La Chronique Agora

Où va le pétrole brut ?

▪ Le pétrole brut continue sa glissade historique. Il tourne désormais autour des 30 $ le baril — soit une chute de 71% par rapport aux 107 $ atteints lors du sommet du marché pétrolier, il y a environ 18 mois.

Il y a une telle abondance d’or noir que les cuves de stockage débordent. Les navires pétroliers enregistrent des recettes quotidiennes proches de leurs records, étant utilisés pour le stockage aussi bien que pour le transport.

Si les détenteurs de stocks se voient forcés de vendre leur pétrole, comme le prédisent certains analystes, les prix pourraient atteindre les 10 $ le baril avant la fin de ce marché baissier.

Les stocks se videront alors, et le manque d’investissement actuel dans de la nouvelle production refera grimper les prix.

Comme le souligne notre spécialiste Nick Rokke, les prix du marché ne se contentent pas de revenir à la moyenne — surtout dans le secteur des matières premières. Ils rejoignent la moyenne… puis ils continuent leur chemin. Un extrême mène à un autre extrême égal et opposé.

▪ Personne ne sait rien
Selon nous, cette chute vertigineuse du prix du pétrole est l’une des nombreuses conséquences imprévues de la politique de la Fed.

Il y a d’autres facteurs en jeu, bien entendu. Mais en encourageant les producteurs pétroliers américains à emprunter à des taux ultra-bas, la Fed a exagéré le cycle boom-krach habituel des marchés de matières premières. Le crédit facile a permis de surinvestir dans la production… ce qui a ensuite permis de sur-produire… ce qui a causé l’effondrement des prix.

D’autres ont une explication différente. Ils pensent que ce prix bas illustre la sottise de l’hypothèse du Peak Oil.

Ils ne croient pas aux limites qui font naturellement grimper les prix…

Ils sont d’avis qu’un pétrole à 30 $ prouve le génie prométhéen de l’humanité

Ils sont d’avis qu’un pétrole à 30 $ prouve le génie prométhéen de l’humanité — qui est toujours capable de trouver de nouvelles sources d’énergie… toujours capable de dépasser les limites (même les dieux ne peuvent pas nous arrêter)… et toujours capable de surmonter les problèmes que nous nous créons à nous-mêmes.

Qui a raison ?

Comme l’a dit le scénariste William Goldman lorsqu’il s’agit d’identifier les gagnants et les perdants à Hollywood :

"Personne ne sait rien. Pas une seule personne, dans toute l’industrie du cinéma, ne sait avec certitude ce qui va marcher. A chaque fois, c’est une supposition et, si vous avez de la chance, une supposition éclairée".

Personne ne sait rien dans le monde financier non plus…

Les jeunes savent ce qui se passe. Les anciens savent qu’ils l’ignorent

C’est du moins ce que disent les vétérans. Les jeunes savent ce qui se passe. Les anciens savent qu’ils l’ignorent.

Même le prodige de l’économie Larry Summers — un homme qui a toujours réponse à tout — le dit lui-même :

"Le journal The Economist rapporte qu’en examinant tous les principaux pays au cours des décennies précédentes, on trouve 220 exemples où une année de croissance positive a été suivie d’une année de contraction. Pas une seule fois les prévisions du Fonds monétaire international n’ont anticipé la récession au mois d’avril de l’année de croissance".

▪ "Vendez tout"
L’éditorialiste de Bloomberg Barry Ritholz nous a récemment rappelé un prévisionniste boursier bien connu qui s’est trompé de manière spectaculaire : Joe Granville.

Joe est célèbre pour avoir prévu le sommet boursier de 1981. Ceux qui le suivaient ont reçu l’alerte suivante par téléphone ou sur leur répondeur téléphonique :

"Vendez tout. Le sommet boursier a été atteint. Positionnez-vous à découvert sur les valeurs ayant enregistré les plus fortes hausses depuis avril".

Ses abonnés l’ont écouté. Le Dow a perdu 6% sur des volumes record suite à l’appel de Granville, faisant disparaître des centaines de milliards de dollars de richesse d’investisseurs.

Mais quelques années plus tard, la majeure partie de ces abonnés se mordaient les doigts… et voulaient probablement mordre Joe aussi.

Nous verrons pourquoi demain…

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