▪ Les investisseurs ne se sont guère montrés rassurés lundi par la déclaration du ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble. Ce dernier estime que l’Espagne n’a pas besoin d’un plan de sauvetage — et ce le jour même où le MES voyait célébrer sa naissance officielle, couronnée par un triple A des agences de notation.
Le MES est en effet garanti par les contribuables européens, lesquels sont supposés avoir les poches profondes puisque la plupart des Etats créanciers du nord de l’Europe (France comprise) peuvent y puiser sans limite par un simple décret du Parlement.
Les appels de fonds décidés au plus haut niveau européen sont non-négociables, impératifs et proportionnels à la capacité contributrice des Etats tels que définis par le Traité de Lisbonne (et les précédents).
A charge pour les Etats appelés en garantie de dégager les ressources budgétaires (impôts, taxes) nécessaires pour honorer leurs engagements vis-à-vis du MES.
▪ Un voyage pour apaiser les tensions
Pendant ce temps-là, Angela Merkel rendait visite à Athènes afin — officiellement –« d’apaiser les tensions ». Une mission quasi impossible vu le ressentiment populaire à l’encontre de l’Allemagne qui jugeait la gouvernance de la Grèce très appropriée tant que l’industrie de l’armement germanique lui vendait pour des centaines de millions d’euros de matériel militaire — notamment des chars de la dernière génération.
Le problème de l’Allemagne, si elle tient effectivement à redorer son image auprès de la Grèce, va être de trouver le moyen de faire discrètement passer une aide supplémentaire de 30 milliards d’euros auprès de son opinion publique.
De toute façon, ou l’Europe paye (l’Allemagne étant le premier contributeur) pour prolonger la tragi-comédie grecque de quelques mois, ou la faillite sera prononcée d’ici le 31 décembre.
Nous ne tarderons alors pas à voir refleurir les spéculations sur le sort de la Zone euro : la Grèce par le bas… (et peut-être le Portugal et l’Espagne dans son sillage) ou l’Allemagne et la Finlande (qui a déjà menacé de le faire) par le haut.
▪ Coup de blues sur les Bourses
Une vague inquiétude a plombé les places européennes (-1,4% en moyenne et -2% à Milan). Paris a clôturé au plus bas du jour. Le CAC 40 a affiché -1,46% à 3 406 points. L’indice est ressorti par le bas du corridor 3 410/3 420 points (90% des échanges du jour), ce qui constitue une indication plutôt baissière. Cependant, le volume de seulement 1,9 milliard d’euros échangés rend cette hypothèse peu significative.
Ce coup de blues de fin de séance ne s’expliquait guère par l’évolution de Wall Street : pas un souffle d’air sur les indices américains entre 15h45 et 20h15 (à l’image de l’Europe entre 9h30 et 16h30). La nouveauté, c’est l’apparition peu après l’ouverture d’écarts relativement disparates d’un indice à l’autre.
C’est assez rare pour être souligné et le phénomène s’est amplifié au fil des heures. A la mi-séance, le Dow Jones cédait 0,2% tandis que le Nasdaq décrochait de 0,8% dans le sillage du titre Apple (-2%).
Autre singularité : aucun coup de chapeau détectable en Asie ou en Europe à l’annonce par HSBC d’un probable rebond du PMI manufacturier chinois à 54,3 en septembre contre 52 en août.
▪ Le pétrole consolide
Les spécialistes des matières premières ne saluaient pas davantage la nouvelle avec un baril qui rechutait de 0,8%, sous la MM100, vers 89 $ sur le NYMEX. Un plancher a même été inscrit à 88 $ au cours des premiers échanges.
Le pétrole consolide depuis le 14 septembre alors que l’annonce des quantative easings semble entériner l’imminence d’une récession plus forte que prévue cette année en Zone euro, tandis que le rebond s’annonce limité en 2013.
Le FMI estime d’ailleurs « que la crise pourrait encore s’aggraver sans nouvelles mesures immédiates alors que la faiblesse se répand de la périphérie vers l’ensemble de la Zone euro, y compris l’Allemagne ».
Le FMI abaisse également ses prévisions de croissance à l’échelle planétaire : de 3,5% à 3,3% en 2012 et de 3,9% à 3,6% en 2013.
La récession atteindrait -0,4% en Zone euro cette année, contre 0,3% estimé en juillet. Le rebond de la croissance est carrément remis en cause : +0,2% l’an prochain au lieu de +0,7%… Il ne faudra pas attendre très longtemps pour la voir ramenée à zéro.
Enfin, toujours selon le FMI, la croissance chinoise ne devrait être que de 7,7% cette année, contre 9,3% l’an dernier. La plupart des économistes s’accordent à penser que le PIB ne progresse peut-être pas de plus de 3,5% à 4% (d’après la stagnation de la consommation d’électricité et du fret ferroviaire).
Ce ralentissement chinois devrait affecter l’ensemble des pays d’Asie du sud-est et du Pacifique. Mais 90% des gérants continuent d’affirmer qu’il faut privilégier les émergents, comme s’ils pouvaient bénéficier d’un bienfaisant « découplage » par rapport aux économies matures d’Occident, du Japon et dans une moindre mesure de la Corée du Sud.
▪ Wall Street à l’abri d’une correction en attendant les élections
Nous avions démontré avec le Brésil lundi matin que ce n’était pas le cas… mais cela ne préoccupe personne. Le grand sujet du moment qui émeut Wall Street — et qui faisait les gros titres lundi soir aux Etats-Unis — c’est le prix de l’essence à la pompe en Californie.
Voilà un véritable enjeu… planétaire, puisqu’au coeur de la préoccupation des candidats aux élections américaines du mardi 6 novembre, dans quatre semaines jour pour jour.
Nombreux sont les stratèges qui estiment que pour cette raison, Wall Street est à l’abri d’une forte correction jusqu’à cette date. C’est le scénario qui rassemble aujourd’hui le plus large consensus (et explique pourquoi leVIX reste scotché à proximité du plus bas absolu).
Il faut donc s’en méfier alors qu’Alcoa va ouvrir ce soir le bal des trimestriels !