La Chronique Agora

Même sans vente à découvert, le marché obligataire reste dangereux

▪ Nous pensons que l’Allemagne pourrait être très bientôt victime de la crise de la dette souveraine parce que ses banques et ses institutions financières possèdent beaucoup de dettes espagnoles et portugaises. Les credit default swaps (CDS) explosaient plus vite sur la dette allemande que dans d’autres nations souveraines où les déficits et les dettes étaient plus importants.

Mais en réalité, il s’agit de savoir où réside le risque dans le système du crédit en ce moment. Et le marché pointe du doigt le centre de l’Europe. Si vous étiez un spéculateur, ou vouliez seulement couvrir vos positions dans les actions financières allemandes, vous achèteriez une assurance sur les CDS. Cela semble être une bonne chose à faire, même si, apparemment, vous ne pouvez plus le faire.

Bloomberg rapporte que "l’euro a chuté à son plus bas depuis avril 2006, après que l’Allemagne a interdit la vente à découvert et la spéculation sur les obligations des gouvernements européens avec les CDS et que la Banque d’Italie a autorisé les prêteurs à rejeter les pertes sur la dette gouvernementale". Hmmm. Est-ce que c’est comme ne pas pouvoir contracter une assurance santé si vous avez déjà des problèmes de santé ?

Les investisseurs incapables de couvrir leurs risques pourraient être forcés de vendre. Ou les vendeurs à découvert vont devoir se couvrir, ce qui signifie qu’on pourrait voir un bref rebond dans les actions européennes, l’euro et les obligations en euro. Mais ce n’est pas vraiment le genre de choses qui redonne confiance. Un autre article de Bloomberg déclare : "l’Allemagne va temporairement interdire les ventes à découvert ‘à nu’ des obligations gouvernementales de la Zone euro à minuit, après que les politiciens ont accusé cette pratique d’aggraver la crise de la dette européenne".

Les mots clés dans cette phrase sont "à nu" et "politiciens". La vente à découvert "à nu" consiste à vendre un titre que vous ne possédez pas plutôt que d’emprunter d’abord pour ensuite le vendre. Certains débattent pour savoir si l’on peut ou si l’on devrait être autorisé à vendre quelque chose que l’on ne possède pas, ou qui n’est possédé par personne. La raison pour laquelle les spéculateurs le font est évidente. Quant à savoir s’ils devraient être ou non autorisés à le faire, c’est moins évident.

▪ Mais est-ce que c’est une bonne idée d’investissement… Eh bien, c’est un tout autre problème. Et les politiciens qui accusent les vendeurs à découvert d’être responsables de la faiblesse des obligations sur l’euro cherchent seulement un bouc émissaire. C’est une confusion sur les causes et les effets, c’est comme d’accuser les charognards de la mort d’un cadavre. Mais ça leur fait gagner du temps, dans le jeu de l’accusation.

Interdire la vente à découvert n’améliore pas la qualité de la dette souveraine ou les finances des gouvernements en Europe. D’ailleurs, nous l’avons entendu des abonnés européens, ils se sentent affligés ces derniers temps. Ils disent qu’il y a de plus graves problèmes de dettes au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Et en termes de devises en mauvaise posture, qu’en est-il du dollar et de la livre sterling ?

Vous avez raison, Européens affligés ! Le jour du jugement viendra aussi pour le dollar. En attendant, les obligations US et le dollar profitent de la "fuite vers autre chose". Mais nous n’appellerions pas ça la fuite vers la sécurité.

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