La Chronique Agora

Pourquoi la Colombie ?

La livre sterling est sur une rampe de lancement. Profitez-en

Bonjour,

 ▪ « Une question », me demanda l’homme, « pourquoi la Colombie ? Que faites-vous ici ? »

La question était assez innocente, voire directe. Cela se passait la nuit dernière, dans un quartier chic de Bogota. Nous étions assis à la Casa Vieja, Chris Mayer, Bruce Robertson, Dave Gonigam et moi. Nous étions les hôtes cette semaine du président d’Interbolsa, la plus importante maison de courtage de Colombie.

« Nous pensons que le marché est inutilement calomnié par des peurs persistantes en rapport à la guerre contre la drogue », avons-nous répondu, « et est par conséquent moins cher que ce que le marché rapportera lorsque la véritable histoire colombienne sera connue. Nous nous attendons à de grandes opportunités ici ».

 

Avec un P/E classé en dix-huitième position… nous ne qualifierons pas exactement la Colombie de bon marché. Assis à notre table, se trouvait un homme qui gagne sa vie en gérant un fonds au Cambodge et qui venait de rentrer de deux tournées d’investissement en Haïti et à Cuba. Ces endroits sont sans aucun doute meilleur marché et possèdent des opportunités plus attrayantes que tout ce que nous trouverions ici.

Malgré cela nous pensons, comme avec notre projet au Nicaragua, qu’il existe une opportunité exceptionnelle ici. Et c’est juste dans notre savoir-faire.

« Les problèmes de sécurité appartiennent au passé », nous a assuré notre hôte. « L’avenir de la Colombie est la nourriture et l’énergie — deux éléments dont le monde aura toujours besoin ». Notre but est de le trouver.

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La Fed ne peut pas mettre l’économie en cure de désintoxication

Bill Bonner

 

▪ « Les coûts de l’emprunt grimpent en flèche à la périphérie de l’Eurozone », titrait le Financial Times la semaine dernière.

Rappelez-vous que le Japon, l’Europe et les Etats-Unis dépendent tous des taux d’intérêt bas. Ils sont tous accros à l’argent facile. Otez les stimulants et leurs économies s’affaissent.

Les rendements à 10 ans sur la dette grecque ont dépassé les 12%. Le gouvernement portugais a payé 6% pour son dernier financement à deux ans. Un trader en dette portugaise :

« Nous n’en sommes pas encore à des niveaux de renflouage, mais on s’en approche ».

Pourquoi ne pas simplement laisser les taux grimper aux niveaux du marché… et forcer tout le monde à se désintoxiquer de la dette ?

Non, non, non… vous ne comprenez pas, cher lecteur. Dans la mesure où un ralentissement est exactement ce que les stimulants budgétaires étaient censés éviter, les gouvernements hésitent beaucoup à les abandonner. Ils préfèrent renflouer, étayer et secourir toutes les banques et Etats qui menacent de partir en cure de désintoxication.

Mais comme nous le constatons dans les quartiers chauds de Baltimore, les junkies ont besoin de doses de plus en plus conséquentes pour rester en forme. On couvre une mauvaise dette en y ajoutant une autre. Et on se retrouve avec deux mauvaises créances. En Europe, au Japon et aux Etats-Unis, la mauvaise dette détenue par les banques a été, dans les faits, reprise par le secteur public. A présent, la dette gouvernementale tourne mal elle aussi.

▪ En attendant, au Japon, on constate ce que le programme financier à la méthadone mis en place pendant deux décennies par le gouvernement a entraîné.

Bloomberg nous en dit plus :

« L’économie japonaise s’est contractée plus que ce qu’avait initialement estimé le gouvernement au quatrième trimestre à cause d’une révision à la baisse des investissements et des dépenses de consommation ».

« Le produit intérieur brut a diminué au taux annualisé de 1,3% au cours du trimestre prenant fin le 31 décembre, un chiffre supérieur à la contraction de 1,1% rapportée le mois dernier […]. La prévision médiane des 26 économistes interrogés par Bloomberg News se situait à une contraction de 1,2% ».

