▪ La tragédie grecque me laisse pantois et confirme que la dette énorme (350 milliards d’euros) portée par ce petit pays devient chaque jour un risque comparable à la chute de Lehman Brothers. Si vous avez aimé la crise de la dette privée, vous allez adorer la crise de la dette souveraine.
Le risque est simple : si la Grèce fait défaut, l’effet domino sera catastrophique. Cela prouvera que l’Europe ne pourra pas défendre les autres pays périphériques comme l’Irlande, le Portugal et surtout l’Espagne dont le PIB est équivalent à ces trois pays. Autant dire que cela ne sent pas très bon…
▪ Les banques françaises vont souffrir de leurs créances grecques
En même temps, la pression est telle que la question n’est même plus de savoir si nous devons ou si nous allons sauver le soldat grec, mais comment. Nous n’avons pas le choix.
La crise apparaît difficilement soluble : les banques ont prêté depuis 10 ans à la Grèce des sommes considérables en appliquant la même note de risque que pour l’Allemagne. De ce fait, le système bancaire européen — et surtout français, qui détient plus de 10 milliards d’euros de dettes grecques — qui est lui-même encore convalescent, ne pourrait supporter que la Grèce soit insolvable. Car en plus de la perte sèche, ces mêmes banques ont émis tout un tas de produits afin de les couvrir contre ce défaut grec justement. Cela leur coûtera très TRES cher en cas de défaut.
Ensuite, les Grecs ne peuvent structurellement PAS rembourser leurs dettes — surtout avec une croissance aussi anémique et des taux d’intérêts aussi élevés. Le mécanisme est simple : tant que les taux d’intérêt continuent à être supérieurs au taux de croissance, vous augmentez votre endettement. Et ce ne sont pas les grèves générales à répétition qui vont améliorer la tendance… ni les plans d’austérité drastique qu’on veut leur imposer de force. Ce cercle infernal devra se régler par un rééchelonnement de la dette.
Il faut leur donner du temps, beaucoup de temps. Au moment où j’écris ces lignes, les contours d’une solution semblent se dessiner impliquant les créanciers privés. Espérons que chacun comprendra que jouer la stratégie du pire ne sera bénéfique pour personne.
▪ Sur les small caps, certaines valorisations sont aberrantes
Mais en ce qui nous concerne plus directement, à savoir nos valeurs moyennes, je dois vous dire que je suis impressionné par leurs performances qui ne se sont pas démenties au premier trimestre. Il y a néanmoins un phénomène qui commence sérieusement à m’inquiéter, c’est la fuite des belles valeurs moyennes. La dernière en date étant Delachaux qui a préféré s’associer avec un fonds de private equity et sortir de la cote pour poursuivre son développement.
A la place, d’autres sociétés sont sous les feux de la rampe. Carmat, par exemple, pourrait un jour être en mesure de mettre sur le marché un coeur artificiel. Mais aujourd’hui, les niveaux de valorisation sont démentiels ! Elle est valorisée de quelque 700 millions d’euros pour un chiffre d’affaires 2010 de cinq millions d’euros et 10 millions de perte opérationnelle.
Certes, les investisseurs parient sur le futur… de notre côté, cette spéculation est bien loin de ma stratégie. Je ne sais pas si Carmat réussira un jour son pari ; mais ce que je suis en mesure de vous dire, c’est que cette société affiche une capitalisation boursière similaire à celle de Mersen et vaut près de trois fois Maison France Confort (MFC). Pour mémoire, je vous rappelle que MFC devrait réaliser cette année un chiffre d’affaires de 560 millions d’euros pour un résultat net de 24,5 millions d’euros et dispose d’une trésorerie nette de 45 millions d’euros.
▪ Une bulle s’est créée sur les medtechs
Une réelle bulle s’est créée sur le segment des medtechs ; certains investisseurs risquent de le payer très cher. Ilest d’ailleurs intéressant de noter que beaucoup d’investisseurs historiques (essentiellement des fonds) profitent de la liquidité et des cours élevés pour sortir. C’est ce qu’il se passe sur la société Stentys, également valorisée son pesant de cacahuètes (plus de 140 millions d’euros).
J’attends donc avec impatience les résultats de la dernière introduction en Bourse, et notamment celle de Mauna Kea Technologies, spécialisée dans les endoscopes microscopiques, prévue début juillet. La valorisation proposée par les banquiers introducteurs est de 140 millions d’euros… de quoi laisser rêveur. Surtout pour une société qui a réalisé un chiffre d’affaires 2010 de quatre millions d’euros et une perte opérationnelle qui s’est étrangement fortement réduite à 0,7 million d’euros contre -9,7 millions en 2009.
Nous vivons vraiment dans un marché bien étrange qui n’arrive pas à valoriser l’existant, le prouvé, le réel et qui préfère rêver le futur…
Le réveil risque d’être brutal.
Première parution dans Small Caps Confidentiel le 07/07/2011.