La Chronique Agora

Petit cours de relaxation pour investisseur stressé

** Plutôt que de nous laisser emporter et vous faire un compte-rendu haletant des derniers événements qui secouent la planète finance, nous allons prendre une grande respiration. Inspirer. Expirer. Essayez vous aussi. Inspirez… expirez… inspirez… expirez.

– Saviez-vous qu’en prenant trois profondes respirations, vous atténuez les symptômes physiologiques de la panique ? Nous ne savons pas précisément comment ça fonctionne. Cela a quelque chose à voir avec le rythme de vos battements de cœur et la quantité d’oxygène dans le sang. Mais c’est une astuce très utile. N’oubliez pas de respirer.

– Voilà. Où en sommes-nous ? Qui est tombé pour la dernière fois ? Qui s’en relèvera ? Et où devriez-vous vous placer pour éviter les flammes et tirer avantage des opportunités quand la fumée se dissipera ?

– Ce n’est plus la peine de crier "au secours !" Lehman est probablement déjà mort. La société s’est rendue au tribunal pour chercher protection contre la faillite. Cela lui donnera seulement un peu plus de temps pour trouver des acheteurs pour ses meilleurs actifs. Elle possède 53 milliards de dollars en immobilier commercial et résidentiel. Il va être difficile de s’en débarrasser. Il va falloir amputer.

– AIG, le plus grand assureur US, a chuté de près de 50% sur la séance américaine de lundi. L’entreprise cherche une ligne de crédit salvatrice de 40 milliards de dollars. Selon les agences de notation (des parangons de la vertu financière, c’est bien connu), si AIG n’obtient pas de nouveaux capitaux, elle sera déclassée. Les lignes de crédit, en tout cas, ont été coupées.

– A travers le brouillard de la guerre financière, on peut toutefois apercevoir quelques rayons de soleil qui annoncent que tout ce qui se passe est nécessaire et douloureux, mais bénéfique. En fait, les valeurs financières couvent leurs pertes depuis un an, dans l’espoir d’une évasion magique. Ce poids mort et cette incertitude dans le système ont été très mauvais pour les actions.

– Cependant, maintenant, les financiers n’ont nulle part où aller. Privés de capitaux, poursuivis par les vendeurs à découvert, et le regard tourné vers le ciel dans l’espoir d’un sauvetage aérien organisé par "Helicopter Ben" et "Hank le Bazooka", ils comprennent que la partie est finie. Ceux qui peuvent se débrouiller pour sauver leur peau (comme Merrill) l’ont déjà fait.

– Le reste ? Et bien, les marchés ne font pas de prisonniers.

** La situation des marchés des matières premières est plus encourageante pour ceux qui investissent dans les ressources naturelles. L’or est en hausse. Depuis que l’aversion au risque est de nouveau à la mode, il serait intéressant d’assister au concours entre les bons du Trésor US et les ETF aurifères.

– Qui sera le premier à occuper le terrain laissé par les valeurs financières ? Nos parierions sur l’or, étant donné que l’offre de métal jaune n’augmente pas aussi rapidement que l’offre de bons du Trésor US. Quantité de nouveaux billets vont peut-être sortir des presses de la Fed pour partir en guerre. Mais l’or n’est pas belliqueux, il est plus stable et beaucoup plus lourd que le papier.

– Qui plus est, selon Cameron Alexander de GFMS Limited, qui est intervenu lundi à Sydney lors de la conférence Excellence in Mining, la production d’or est au beau milieu de ce qu’il appelle un "déclin de long terme". Non seulement les coûts de production directs augmentent pour les producteurs d’or (une augmentation de 27% au premier semestre 2008, selon GFMS), mais la production aurifère subit un déclin général. Pourquoi ?

– Et bien, l’or n’est pas comme l’argent papier ou l’argent numérique. Vous ne pouvez pas le créer à partir de rien. Vous devez le trouver. Vous devez engager des gens pour l’extraire. Vous devez le raffiner.

– Les coûts (main d’œuvre, énergie, et infrastructure) augmentent… et pour certains producteurs, ils sont déjà plus élevés que le prix de l’or. Peu d’hommes d’affaires peuvent maintenir leur exploitation quand les coûts de production dépassent la valeur marchande de leur produit. Vous ne pouvez pas compenser par la quantité.

– Qu’en est-il de la demande en or ? Selon Alexander, la course de l’or vers les 1 000 $ a coulé la demande en joaillerie. Mais la récente chute à 700 $ laisse déjà voir des signes de réveil au niveau de la demande. C’est une opportunité d’achat bien trop intéressante pour qu’on la laisse filer.

** Alexander a également noté que la demande en or est principalement guidée par les fonds indiciels aurifères cotés en Bourse. L’or joue aussi le rôle de réserve monétaire. Les Etats-Unis affirment détenir 79% de leurs réserves officielles en or. La Banque centrale japonaise, par comparaison, ne détient que 2% de ses réserves en or, et la Chine seulement 1%.

– Pensez-vous que la Chine aimerait convertir en or une partie de ses 2 000 milliards de dollars de réserves de devises étrangères ? Ou bien la Chine, par le biais de ses nombreux intermédiaires d’état, préférerait-elle des actions de matières premières cotées à l’étranger, ce qui reviendrait donc à posséder des ressources stratégiques primordiales ? Pourquoi pas les deux ?

– "Les deux" semble être la réponse suggérée par Paul Glasson de KPMG, qui a vécu et travaillé en Chine pendant des années. Il aide les entreprises australiennes à collaborer avec des entreprises chinoises. Sa présentation de lundi était fascinante. Il a expliqué en détails comment les décisions d’investissement chinoises font leur chemin du Parti communiste de Pékin à la Bourse de Sydney.

– Nous parlons de la Chine et de l’or parce que nous pensons qu’ils joueront tous les deux un rôle important dans les mois à venir. Il est désormais clair que le modèle américain, consistant à générer des profits basés sur les actifs par le biais de l’effet de levier, des dettes, de la titrisation et du trading est en train de sombrer. Mais il y a encore beaucoup de ressources libellées en dollars qui peuvent être utilisées.

– Ceux qui ne veulent pas voir s’évaporer leur patrimoine basé sur le dollar vont chercher des moyens d’échanger leurs dollars contre d’autres capitaux. Nous sommes prêts à parier que les valeurs des matières premières — qui sont à des prix ridiculement bas — sont une des voies qu’ils vont emprunter.

– Bien entendu, nombre de personnes se contentent de se serrer dans le canot de sauvetage que représente le marché des bons du Trésor US. Cela nous semble être une erreur stratégique de premier ordre, comme d’envoyer votre armée à Stalingrad pour le week-end… pour vous rendre compte — mais un peu tard — qu’elle n’en reviendra plus. Ou de vous entasser avec d’autres dans un château médiéval juste avant un long siège.

– Croyez-le ou non, après quelques grandes respirations, après quelques semaines pendant lesquelles nous avons discuté avec de petites entreprises minières qui ont les pieds solidement plantés dans le sol de l’économie réelle, nous pensons qu’il existe aujourd’hui des opportunités fantastiques pour des investisseurs comme vous. Il faut seulement bien choisir vos batailles [NDLR : Pour dénicher ces opportunités et mener les bonnes batailles dans les mois difficiles qui nous attendent… suivez le guide !].

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