▪ Le marché dupe les petits investisseurs. Mais ce n’est plus qu’une question de temps avant que ces derniers ne finissent par s’en apercevoir.
Nous sommes au beau milieu de l’été, les jours coulent, paresseux, flous… et le marché donne l’impression d’être gagné par cette torpeur.
Peu d’acteurs semblent vouloir jouer.
Ainsi, le responsable américain du service Titres de Goldman Sachs a affirmé qu’il est temps de sortir des actions avant qu’elles ne tombent de la « falaise budgétaire. »
Selon CNBC :
« [David] Kostin défend vigoureusement son objectif d’un S&P 500 à 1 250 pour la fin de l’année, malgré le récent niveau de référence en hausse au-dessus de 1 400. Le stratégiste voit encore une chute de 12% à venir car il pense que le Congrès n’arrivera pas à résoudre la falaise budgétaire avant les élections et peut-être même pas avant la fin de l’année… »
« Le pire scénario cette année est que le Congrès sortant ne fasse absolument rien après les élections — pas même passer la patate chaude à l’administration suivante en votant une prolongation de courte durée des allégements fiscaux et des plans de dépenses. Dans ce scénario, il y aurait une contraction du PIB en 2013, selon les économistes de Goldman Sachs. »
Les grandes banques ne prennent également aucun risque. Elles gardent leur argent dans les bons du Trésor. Selon Bloomberg :
« Aux Etats-Unis, l’écart entre les dépôts bancaires et les prêts se creuse à un rythme soutenu, le plus rapide depuis deux ans. De ce fait, les prêteurs ont plus de fonds pour acheter des obligations et tempèrent la plus grande vente massive de bons du Trésor depuis 2010. »
« Alors que les dépôts ont augmenté de 3,3%, à 8 880 milliards de dollars, lors de la période de deux mois prenant fin au 31 juillet, les prêts aux entreprises ont augmenté de 0,7%, à 7 110 milliards de dollars, selon les données de la Réserve fédérale. L’écart record de 1 770 milliards de dollars a augmenté de 15% depuis mai, la plus grande augmentation sur une période similaire depuis juillet 2010. Cette année, les banques ont déjà acheté pour 136,4 milliards de dollars dans la dette fédérale et du Trésor, plus du double des 62,6 milliards de dollars de toute l’année 2011, poussant leurs avoirs à un plus haut record de 1 840 milliards de dollars. »
« Face à un ralentissement de l’économie américaine, un taux de chômage supérieur à 8% depuis plus de trois ans et des réglementations les obligeant à détenir plus d’actifs de qualité supérieure, les banques prêtent à des niveaux inférieurs à ceux d’avant la récession. Les achats d’obligations permettent d’expliquer pourquoi après avoir augmenté ce mois, les taux du bon du Trésor américain à 10 ans sont près de la moitié de la prévision médiane à 3,5% pour 43 économistes d’une étude Bloomberg menée il y a un an… »
« Alors que l’écart s’est réduit à 1 750 milliards de dollars depuis le 8 août avec des prêts de 7 120 milliards de dollars en retrait par rapport aux 8 870 milliards de dollars en/de dépôts, l’écart représente plus de 17 fois la moyenne de 100 milliards de dollars dans la décennie avant que les marchés de crédit n’augmentent, données de la Fed à l’appui ! »
Que se passe-t-il ?
Est-ce la chaleur ? Trop de soleil ? Les professionnels se détournent des actions. Les particuliers également.
Au cours de ces 15 dernières années, l’investisseur type a perdu beaucoup d’argent dans les actions. D’abord, il a été laminé par la débâcle des sociétés de l’Internet. Certes, ces dernières perdaient de toute évidence de l’argent. Les investisseurs sérieux s’en étaient tenus à l’écart. Mais à la fin des années 1990, le Nasdaq atteignait des sommets et les petits porteurs pensaient pouvoir faire fortune.
Puis vint la bulle financière et immobilière. Les maisons, c’était sans risque. Les entreprises qui les construisaient auraient pu tout aussi bien imprimer des dollars. Les petits boursicoteurs s’y sont rués… pour finir à nouveaux laminés.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. En 2009, Buffett leur dit de revenir sur les actions. Cela s’avéra être un bon conseil. Le marché boursier a repris… même si ce ne fut pas le cas de l’économie. Puis vint Facebook. Ils tenaient là la chance de leur vie, selon eux. Tout le monde était sur Facebook… des milliards de gens. Tout le monde l’utilisait.