« La consommation a chuté de 0,8%, ce qui a fait baisser le PIB au quatrième trimestre après que le gouvernement a mis fin à un programme de subventions pour les voitures basse consommation et réduit les avantages d’achat d’appareil électroniques en décembre, un programme qui prendra fin en mars. Les dépenses d’investissement ont grimpé de 0,5%, à comparer avec l’estimation initiale d’une augmentation de 0,9% ».

Quand on les prive de leur drogue, les junkies ralentissent.

Aux Etats-Unis, les républicains ont proposé de supprimer une petite partie du déficit. Les démocrates ont proposé d’en supprimer moins. Le Sénat a rejeté les deux offres.

La Fed n’a pas l’intention de supprimer quoi que ce soit. On entend parler d’une « sortie » des programmes d’assouplissement quantitatif/taux zéro. Mais c’est un bluff sans fondement, selon nous. Ils n’abandonneront pas leur came avant d’y être forcés.

L’économie est trop faible. Les ménages sont trop fragiles. Et la reprise est bidon.

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Petit séisme psychologique suivi d’une forte secousse tellurique

Philippe Béchade

 

▪ La semaine qui s’est achevée le 11 mars aurait dû être marquée essentiellement par l’inflexion baissière des indices boursiers sur l’ensemble de la planète. Cela alors que Wall Street célébrait le deuxième anniversaire du marché haussier amorcé le 9 mars 2009 sur fond de flambée du pétrole et de chiffres économiques étonnamment médiocres.

La cassure des supports graphiques à Wall Street ou des indices boursiers de la Zone euro a été éclipsée par un séisme d’une violence historique. Il s’agit du plus puissant jamais enregistré au Japon ; il a frappé le nord-est de l’île principale, région qui constitue l’un des poumons économique du pays.

Il est difficile d’estimer l’impact que cet événement hors norme aura sur l’économie nippone. Cependant, il n’est pas interdit de penser que des répercussions sont à prévoir dans l’ensemble de la zone Asie.

La catastrophe va se solder par un coût se chiffrant en milliards et probablement même en dizaines de milliards de dollars pour l’Etat et les assureurs. Le Premier ministre, Naoto Kan, a déjà affirmé que les liquidités nécessaires seraient mises à la disposition des marchés et de l’économie nippone.

▪ Face à l’ampleur du drame, il est heureux que les places boursières aient réussi à conserver leur sang-froid. La Bourse de Paris a reculé de 0,9% dans des volumes qui ne traduisent pas de dégagement massifs.

Les mauvaises nouvelles économiques, déjà connues avant le séisme, suffisaient à elles seules à justifier un net recul des places occidentales.
C’est la poursuite du mouvement de baisse amorcé le 4 mars dernier ; le bilan de la semaine ressort négatif de 2,3% à Paris et de 2,2% sur l’Euro-Stoxx 50.
A Francfort, le repli atteint 1,15% ; le DAX enfonce le seuil psychologique et technique des 7 000 points. Milan a perdu 1%, Madrid a limité la casse avec un score de -0,36%.

Au lendemain d’une chute collective de 1,9%, les indices américains ont fait mieux que résister après une entame de séance légèrement négative. Le Dow a grappillé 0,25% pour retracer les 12 000 points ; le S&P a repris 0,45%, repassant juste au-dessus du seuil des 1 300 points.

Compte tenu de la teneur très particulière de l’actualité du jour, les opérateurs ne se sont pas focalisés outre mesure sur les ventes au détail publiées à 14h30 aux Etats-Unis : elles ont progressé comme prévu de 1% en février. Ce fut tout de même le seul rayon de lumière à éclairer un ciel conjoncturel bien sombre (remontée du chômage, creusement des déficits, flambée des carburants qui plombe le pouvoir d’achat des ménages).

▪ De toute façon, les investisseurs ne se préoccupent plus seulement des Etats-Unis. L’inflation en Chine n’a en effet pas diminué en févier, selon les chiffres dévoilés la semaine dernière par le bureau national de statistiques.

A 4,9% (après une révision du mode de calcul tendant à la minorer), elle demeure à un niveau fort inquiétant. Cela augure d’un prochain durcissement monétaire, une perspective pas franchement rassurante pour la croissance économique mondiale.

