La Chronique Agora

Quatre maximes d’investissement à ne jamais oublier

▪ Après trois décennies dans le secteur et la rédaction de nos Chroniques quotidiennes depuis 15 ans — nous avons distillé nos conseils en quatre maximes, quelques vérités élémentaires pour vous guider dans votre navigation financière.

▪ Maxime n°1 : Les gens n’obtiennent pas ce qu’ils veulent ou ce qu’ils attendent des marchés ; ils obtiennent ce qu’ils méritent.
Bien entendu, les gens voudraient que la crise soit terminée. Nombre d’entre eux y comptent bien. Mais le marché ne s’en soucie pas. Il porte un t-shirt marqué « capitalisme à l’oeuvre » et tient un solide maillet à la main.

Que fait-il ? Il démolit un quart de siècle d’erreurs diverses et variées.

Il y a toujours des erreurs. Des investissements tournent mal. Des entreprises coulent. Des gens font faillite. Lorsque de nombreuses erreurs sont corrigées toutes en même temps, on appelle ça une « récession ». Et lorsque c’est un modèle économique entier qui tourne mal, on appelle ça une « dépression ».

Le modèle économique du dernier quart de siècle a causé plus d’erreurs que de coutume

Le modèle économique du dernier quart de siècle a causé plus d’erreurs que de coutume. Il a encouragé les gens à dépenser, emprunter et spéculer. Et chaque fois que le marché tentait d’apporter des corrections, les autorités arrivaient avec plus d’argent et de crédit facile. Des entreprises qui auraient dû faire faillite il y a des années continuèrent à s’enfoncer. Les propriétaires immobiliers continuèrent à s’endetter. Les spéculateurs prirent des paris de plus en plus conséquents.

Les poissons nagent, les oiseaux volent et les bulles éclatent. La bulle du secteur financier — dont la dette subprime, les prix de l’immobilier, les primes de l’industrie financière et les produits dérivés — éclata en 2007. Et quel massacre ça a été.

C’est normal, non ? Ce qui nous amène à notre deuxième maxime :

Maxime n°2 : La force d’une correction est égale et opposée à la tromperie qui l’a précédée
Les illusions et les absurdités de l’époque de bulle étaient monstrueuses. Naturellement, la correction doit elle aussi être gigantesque. Les marchés mondiaux ont été divisés par près de deux après 2008. Les prix de l’immobilier ont eux aussi pris une belle raclée. La perte totale de richesse nominale atteignait près de 50 000 milliards de dollars, selon certaines estimations.

Ces pertes auraient-elles pu être évitées ?

Cela aurait pu être le cas pour nombre d’entre elles. Si le Congrès US n’avait pas créé Fannie Mae, par exemple, l’agence n’aurait jamais faussé le marché des prêts hypothécaire comme elle l’a fait. Et si les autorités n’avaient pas créé la Fed, cette dernière n’aurait pas fourni autant d’argent facile à tant de spéculateurs et d’emprunteurs.

Et si la Fed, depuis Alan Greenspan, avait fait ce qu’elle est censée faire — c’est-à-dire « retirer le bol à punch » avant que la fête n’échappe à tout contrôle — la bulle aurait probablement été plus modeste.

Bien sûr, les gens ont tiré de mauvaises conclusions de tout ça. Ils ont pensé que « le capitalisme avait échoué ». Ils ont vu la voiture tomber de la falaise… mais n’ont pas remarqué que les autorités avaient faussé les panneaux de signalisation.

Au lieu d’avertir les investisseurs du virage dangereux qui les attendait, les taux bas de la Fed disaient : « appuyez sur le champignon ! »

Au lieu d’avertir les investisseurs du virage dangereux qui les attendait, les taux bas de la Fed disaient : « appuyez sur le champignon ! »

Maxime n°3 : Le capitalisme n’emmène pas toujours une économie là où elle veut aller ; mais il le conduit toujours là où elle doit être
Quel qu’ait été le responsable de ces erreurs, le capitalisme s’est attaché à les corriger avec son élan habituel. Il a infligé aux investisseurs imprudents des milliers de milliards de dollars de pertes. Il a fait tomber les entreprises mal gérées. Il a frappé de plein fouet les propriétaires immobiliers… et a réduit en poussière les produits dérivés liés à l’immobilier.

Le capitalisme opère selon un procédé que le grand économiste Joseph Schumpeter appelait la « destruction créatrice ». Il détruit les erreurs pour faire de la place aux innovations et aux nouvelles entreprises. Malheureusement, ça le met en porte-à-faux avec le gouvernement et ce que veulent la plupart des gens. Lorsque les gens font des erreurs, ils clament leur innocence. « Qui aurait pu voir arriver cette crise ? » demandent-ils. « Et », continuent-ils, « quelqu’un d’autre devrait payer pour les pertes ».

De sorte qu’aujourd’hui, les autorités, qui ont mal géré leurs responsabilités réglementaires durant l’époque de bulle, renflouent des entreprises mal gérées pour protéger des prêteurs qui ont mal géré leur argent. Ils sont déterminés à empêcher le capitalisme de faire des changements majeurs — de la pire manière possible.

Quelle est la pire manière possible ? C’est simple. Laissez les mauvais gestionnaires en place. Maintenez les entreprises mortes-vivantes sous perfusion — de même que les banques zombie. Laissez le gouvernement reprendre des secteurs majeurs de l’économie. Et refilez à une économie imbibée de dette encore plus de dette !

Maxime n°4 : La sévérité d’une dépression est inversement proportionnelle aux efforts du gouvernement pour y mettre fin
Plus les autorités tentent de retarder et entraver le processus de destruction créatrice, plus il faut de temps pour accomplir la tâche. Et plus la facture finale sera élevée.

Ce n’est qu’après la Deuxième guerre mondiale, 15 ans plus tard, une fois le New Deal largement passé aux oubliettes, que les Etats-Unis se sont remis au travail.

Il n’y a que deux exemples relativement clairs dans l’histoire moderne. Après le krach de 1929, les administrations Hoover et Roosevelt ont désespérément tenté d’arrêter la correction. Ils ne pouvaient pas faire disparaître les mauvaises dettes, ni transformer de mauvaises décisions en bonnes décisions. Tout ce qu’ils pouvaient faire, c’était retarder les corrections nécessaires — et causer de nouvelles erreurs ! Ce n’est qu’après la Deuxième guerre mondiale, 15 ans plus tard, une fois le New Deal largement passé aux oubliettes, que les Etats-Unis se sont remis au travail.

De même, quand le Japon a été confronté à une correction majeure en 1990, ses politiciens ont suivi le modèle Hoover/Roosevelt. Au cours des ans, une quantité équivalente à près d’une année entière de production a été appliquée aux efforts de relance. Tout ce qu’ils ont réussi à faire, cependant, était d’empêcher et entraver les changements nécessaires. A présent, 24 ans plus tard, l’économie japonaise est toujours en mode « correction »… et lutte encore contre la déflation.

Est-ce là la fin de l’histoire ? Pas du tout. Les efforts des autorités pour empêcher le progrès du capitalisme auront des conséquences spectaculaires. Les feux d’artifice commenceront lorsque le marché obligataire craquera, faisant grimper les rendements en flèche — parce qu’une nation accro à la dette ne peut pas soutenir une crise du crédit pendant longtemps.

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