Nous n’avons jamais compris cet attrait. Facebook ressemble à une forme électronique de papotage… de bavardage… de commérage. En d’autres termes, une perte de temps. Mais les journaux ne cessaient de reproduire l’interview de personnes qui ne s’étaient jamais intéressées à la Bourse auparavant et qui affirmaient qu’elles voulaient acheter des actions « pour leurs petits-enfants » ou pour « financer leur retraite. » C’était de la pure folie. Facebook n’existera sans doute plus bien avant que leurs petits-enfants ne soient grands ou que l’heure de la retraite ait sonné.
Et voilà le drame… les bouffons arrivent pour jouer les rôles-clés. Les petits investisseurs ont acheté des actions Facebook à 40 dollars et plus. Elles valent aujourd’hui 20 dollars.
Lorsque Facebook a été introduite en Bourse, nous avions pensé que ce pourrait être l’événement qui finalement détournerait le public des actions. Peut-être n’avions nous pas tort. Le volume est en baisse. Les actions — mesurées par le Dow — sont revenues à leur niveau de la fin des années 1990. Mais l’investisseur type a fait bien, bien pire. Il a ouvert et fermé ses positions… accumulant les frais et les commissions… il a fait les mauvais choix et a perdu beaucoup d’argent. Et à présent, l’introduction en Bourse de Facebook — transaction publique et bien documentée — a permis aux petits porteurs de jeter un oeil derrière le rideau et de voir comment fonctionne réellement Wall Street.
Ce qui amène cette question : qu’est-ce qui a bien pu leur faire croire qu’ils pourraient gagner de l’argent avec des actions ?
Ce n’est pas difficile de deviner pourquoi Wall Street veut des petits porteurs. C’est comme ça que la place boursière gagne de l’argent : en faisant payer des frais, des commissions et en tirant profit du grand nombre. Comme un casino, l’industrie financière gagne de l’argent sur les transactions. Plus les transactions sont nombreuses… plus les prix sont élevés… plus il est difficile d’obtenir une réservation dans les restaurants super chics et super chers de New York.
Cela n’est guère surprenant. Mais pourquoi les petits porteurs pensent-ils qu’ils pourraient donner de l’argent aux initiés de Wall Street… et en gagner encore plus ? Wall Street n’essaiera-t-il pas toujours de gagner le plus d’argent possible… comme un casino… en permettant aux petits clients de gagner juste assez pour leur donner envie de revenir — jusqu’à ce que tout leur argent soit évaporé ? Croient-ils que les professionnels de Wall Street sont des saints ? Ou qu’ils sont stupides ?
En théorie, Wall Street prend les économies des investisseurs pour les « allouer » aux industries qui ont besoin de capitaux. Par conséquent, le petit investisseur participe à la croissance de l’entreprise dans laquelle il investit et de l’économie dans laquelle il possède des actions. Wall Street gagne des honoraires raisonnables pour faire le lien entre les entreprises et l’argent dont elles ont besoin.
Admettons par exemple qu’une entreprise a besoin d’un million de dollars. Wall Street pourrait proposer à Monsieur et Madame Tout-le-monde d’entrer au capital de cette entreprise — prenant au passage par exemple 200 000 dollars (tout inclus… y compris le coût de la SEC et tous les coûts imposés à l’entreprise elle-même).
Ou il pourrait financer le million de dollars par ses propres ressources… ou mettre son argent en bons du Trésor, comme c’est le cas actuellement. Comment décide-t-il ce qu’il faut faire ? Simplement, comme tout le monde : il essaie toujours de maximiser ses propres rendements. Ainsi, s’il anticipe un retour sur investissement plus important en achetant l’action elle-même, plutôt que de la vendre aux clients, il le fera.
De même, l’entreprise choisira la meilleure affaire pour elle. Si elle a besoin de lever des fonds, elle donnera d’abord la bonne affaire aux amis, à la famille et aux initiés utiles. Si elle peut emprunter de l’argent à meilleur marché qu’en levant des actions pour les petits investisseurs, elle empruntera.
Donc l’investisseur particulier sera toujours désavantagé. Ils ne seront invités que dans les entreprises que ni les banques ni Wall Street ne veulent financer. Et seulement lorsque le taux de rendement anticipé — pour l’investisseur — sera inférieur à ce que l’entreprise aurait eu à payer pour des fonds empruntés.
Le petit investisseur n’a jamais détenu d’entreprise sur le marché boursier. Il finira peut-être par le comprendre.