▪ Les nouvelles ne sont guère meilleures en Europe. La crise des dettes souveraines s’y pose avec une acuité nouvelle, les difficultés de financement des PIGS s’intensifiant.

Les dirigeants européens réunis à Bruxelles vendredi sont encore loin d’un compromis — et à plus forte raison d’un accord permettant d’y remédier de manière définitive. Les dissensions sont une nouvelle fois au rendez-vous, sur fond de calcul politique à visée interne d’Angela Merkel.

Malgré l’annonce de nouvelles mesures d’austérité, les taux ont continué de se tendre au Portugal (7,7% sur le 10 ans) et en Grèce (12,8%). Ces deux pays sont déjà en récession ; tout nouveau sacrifice budgétaire et social obère l’espoir d’un redressement de l’activité et des finances publiques.

Seule éclaircie au tableau, les cours du pétrole tendaient à s’assagir, avec un baril de WTI américain qui rechutait de 1,75% vers 101 $, après avoir enfoncé en matinée la barre symbolique des 100 $. Il s’agit surtout de la traduction de sérieux doutes concernant la croissance, sur fond de hausse des taux alors que l’approvisionnement sur le marché physique reste tendu.

La situation demeure très incertaine et incontrôlable en Libye (Européens et Américains hésitent à intervenir pour protéger les insurgés). La production d’or noir est très perturbée, et la menace d’une extension des troubles en Arabie Saoudite persiste.

▪ Côté valeurs, à Paris, la semaine s’achève sur un lourd repli hebdomadaire de Scor SE (-9,6%) qui pâtit lourdement du séisme japonais et essuyait ce vendredi un repli de 5,2% à 19,25 euros. Dans le même secteur, CNP chutait de 3,3% et AXA de 2,1%.

Mauvaise semaine également pour l’ensemble du compartiment pétrolier avec -7,8% sur CGG Veritas, -5,75% sur Maurel et Prom, -3,8% sur Total, -3,3% sur Technip qui chutait également de -2,4% vendredi. La chute du dollar vers 1,40 (1,3875/euro à la veille du week-end) est passée par là !

Toute cette troisième semaine de mars sera placée sous le signe de la catastrophe tellurique et économique qui frappe le Japon. Le coût estimé s’avère déjà supérieur au tremblement de terre qui avait dévasté la ville de Kobe (120 milliards de dollars en dollar constant).

S’y rajoute le risque radioactif, avec l’explosion ce lundi matin d’un second bâtiment abritant un réacteur. Cela démontre que les procédures de refroidissement restent gravement défaillantes, tous les systèmes de secours demeurant inopérants.

Leur conception devra être intégralement revue, des modifications coûtant des milliards de dollars vont être apportées, aggravant encore le déficit nippon.

De façon plus immédiate, l’arrêt d’une demi-douzaine de centrales dans des zones à risque prive déjà le Japon — où il continue de faire très froid — de 20% à 25% de sa capacité énergétique. Cela va entraîner une chute significative de la production industrielle du pays pendant des semaines.

▪ La réaction de la Bourse japonaise est à l’échelle du drame et du deuil qui frappe le pays : le Nikkei a rouvert sur un gap de -2,5% avant de chuter de 5% en quelques minutes. Il a ensuite amplifié ses pertes en deuxième partie de séance pour afficher -6,2% au final. C’est sa plus lourde chute depuis décembre 2008.

Le plongeon de la Bourse de Tokyo atteint 10% en une semaine, ramenant les cours six mois en arrière, à 9 620 points.

Il se pourrait que le ralentissement économique dans l’Archipel finisse par affecter ses principaux partenaires économiques, dont le premier d’entre eux, la Chine.

Nul stratège n’envisage pour l’heure une réaction en chaîne (c’est pourtant de circonstance) boursière… Pourtant, le Japon pourrait bien se retrouver contraint de liquider des actifs détenus à l’étranger (Wall Street ou la City londonienne) pour retrouver des marges de manoeuvre budgétaires alors que les besoins en capitaux s’annoncent déjà comme les plus considérables depuis la Deuxième Guerre mondiale.

