La Chronique Agora

La monnaie, une pure convention

marchés boursiers

Le système financier et monétaire actuel repose sur des croyances qui sont en train de voler en éclats. La spéculation et les actions des banques centrales remettent en question jusqu’aux fondements de la société : on entre dans l’inconnu…

La monnaie moderne est pure convention, pure croyance. On a réussi émettre des tombereaux de quasi-monnaies comme les dettes, les actions, les obligations, les fonds d’Etat en faisant croire qu’elles étaient aussi bonnes que les « vraies » monnaies, qu’elles avaient les mêmes propriétés.

Tout cela repose sur des conventions, sur des croyances… et ce sont ces croyances qui volent en éclats en ce moment.

Retenez bien : ce qui se passe en ce moment montre ce qui ne doit jamais être montré. Cela montre que le roi est nu, il n’y a pas de référent, tout est bidon.

La spéculation détruit la notion de valeur.

Une destruction dangereuse

J’aurais tendance à dire qu’on frôle quelque chose de sacré : la notion de valeur. Cette notion, dans une société humaine, est sacrée ; c’est ce qui la maintient dans un certain ordre, et il est dangereux d’en détruire les fondements.

La notion de valeur dans le système financiarisé, c’est ce qui permet de faire croire que ce qui ne vaut rien, la monnaie et la quasi-monnaie, vaut quelque chose.

La notion de valeur soutient les conventions qui alimentent la demande de monnaie mais aussi sa reconnaissance en tant que monnaie, c’est-à-dire équivalent général de toutes marchandises dans l’espace et dans le temps.

J’ai souvent affirmé et démontré que l’ordre social était un ordre d’équivalences. Les pouvoirs sociaux et les conventions construisent et entretiennent des structures sur lesquelles repose l’ordre.

Ici, on fracasse tout un système d’équivalences ; je n’hésite pas à affirmer que l’on recrée l’équivalent d’une jungle. Ou d’un chaos.

C’est un peu comme en matière d’art contemporain, la fameuse sculpture invisible. Les emballements spéculatifs sur les cotes manipulées détruisent en profondeur toutes les approches critiques, elles montrent que tout cela ne repose sur rien, elles montrent l’escroquerie.

Les autorités ont tenté – en 1971 – de remplacer la notion de valeur fondamentale par la notion de valeur financière, puis elles ont imposé l’idée fausse selon laquelle les taux bas justifiait les évaluations élevées.

Elles ne se sont pas rendu compte que, ce faisant, elles préparaient la chute future : quand les taux vont monter, la justification de valorisations élevées va disparaître.

Un phénomène qui n’est pas anodin

Ce que j’essaie de faire comprendre, c’est que la spéculation n’est pas un phénomène anodin, pas plus que ne l’est le phénomène Bitcoin. Tout cela s’inscrit dans un processus, un processus historique de destruction en profondeur des croyances sur le marché, sur les valeurs et sur les relations entre le marché et les valeurs.

Les responsables de la Fed peuvent continuer à utiliser des millions de chômeurs comme justification et rationalisation de politiques inflationnistes folles, cela ne trompe plus personne.

Tout le monde a compris que les inquiétudes dominantes de la Fed tournent autour des bulles d’actifs et de la probabilité d’un « taper tantrum » déstabilisant lorsqu’elle finira par modérer les mesures de relance.

Tout le monde a compris que la voie était encore libre jusqu’en 2023 !

La Fed va entamer la discussion sur la réduction des achats de titres au cours des prochains mois, mais elle ne commencera réellement à réduire la taille de son bilan qu’au début de l’année prochaine.

Cela repoussera probablement toute tentative d’augmentation initiale des taux, à petits pas, jusqu’en 2023.

[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]

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