La récente chute de l’or intrigue. Elle montre que la confiance dans le dollar reste encore solide mais tout peut changer rapidement.
« Pourquoi l’or plonge à son plus bas niveau depuis un an ». titre Les Echos du jour, l’or se frayant même une place en Une, ce qui est très rare dans ce quotidien économique.
Au dernier fixing de Londres, l’or vaut 1 224,95 $ l’once. Remettons les choses en perspective.
Nous affectionnons l’or (et le bitcoin) parce que c’est une monnaie « anti-système ».
Le système monétaire actuel repose sur du crédit disponible en quantité illimitée à un taux d’intérêt forcé à la baisse. Il ne tient que parce que la plupart des gens pensent que les crédits seront remboursés, y compris par les générations futures dans le cas des emprunts d’Etat.
Au contraire, l’or est disponible en quantité limitée. Lorsque la confiance a disparu, lorsqu’on ne veut plus faire crédit, l’or sert de monnaie ultime. C’est à ce moment là qu’il redevient précieux. C’est pour cela que malgré toutes leurs folies, les banquiers centraux en conservent encore.
La baisse récente de l’or dont le cours est exprimé en dollar prouve que les gens ont toujours confiance dans le dollar. Les taux d’intérêt en dollar ont récemment remonté et même si l’inflation aux Etats-Unis n’est pas négligeable, le dollar s’est apprécié par rapport aux autres monnaies.
Ajoutons aussi une composante saisonnière. C’est le début de la saison des achats d’or en Asie or la baisse des monnaies des pays émergents qui renchérit le métal jaune freine les ardeurs.
Bref, malgré des taux d’intérêt réels (taux d’intérêt diminué du taux d’inflation) légèrement négatifs à court terme, le dollar est encore préféré à l’or. Le dernier chiffre d’inflation aux Etats-Unis est à 2,90 %. Un bon du Trésor à 1 an rapporte 2,42%, un bon du Trésor à 2 ans rapporte 2,64% et un bon du Trésor à 10 ans rapporte 2,96%. Donc, si vous avez une monnaie qui se déprécie par rapport au dollar, stocker votre argent en prenant un bon du Trésor à 10 ans vous rapporte 0,06% alors que l’or ne vous rapporte rien.
Revenons à la courbe d’évolution de l’or depuis 10 ans. Un paroxysme de méfiance concernant le système monétaire a été atteint en 2011. C’était à la fois la « crise de la dette en euro » et le moment où la Fed se livrait à une création monétaire sans vergogne depuis novembre 2010 (date du premier quantitative easing ou QE).
Finalement, l’incendie de la « crise de la dette en euro » a été noyé sous les liquidités de la BCE et les QE de la Fed n’ont semé de l’inflation que dans la sphère financière, gonflant les prix de tous les actifs financiers mais pas les salaires ni les prix.
La confiance a été partiellement restaurée. Partiellement, car l’or n’est cependant pas revenu à son niveau de pré-crise (environ 800 $ l’once) et encore mois à son niveau de pré-crise de 2008 (200 $ l’once).
Quand la confiance sera-t-elle à nouveau sapée ?
Pour que la méfiance revienne enflammer le cours de l’or il faudrait que :
- La Fed revienne sur son opération de resserrement monétaire et lâche à nouveau les taux (ce que souhaite Donald Trump)
- Les taux d’intérêt réels aux Etats-Unis deviennent très négatifs en raison d’une remontée de l’inflation
- Soudainement, les amateurs de dollar décident que les déficits américains deviennent insoutenables
Il y a là-dedans plus de psychologie que de technique.
Dans toutes les désastreuses expériences monétaires, l’inflation monétaire précède l’inflation des prix. Le passage de l’une à l’autre, la transmission, se fait lorsque les gens – au lieu de stocker la monnaie en surplus ou de « l’investir » dans des actifs dont les prix leur apparaissent tout-à-coup excessifs – décident de la dépenser. Alors, l’incendie de l’inflation des prix se propage rapidement.
Aujourd’hui, on peut seulement constater qu’en janvier 2016, un point bas des matières premières et de l’or a été touché. Depuis, la confiance n’est plus ce qu’elle était puisque l’or a remonté, malgré le resserrement monétaire de la Fed. Mais le prix de l’assurance anti-inflation qu’est l’or reste encore très raisonnable.
L’or comme le bitcoin sont disponibles en quantité limitée et ne dépendent pas de manipulations des banques centrales. Aujourd’hui, l’or est un des rares actifs dont le prix ne soit pas soufflé par la bulle de tout. Ceci suffit à le rendre attractif. L’or est redevenu un investissement contrarien, c’est-à-dire injustement délaissé.