La Chronique Agora

Pétrole : Surcroît de capacité, quel surcroît de capacité ?

▪ La semaine dernière, le pétrole a atteint son plus haut niveau depuis un mois. L’utilisation des réserves stratégiques, ça fonctionne du tonnerre, hein ?

Le fait que le pétrole pourrait bien atteindre les 150 $ d’ici le printemps prochain a même fait la couverture de Barron’s ! Ils ont cité quelques données sur le « surcroît de capacité » — ou plutôt le manque de capacité…

Le « surcroît de capacité », il est bon de le rappeler, c’est la possibilité pour les producteurs de pétrole de faire démarrer d’urgence de nouvelles productions pétrolières sous 30 jours, et de les maintenir pendant 90 jours au moins.

Selon Morgan Stanley, le « surcroît de capacité » sera épuisé d’ici deux ans… si l’on se base sur des chiffres datant d’avant la guerre en Libye, qui a empêché la production d’1,5 million de barils par jour.

▪ Le fait bien réel que le surcroît de capacité se réduit comme peau de chagrin est de plus en plus évident chaque jour. Voyez un peu…

L’AIE prévient qu’à moins que l’OPEP ne parvienne à augmenter la production d’1,5 million de barils par jour — soit environ autant que le manque de production en Libye –, la demande de pétrole mondiale commencera à dépasser l’offre disponible entre aujourd’hui et la fin de l’année.

Ainsi, selon Jeff Rubin, ancien économiste en chef de CIBC World Markets : « s’il n’y a pas suffisamment d’offre pour fournir les 89 millions de barils de pétrole que l’économie mondiale est censée brûler chaque jour, le prix du pétrole dans le monde ne pourra aller que dans une seule direction ».

« Nous ne voyons pas de fin évidente au conflit en Libye », poursuit M. Rubin, « et avec la violence sectaire contre les champs de pétrole et les raffineries, qui augmente soudain en Irak en prévision du retrait des troupes américaines, l’avenir ne semble pas sourire à une potentielle augmentation de la production par l’OPEP ».

▪ C’est encore plus évident lorsque l’on s’intéresse au plus grand producteur de la région, l’Arabie Saoudite : elle n’a guère plus à offrir au mix énergétique mondial que du pétrole lourd et acide dont plus personne ne veut.

Ce n’est pas comme si les cheiks saoudiens ne faisaient pas d’efforts. La production dans le royaume a augmenté de presque 4% le mois dernier, pour atteindre 9,7 millions de barils par jour.

Le problème, c’est que la moitié seulement de cette augmentation est parvenue sur le marché international. Le reste est conservé dans le pays pour approvisionner les raffineries saoudiennes et permettre de faire fonctionner la « production énergétique et les usines de désalinisation pendant la haute saison estivale », selon un rapport de l’AIE paru hier.

Deux autres facteurs qui font bondir la demande de pétrole : les coupures de courant en Chine et au Japon. En raison de la sécheresse en Chine, les centrales hydroélectriques ne peuvent plus générer autant de courant. Les générateurs diesel doivent donc compenser.

Et c’est aussi le diesel qui prend le relais au Japon, suite au désastre de Fukushima. Les deux tiers de la capacité nucléaire du pays sont maintenant hors-service… et ils ne sont pas près d’être remis en marche.

Le pétrole devrait donc rester profitable pendant quelque temps encore — même si ce qui semble être une « reprise » aux Etats-Unis finit par accoucher d’une souris.

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