La Chronique Agora

L’OPEP est incapable de remédier aux prix élevés du pétrole

OPEP pétrole

A chaque fois que le prix de l’or noir augmente ou baisse fortement, l’OPEP se réunit et prend des décisions sur la quantité de barils produits par ses membres. En pratique, toutefois, le coût du baril dépend de bien d’autres facteurs.

Les prix élevés du pétrole sont un symptôme de déséquilibres économiques et monétaires, et non une simple conséquence des décisions de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Historiquement, nous avons pu constater que les annonces par l’OPEP d’une réduction de ses quotas de production n’ont que faiblement soutenu les prix du pétrole face à la diversification des sources d’énergie et aux progrès technologiques qui sont venus renforcer l’efficience énergétique.

De la même manière, une augmentation de la production de l’OPEP n’implique pas nécessairement une baisse des prix, sans même parler de revenir à des prix raisonnables. L’augmentation de la production des pays membres de l’OPEP est un facteur favorable, mais néanmoins insuffisant pour résoudre le problème du niveau des prix, même s’ils le souhaitaient.

Un problème de sous-investissement

Les problèmes actuels sur le marché pétrolier découlent d’années de mauvaise allocation du capital et de sous-investissement massif dans le secteur énergétique engendrés par les politiques monétaires laxistes mises en œuvre par les gouvernements qui ont ainsi découragé l’investissement en capital dans les énergies fossiles pour des raisons idéologiques.

La combinaison d’un activisme malavisé et des pressions politiques en parallèle d’injections monétaires massives ont créé d’importants goulets d’étranglement et un problème de sous-investissement qui mettent en danger à la fois la sécurité de nos approvisionnements ainsi que la perspective d’une transition énergétique compétitive et techniquement réalisable.

Les injections massives de liquidités ont provoqué un double effet indésirable : une hausse des mauvais investissements dans les activités non productives et à présent un important afflux de capitaux dans les secteurs considérés comme sous-valorisés.

Autrement dit, davantage d’argent se dirige vers les actifs relativement rares. L’énergie, qui était globalement sous-pondérée par les investisseurs, est à présent surpondérée, exacerbant la hausse des prix. Le coût du baril a ainsi augmenté de près de 75% de janvier au sommet d’octobre 2021, alors que l’offre a augmenté au même rythme que la consommation de pétrole.

JPMorgan évalue les investissements en capital qui seront nécessaires dans le secteur énergétique pour répondre à la demande à 600 Mds$ sur la période 2021-2030. Ce « sous-investissement accumulé » ne constitue qu’une partie du problème.

La relance n’arrange pas les choses

Un autre problème important réside dans la demande artificiellement créée par les plans de relance qui se sont succédés. Le fait de lancer des projets pharaoniques d’infrastructure énergivores alors que l’économie est déjà en phase de réouverture et que certains goulets d’étranglement se sont aggravés produit le même effet sur les prix de l’énergie qu’une énorme bulle spéculative.

Les interventions politiques ont également eu un impact significatif sur les prix du baril de pétrole. Les menaces d’interdiction de l’exploitation des ressources énergétiques domestiques aux États-Unis ou les annonces d’interdiction à venir des investissements dans le secteur des combustibles fossiles, comme cela s’est produit lors de certains sommets européens, font augmenter, et non diminuer, la valeur du baril de pétrole à long terme.

Pourquoi ? Parce que ces menaces ne sont pas formulées à partir d’une analyse technique solide et d’estimations robustes de l’offre et de la demande, mais en fonction d’agendas politiques.

Tout ingénieur sérieux qui comprend l’importance de la sécurité de nos approvisionnements et du développement technologique sait qu’une transition énergétique réussie vers une économie plus verte nécessite de définir des politiques solides et des objectifs réalistes qui permettront d’éviter une crise énergétique. Mais tout cela a été oublié.

A quel point cela profite-t-il à l’OPEP ?

L’OPEP bénéficie du niveau élevé des prix du pétrole, mais pas autant qu’on pourrait le croire.

Le panier de référence de l’OPEP s’établit à 68,33 $ le baril sur les dix premiers mois de 2021, soit une augmentation de 68,4% par rapport à la même période l’année dernière, mais il reste largement inférieur aux niveaux atteints avant la crise financière de 2008.

En outre, la production combinée des pays membres de OPEP et de ceux extérieurs à l’OPEP a augmenté au même rythme que la consommation de pétrole. La production mondiale a augmenté au mois d’octobre de 1,74 million de barils par jour par rapport au mois précédent, pour atteindre une moyenne de 97,56 millions de barils par jour. Les prévisions de croissance de la production américaine pour 2021 ont été revues à la hausse de 19 000 barils par jour et elle devrait ainsi atteindre 17,57 millions de barils par jour.

Imaginez les niveaux qu’auraient atteint les prix du pétrole et du gaz si les menaces politiques de sanction ou d’interdiction de la production nationale avaient été mises à exécution.

N’oublions pas que l’OPEP a en parallèle revu à la baisse ses estimations de la demande mondiale de pétrole à 96,4 millions de barils par jour en 2021. L’offre reste abondante et l’administration américaine devrait également tenir compte du fait que la Russie et les Etats-Unis devraient être les principaux moteurs de la croissance de la production pétrolière l’année prochaine.

Sans la Russie et les États-Unis, les prix s’envoleraient, quoi que fassent les partenaires de l’OPEP ou l’Arabie saoudite.

En somme, nous souffrons de la combinaison de politiques énergétiques malavisées, d’une politique de création monétaire excessive et de plans inopportuns de construction d’infrastructures pharaoniques.

L’OPEP et son partenaire russe peuvent atténuer cette situation, mais pas la changer radicalement. En outre, à mesure que le temps passe et que la situation de sous-investissement s’aggrave, la capacité de l’OPEP à freiner la hausse des prix s’affaiblira.

Il ne faut pas oublier que l’OPEP et la Russie représentent moins de la moitié de la production pétrolière mondiale. Leurs décisions ont une importance certaine, mais mettre deux millions de barils supplémentaires par jour sur le marché ne résoudra pas le problème des prix à long terme.

Les prix de l’énergie déclineront à l’aide du progrès technologique, d’un accroissement des investissements ainsi que d’une diversification des sources d’énergie et non par le biais de menaces politiques vides.


Article traduit avec l’autorisation du Mises Institute. Original en anglais ici

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile