La Chronique Agora

L’OPEP met à mal le pétrole des Etats-Unis

▪ M. le Marché a fait souffrir les haussiers de l’or, ces derniers temps. Mais lundi, il s’est attaqué aux vendeurs d’or : le métal jaune a grimpé de 42 $… proportionnellement à une hausse de plus de 600 points sur le Dow.

Notre sympathie, toutefois, va aujourd’hui aux bouseux, aux routiers et aux serveuses de Beeville, au Texas, et de Watford, dans le Dakota du nord. Ils étaient comme des coqs en pâte il y a quelques mois. Aujourd’hui, ils en bavent.

Le pétrole a tout de même baissé de près d’un tiers depuis son plus récent sommet. En dehors des champs de pétrole de schiste, cette chute est largement considérée comme une bonne nouvelle. Les consommateurs font le plein et il leur reste de la monnaie — de l’argent qui peut être utilisé pour acheter des choses. Selon les illusions actuelles et conventionnelles de la profession économique, ça mène à des emplois, de la croissance, de l’inflation et à un remède aux troubles de l’érection.

Mais, cher lecteur, y a-t-il jamais eu, dans l’histoire du monde, un "on en bave" qui se cantonne à un seul secteur ? C’est bien ça l’inconvénient du "bavage" : il bouge sans arrêt. Dans notre Chronique d’aujourd’hui, nous observons de plus près le sujet du bavage en général… et l’effet de la baisse du pétrole en particulier. Nous observons au passage que le secret du succès, dans l’investissement, c’est d’acheter ce qui en bave quand ça en bave le plus… et de vendre ce qui n’en bave pas.

Le prix de l’or noir est maintenu à la baisse par le cartel afin d’affaiblir ses concurrents nord-américains

▪ L’OPEP ne lâche pas prise
On a appris ce week-end que l’OPEP aggrave volontairement le bavage des producteurs de pétrole américains. Le prix de l’or noir est maintenu à la baisse par le cartel afin d’affaiblir ses concurrents nord-américains. Le fracking coûte plus cher que l’extraction simple. Le pétrole du Proche-Orient sort aussi facilement du sol que l’eau d’un puits creusé à la main. C’est pour cette raison que les Saoudiens sont les producteurs bon marché de la planète. Plus ils pompent, plus les prix baissent… et plus il est difficile de bien gagner sa vie dans le sud du Texas. Le pétrole du Proche-Orient est encore profitable même avec un baril à 67 $. Les producteurs américains, en revanche, risquent la faillite.

Tout de même, direz-vous, une énergie bon marché revigorera l’économie de consommation US — peu importe qui l’extrait. De toute façon, les profits vont généralement au même endroit, où qu’ils soient gagnés. Les Arabes, les Asiatiques, les Américains, les Européens — tous font la même chose avec leurs dollars : ils achètent plus d’actions et d’obligations américaines.

D’une manière ou d’une autre, les profits terminent sur les marchés de capitaux américains. Mais avec un pétrole moins cher, il y a moins de profits. Les consommateurs peuvent dépenser la différence ailleurs. Cela augmente la "demande", avec tous ses soi-disant pouvoirs magiques.

Bien entendu, une certaine quantité de ce que les consommateurs américains veulent acheter est fabriquée en dehors des Etats-Unis. Au cours du temps, une bonne partie de l’argent fuit à l’étranger… où il est, là aussi, utilisé pour acheter des actifs américains.

▪ Les autorités ont la main lourde
Attendez une minute. Les prix bas du pétrole mettent également à mal les investissements dans le secteur de l’énergie. Qui veut forer un nouveau puits quand les prix baissent ? Qui veut installer des panneaux solaires ? Qui veut acheter une nouvelle voiture hybride ?

Ensuite, une fois que les petits producteurs marginaux ont fait faillite… que les producteurs d’énergie alternative se sont rendormis… que les haussiers sont brisés et que les baissiers comptent leur argent… le piège ne sera-t-il pas tendu pour une explosion à la hausse ?

Manipuler les prix du pétrole a les mêmes conséquences fortuites — mais complètement prévisibles — que manipuler les taux d’intérêt

Manipuler les prix du pétrole a les mêmes conséquences fortuites — mais complètement prévisibles — que manipuler les taux d’intérêt. Les consommateurs ont l’avantage, temporairement. Mais les investissements baissent et la production décline.

Au lieu de laisser la main invisible guider l’économie vers une issue qui avantage tout le monde, la main lourde des autorités lui administre une bonne claque…

L’or en bave. Le pétrole en bave. La Russie en bave. La Grèce en bave. Nos vertèbres en bavent, après tous ces pieux à installer.

La douleur finira par disparaître. Mais il faudra peut-être en baver encore plus… avant d’en baver un peu moins.

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