La Chronique Agora

Mentir… quoi qu’il en coûte

Saint-Denis, police, Emmanuel Macron, Gérald Darmanin

Si le pouvoir est capable de mentir au monde entier dans le cadre du fiasco de la finale de la ligue des champions, où les témoins se comptent par dizaines de milliers… jusqu’où ce même pouvoir serait-il prêt à mentir pour couvrir ses erreurs stratégiques ?

Nooon… pas lui, il ne va pas lui aussi y aller de son commentaire sur le chaos au Stade de France lors la finale Liverpool/Real Madrid !

C’est bon, on s’en fout du foot et des échauffourées d’avant ou d’après-match : ça fait plus d’une semaine, tout le monde a donné son avis (surtout la presse britannique, et c’est du « saignant »…) ; qu’il nous parle d’économie !

Eviter Paris

Et bien, nous sommes en plein dedans, car à un an et quatre mois de la coupe du monde de rugby « made in France », à laquelle participera l’Angleterre comme plusieurs pays du Royaume-Uni, les touristes anglo-saxons vont se faire plus rares dans la capitale. A commencer par des amies résidant à Londres et qui, en partance pour la Côte d’Azur, vont faire un large crochet (aérien) pour éviter Paris, où nous avions pourtant prévu de nous retrouver pour dîner ensemble.

Ce sera donc l’avion, et non plus le « Shuttle » + TGV jusqu’à Nice (gros succès d’estime au Royaume-Uni pour la grève du RER B le soir de la finale) : nos amies ne veulent plus entendre parler de la SNCF ou de la RATP.

Elles ont par ailleurs gardé un très mauvais souvenir de leur dernier passage l’été dernier par la gare du nord, qu’elles qualifient de véritable « cour des miracles », ainsi que des bouchons surréalistes pour sortir du périmètre de cette même gare et rejoindre leur hôtel dans le 8ème arrondissement. Un trajet qui leur a pris plus d’une heure pour 3,9 km parcourus, elles auraient été plus vite en chaise à porteur !

Elles ont juste eu « un peu peur » de la faune de la gare du nord en arrivant l’été dernier, puis ont perdu beaucoup de temps dans les taxis, mais elles n’ont pas été attaquées et dépouillées de leur portable, passeport et cartes de crédit par des « bandes bien organisées » avant un match ou un concert.

Elles n’ont pas été gazées sans raison par les « forces de l’ordre », n’ont pas été poursuivies en sortant d’un stade par des individus mal intentionnés, etc.

Les témoignages de milliers de supporters ont été recoupés avec les images, et tout concorde : cliquez ici pour lire la suite.

Des milliers de témoins

Mais près de 4 000 supporters et supportrices de Liverpool (en seulement 5 jours) ont déjà confié à la presse britannique des témoignages édifiants sur des violences qu’ils ont subi de la part des « autochtones » de Saint-Denis, ainsi que de notre police, laquelle, un peu fébrile mais disciplinée, a forcément obéi aux ordres venus de leur hiérarchie.

Les témoignages espagnols et britanniques ont été recoupés avec les images, et tout concorde : c’est accablant à tous les niveaux pour toutes les parties françaises, de la RATP au ministère de l’Intérieur (à part les stadiers qui ne relèvent pas de l’autorité de l’Etat) impliquées dans l’organisation de l’événement.

Toutes les conversations dans les pubs du Royaume-Uni, dans les clubs de supporters, dans les familles, tournent autour du chaos de Saint-Denis, dont la dimension sportive est devenue la plus anecdotique : contrairement à nos médias qui ne relaient servilement que le narratif officiel, la vérité des faits et la colère à l’encontre des autorités françaises se répandent comme une trainée de poudre outre-Manche.

Le récit traumatisant « de la chose vécue » est conforté par des centaines d’heures de capture vidéo de la part des victimes… enfin de celles qui ne s’étaient pas fait dépouiller de leur smartphone dans le périmètre du Stade de France.

Quid des prochaines compétitions internationales ?

Et c’est là que nous ne pouvons nous empêcher de nous poser les mêmes questions que la plupart des professionnels qui redoutent de perdre la clientèle anglo-saxonne et plus largement internationale pour les futurs événements majeurs que sont la coupe du monde de rugby de 2023 et les Jeux olympiques de 2024.

Qui aura envie d’organiser un événement international à Saint Denis – même si c’est proche de Roissy –, s’il faut pour cela déconseiller à quiconque de s’éloigner d’un « périmètre sécurisé » avant de regagner son hôtel non pas à pied mais en taxi, même pour faire 500 mètres ?

Mais là où tout part en vrille, c’est que ce qui aurait pu – et dû – rester de l’ordre d’un fiasco organisationnel, se transforme en scandale international avec des accusions calomnieuses d’exactions commises par les seuls supporters britanniques.

Comment expliquer le recours à des mensonges aussi énormes que celui concernant 40 000 faux billets (2 800 seulement ont été effectivement détectés et leurs détenteurs refoulés, sans incident d’ailleurs) et, surtout, celui de l’inconduite des seuls fans de Liverpool, un narratif basé sur le souvenir de la triste époque des hooligans des années 1980 ?

Mais si tel était la perception initiale des organisateurs, de la préfecture, du ministère de l’Intérieur, pourquoi les procédures habituelles d’encadrement des « supporters à risque » en vigueur à travers toute l’Europe n’ont-elles pas été appliquées ?

Et pourquoi tant de violence gratuite de la part des forces de l’ordre contre les supporters pacifiques des fan zones ?

Le but était-il d’engendrer des « situations qui dégénèrent », comme lors de nombreuses manifestations pacifiques anti-gouvernementales depuis 2018 ? Sur ordre de qui ? Et surtout, dans quel but ?

Là encore, la version officielle antibritannique est anéantie par des témoignages dévastateurs qui circulent sur les réseaux sociaux, images à l’appui, et par voie de conséquence dans toute la presse internationale… sauf dans la nôtre.

Au-delà du ternissement de l’image de la France sur un plan convivial (ce n’était déjà pas son point fort) et sécuritaire (un désastre) auprès des touristes, ce qui interpelle, c’est l’énormité du « mensonge d’Etat ».

Si le pouvoir est capable de mentir au monde entier de façon manifeste et assumée dans le cadre d’un fiasco où les témoins se comptent par dizaines de milliers (et désormais des millions par la magie des réseaux sociaux), jusqu’où ce même pouvoir serait-il prêt à mentir pour couvrir son manque d’anticipation, ses erreurs stratégiques, son incompétence dans d’autres domaines où il échappe aux témoins gênants ?

Des domaines tels que la gestion d’une pandémie – couverte pour la première fois de l’histoire de notre pays par le « secret défense » –, ou une crise géopolitique où il déroule son « narratif » et impose potentiellement des décisions préjudiciables aux intérêts supérieurs de la Nation.

Ironie de l’histoire, une semaine avant la finale de la Coupe d’Europe, Indochine avait tenu un concert au Stade de France et sur une structure cylindrique installée au-dessus de la scène, il y avait projeté cette célèbre citation de Soljenitsyne : « Nous savons qu’ils mentent, ils savent qu’ils mentent, ils savent que nous savons qu’ils mentent, nous savons aussi qu’ils savent que nous savons qu’ils mentent, néanmoins ils continuent de mentir. »

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