On a oublié un peu rapidement que la présidence de François Hollande s’est illustrée par cette étonnante comitologie faite de hauts conseils dont la prolifération a rajouté une couche de paralysie et d’indécision dans des institutions qui n’en manquaient déjà pas.
Les avis du Haut conseil aux finances publiques ont quelque chose de compassé et de terriblement technocratique qui en rendent la lecture fastidieuse. C’est entre les lignes qu’il faut chercher leur vérité et leur fraîcheur. Et rarement les opinions désagréables y sont dévoilées avec sincérité.
L’avis du 23 septembre 2020 sur le projet de budget 2021 est particulièrement remarquable parce qu’il a fait preuve d’une étonnante franchise grâce à laquelle nous mesurons l’angoisse qui peu à peu s’empare de nos élites.
Le Haut conseil aux finances publiques en état d’alerte
Donc, dans son avis publié au Journal Officiel, comme il se doit, Pierre Moscovici a signé au nom du Haut conseil un texte détonnant dont on retiendra la formulation suivante :
« Dans un contexte de croissance potentielle affaiblie rendant plus difficile la réduction du déficit, la soutenabilité à moyen terme des finances publiques constitue un enjeu central de la stratégie financière de la France et appelle la plus grande vigilance. »
La phrase résume avec verdeur une situation que nous soulignons depuis plusieurs semaines, dans un contexte où l’attention de l’opinion est happée par l’épidémie de coronavirus et peine à s’intéresser à d’autres sujets.
Pour le Haut conseil, la dépression économique que nous traversons exerce une pression sur les finances publiques (ce qui est un constat factuel) et rend à peu près inévitable l’accroissement des déficits. Dans le cas de la France, cette dégradation des comptes publics met en cause la « soutenabilité » de la dette dans les trois ou quatre ans à venir, compte tenu des dettes accumulées tout au long des années 2010.
Que Pierre Moscovici, nommé par Emmanuel Macron dans des conditions de complaisance encore opaques à ce stade, appelle le gouvernement et même la nation à la « plus grande vigilance » sur cette question montre bien la gravité d’une situation qui semble laisser le gouvernement indifférent.
Il faut entendre ici le signal envoyé par les plus hautes autorités financières de ce pays, expression d’une inquiétude face à un drame collectif dont la chronique est entamée depuis plusieurs mois, et même depuis plusieurs années.
Attention aux chocs sociétaux qui couvent
La suite de la chronique est à peu près évidente pour tout le monde, sauf bien entendu pour ceux qui se mettent la tête dans le sable pour n’avoir pas à décider de réformes impopulaires.
Nos partenaires européens ne toléreront pas éternellement que nous laissions le « trou de la Sécu » se creuser de plusieurs dizaines de milliards tout en leur demandant l’aumône. Des mesures désagréables comme l’allongement des carrières sont inévitables.
Les déficits structurels feront tôt ou tard l’objet d’attaques spéculatives qui obligeront à sortir du rêve éveillé que le président Macron a lancé en expliquant que le financement de la crise se ferait sans limite et sans augmentation d’impôt.
Autrement dit, il faudra rapidement décevoir l’opinion en la ramenant à la réalité, sans quoi les marchés s’en chargeront. Compte tenu des nombreuses maladresses auxquelles nous assistons durant ce quinquennat, on peut penser que le remède de cheval ne passera pas sans que l’animal ne se cabre violemment.
Attention, donc, aux troubles que ces revirements brutaux pourraient susciter.
Premières pressions sur le patrimoine
Dans ce contexte anxiogène, il faut impérativement noter que les mesures désagréables se préparent. Bruno Le Maire vient d’annoncer le lancement d’un nouveau produit d’épargne au ticket de base de 5 000 € à investir dans les PME.
A cette occasion, il a eu cette phrase qui sonne comme une prémonition : « Je ne taxerai pas l’épargne des Français. » Oups ! Quand un ministre de l’Economie prend soin d’apporter une précision de ce genre, on en déduit qu’il a au moins pensé une fois à son contraire…
La voie est tracée pour la suite des événements.