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La livre sterling est sur une rampe de lancement. Profitez-en

Jérôme Revillier

▪ Objectif atteint sur l’euro !
J’écrivais à mes lecteurs en début de semaine dernière : « vendez l’euro pour viser un premier retour sur 1,3750 $. » C’est chose faite. L’euro est venu flirter avec cet objectif.

Nous entrons dans une zone à risque. Désormais, à moins que vous n’appliquiez une méthode systématique et donc par nature indifférente aux conditions macro-économiques, je vous recommande de vous écarter de la paire phare du Forex. Au moins momentanément. Elle devrait entrer dans une phase d’hésitation assez importante.

▪ Le billet vert a la peau dure
Comme souvent, alors qu’on annonce sa mise à mort, son déclin, sa fin… le billet vert refait parler de lui comme pour signifier que malgré tout, c’est lui le patron ! Le Dollar Index semble amorcer un rebond depuis ses récents plus bas annuels.

En embuscade, une devise pourrait rapidement se renforcer sous l’effet des tensions inflationnistes : la livre sterling.

▪ Inflation à 4,5% ou plus
La Banque d’Angleterre se retrouve prise au piège face à une inflation qui pourrait atteindre 4,5% le mois prochain. Les tensions sont de plus en plus fortes. Munie d’un mandat rigide, la Banque centrale n’aura sans doute pas le choix, et pourrait dès la prochaine réunion monétaire remonter le taux à 0,75, puis 1% assez rapidement.

L’inflation déjà à 4% le mois dernier sera annoncée le 22 mars. D’ici là, se positionner pour jouer le rebond semble être une très bonne opportunité.

▪ Une inflation « miroir de la récession »
L’inflation peut être de différentes natures. L’inflation anglaise illustre bien les problèmes auxquels sont confrontés les Etats. Dans le dernier rapport, nous pouvions lire que les pressions inflationnistes étaient dues au carburant, à la restauration et aux services qui ont dû « supporter la hausse sévère de la TVA ».

A l’inverse, les prix baissent dans le domaine des loisirs, de la culture et des secteurs comme le textile, illustrant la lutte acharnée sur les prix, pour maintenir une consommation en berne. Hausse des prix des biens nécessaires et chute de la consommation dans les domaines de second rang ne peuvent permettre une croissance solide et durable.

D’ailleurs, si on parle souvent du CPI (indice des prix à la consommation), je vous invite à regarder le Retail Price Index (RPI) qui reflète la hausse des prix pour un « panier de biens de consommation courante », bien plus proche de la consommation courante des citoyens.

Cet indice a grimpé de 5%… de quoi freiner les ardeurs de consommation de nos amis anglais !

▪ Profitez des replis et attendez le décollage !
Une fois n’est pas coutume, ce n’est pas sur une cassure que je vais vous recommander d’entrer mais sur repli. Nous allons chercher à profiter d’un rebond purement spéculatif et violent dû à l’annonce de l’inflation en Angleterre. Les marchés anticipant toujours tout, nous allons tout simplement acheter la rumeur et vendre la nouvelle.

Profitez de la baisse actuelle de la livre contre le dollar, pour entrer par paliers sur la paire : je vous recommande donc d’acheter le repli actuel dans la zone de croisement des moyennes mobiles à 100 et à 200 jours. Faites un premier achat vers 1,5910, puis vers 1,5840. Nous positionnerons le stop loss vers 1,5540.

La livre devrait commencer à rebondir dès l’approche de l’annonce de l’inflation en fin de semaine. Notre objectif théorique sera à 1,65 mais ne soyez pas trop gourmand ! Dès l’effet d’annonce passée, la réalité économique pourrait reprendre le dessus… et la nervosité aussi.

[Jérôme Revillier est issu de l’industrie spatiale européenne. Passionné de finance, autodidacte, il a passé plusieurs années à chercher un marché de référence, pour finalement se spécialiser sur le Forex. Cette autoformation financière et son expérience technique lui permet de trouver toujours des opportunités originales et parfois à contre-courant de la pensée de la sphère financière. Quelques traders privilégiés suivent ses recommandations quotidiennes dans le cadre du service FxProfitTrader].

Première parution dans l’Edito Matières Premières et Devises le 11/03/2011.

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(©) Les Publications Agora France, 2002-2011

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