La Chronique Agora

La monnaie des banques centrales n’est pas synonyme de richesse

▪ Les banquiers centraux ont échoué. Il n’y a ni croissance véritable, ni inflation, et l’une ou l’autre serait cependant indispensable pour ronger les dettes.

Les maquillages statistiques américains trompent de moins en moins de monde ; en Europe les perspectives restent moroses. Le Fonds monétaire international prévient que la croissance ne reviendra pas car la population vieillit et les investissements productifs diminuent.

La hausse des taux américains sera probablement repoussée au moment où les poules auront des dents en or (pour reprendre l’expression de ma collègue Cécile Chevré). Elle est impossible.

La monnaie ne fait pas la richesse, contrairement à une illusion d’optique toujours trop répandue

L’explication de cet échec des politiques monétaires est très simple : la monnaie ne fait pas la richesse, contrairement à une illusion d’optique toujours trop répandue.

En revanche qui contrôle la monnaie peut capter la richesse à son profit. Aristote, Oresme, Cantillon, Baudin et d’autres l’ont expliqué avec talent. Les banquiers centraux de nos démocraties actuelles arrivent cependant à défendre que cette captation des richesses s’effectue aujourd’hui pour le bien commun. Le génie du keynésianisme consiste à faire croire que les tours de passe-passe monétaire profitent au peuple.

▪ Allons faire quelques courses…
Imaginez un supermarché et des clients. Ce supermarché est un peu spécial : les clients en approvisionnent eux-mêmes les rayons. Ils y apportent les marchandises ou les offres de service qu’ils souhaitent vendre aux autres clients. On y paye la marchandise avec des bons d’achats.

Des chefs de rayon, qui ne fournissent rien eux-mêmes, disposent la marchandise ; ils décident des taxes qu’ils vont prélever pour se payer et financer le supermarché (bâtiment, électricité, nettoyage, sécurité et système de caisse). Ils décident aussi quels produits ou services vont être plus ou moins mis en valeur sur les rayons.

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Malheureusement, ces choix ne sont pas toujours judicieux car ils ne se fondent pas sur le succès rencontré auprès d’une clientèle totalement libre de choisir. Plutôt que de laisser jouer la concurrence et de s’assurer qu’elle soit loyale, les chefs de rayon préfèrent orienter les choix des clients. Petit à petit, les produits correspondent de moins en moins aux goûts véritables des chalands. Un chef de rayon a un cousin boulanger et souhaite promouvoir la viennoiserie au détriment de la charcuterie. Un autre déteste le bricolage et pense que la couture est une activité à promouvoir…

Plus il y a de chefs de rayon, moins il y a de clients approvisionneurs

Chacun continue d’approvisionner le supermarché mais en essayant d’optimiser son apport en fonction des diktats des chefs de rayon plutôt qu’en recherchant à fournir des biens et services qui plaisent aux autres clients. Petit à petit, les gondoles deviennent moins bien garnies. On multiplie les postes de chefs de rayon, les règles de sélection, de contrôle et de mise en valeur, les offres promotionnelles pour enrayer le déclin, mais rien n’y fait. Il est vrai aussi que plus il y a de chefs de rayon, moins il y a de clients approvisionneurs. Mais les chefs de rayon sont si gentils, si empressés, si désireux de bien faire, les clients n’y voient aucun mal…

La situation de notre supermarché empire. Les frais de fonctionnement gonflent et grèvent les prix. Les caissiers ont beau faire crédit de bons d’achat, rien n’y fait. Dans le cadre d’une opération commerciale choc, le directeur du supermarché décide alors d’une distribution de bons d’achats. Cette opération vise à insuffler de l’optimisme aux clients. Avec plus de bons d’achat, les rayons se videront et voyant ceci, les clients s’empresseront de les remplir à nouveau.

▪ Un raisonnement imparable, n’est-ce pas ?
Non, bien entendu. Ce n’est pas parce que les bons d’achat ont été multipliés que les produits en rayon vont eux aussi se multiplier par magie. Les rayons ne se vidaient pas par manque de bons d’achat. Ils ne se rempliront pas parce qu’il y a plus de bons d’achat.

Les opérations des banquiers centraux ont consisté jusqu’à présent à distribuer des bons d’achat, mais pas aux clients-approvisionneurs de notre supermarché. Ces bons ont été donnés aux chefs de rayon (les gouvernements) et aux caissiers (le système bancaire). Ces opérations se soldent par un échec, sauf pour les intéressés évidemment.

Les gouvernements ont ainsi trouvé à financer leurs promesses électorales stupides et à payer encore plus de postes de chefs de rayon. Les investissements ralentissent car on ne peut à la fois financer l’augmentation des frais de fonctionnement du supermarché et le développement de nouveaux produits.

Les banques font croire qu’elles sont assainies. Elles ne le sont évidemment pas puisque nous avons des taux négatifs. Ceci signifie que les gens qui ont de grosses sommes d’argent préfèrent payer pour avoir une créance signée d’un Etat ou d’une multinationale, plutôt que de laisser leur argent dans une banque (car un compte au solde créditeur est en réalité une créance que vous détenez sur votre banque).

L’helicopter money de Ben Bernanke décollera bientôt

Bien sûr, gouvernements et banquiers centraux ne vont pas crier sur les toits qu’ils se sont enrichis sur votre dos avec leurs opérations de création monétaire. Pas vu, pas pris. Ils vont continuer à profiter de l’ignorance. Si nécessaire, ils seront prêts à distribuer des bons d’achat à la foule. L’helicopter money de Ben Bernanke décollera bientôt.

Cela ne marchera pas mieux puisque la création de monnaie n’a rien à voir avec la création de richesse. Mais cela prolongera l’illusion. Les prévaricateurs continueront à s’enrichir car — comme Richard Cantillon l’a démontré il y a trois siècles — ceux qui sont au plus près de la source de création monétaire en profitent toujours. Les malheurs sont pour ceux qui en sont éloignés. Les faux-monnayeurs officiels ont encore de beaux jours devant eux puisque le peuple n’a pas de mémoire. Donnez-lui des bons d’achat et il se croit plus riche. Ca ne coûte rien, c’est l’Etat qui paie, pour paraphraser notre président.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses et explications de Simone Wapler jour après jour — avec en plus, des recommandations concrètes pour vos investissements : il suffit de cliquer ici…]

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