La Chronique Agora

Marchés : la certitude, c’est que ça va craquer

marchés boursiers

La prochaine crise viendra d’une chute des valeurs boursières – ce n’est pas une certitude… mais c’est la possibilité la plus probable, précisément parce que personne n’y croit.

Je ne dis pas que la prochaine crise viendra obligatoirement de la chute des valeurs boursières ; simplement, c’est une possibilité et c‘est même la plus probable.

D’autres causes ou facteurs déclenchants sont bien entendu possibles : crise bancaire, crise monétaire, crise politique, crise militaire, crise pétrolière…

Il y a la fragilité fondamentale et ensuite le facteur déclenchant, la cause proche.

Le système est fragile car il y a disproportion structurelle entre la masse des promesses financières émises dans le monde et la capacité à les honorer.

Cette disproportion fait que tout le triangle de la finance repose sur la pointe, c’est-à-dire sur la confiance et l’ignorance – et d’ici quelque temps sur la force, la violence. Mais j’anticipe.

La cause proche de la prochaine crise peut être de toute origine, il suffit qu’elle produise la rupture d’un invariant, d’une certitude et que cela se propage.

L’invariant qui a cassé et provoqué la crise dite des subprime en 2008, c’est la croyance que le prix des maisons ne pouvait que monter.

La rupture viendra de là où on ne l’attend pas

Aujourd’hui, les autorités ont étudié tous les cas de figure, pensent-elles ; elles ont tout envisagé.

Selon leurs travaux multiples et vastes, tout est répertorié – et je les crois. Donc la prochaine rupture ne peut pas se produire là où on le croit, elle ne peut se produire que là où on ne l’attend pas.

Les autorités ont localisé les points faibles où peut se déclarer l’incendie et elles ont mis en place des dispositifs qui sont prêts à déverser des tombereaux de liquidités pour noyer l’incendie immédiatement. La similitude avec les détecteurs d’incendie est parfaite : détecteurs et en cas d’alerte, arrosage automatique. Ensuite on nettoie.

Il faut bien faire la différence entre deux choses : d’abord la fragilité et l’instabilité qui ne font que croître, et ensuite les événements, les catalyseurs. Le catalyseur, c’est ce qui fait que la mayonnaise prend ou ne prend pas.

Il y a certitude radicale que cela craquera mais incertitude sur la façon et le calendrier dont se passera le craquement. Comme le dit le site ZeroHedge, « à long terme nous seront tous morts, c’est une certitude que l’on ne peut pas ‘hedger’ ».

Les autorités que j’appelle les apprentis sorciers sont idiotes car elles ne sont pas soumises à la concurrence, elles ont un monopole. Elle se trompent totalement sur le point essentiel : l’eau.

Pour éteindre l’incendie quand il se produira, il ne suffit pas d’avoir des détecteurs, il faut de l’eau. Or pour les banques centrales, le liquide, c’est la possibilité de créer de la monnaie qui est acceptée… et qui va là où on veut qu’elle aille.

Toutes les formes d’intervention et de sauvetage reposent sur la création de liquidités, de monnaie puis de crédit – lequel est de la monnaie à maturité différée.

Le système ne tourne que parce que les monnaies sont acceptées et demandées par les moutons-citoyens.

Tout repose sur la demande de monnaie, c’est-à-dire sur la confiance que le système ne s’écroulera pas.

Une chaîne bien fragile

C’est grâce à cette croyance que l’on a pu surmonter passagèrement la crise de 2008 : en créant des milliers de milliards de monnaie, plus de 20 000 Mds$ ! Mais cette création n’est possible que parce qu’il y a des imbéciles qui croient que cette monnaie est de la vraie monnaie et qu’elle a des contreparties.

Or elle n’a pas de contrepartie, ses contreparties sont… des dettes ! Des dettes sur des créanciers insolvables.

C’est une chaîne du bonheur – et tant qu’elle tourne, les choses se passent bien. Mais une chaîne n’est solide qu’autant que son maillon le plus faible tient ! La solidité d’une chaîne n’est pas moyenne comme le croient les autorités, elle est locale, au niveau du maillon le plus faible : les émergents, la Turquie, la Grèce, la Chine, l’Italie, la Turquie, les pensions de retraites, les subprime

Pour résumer : vous avez une situation de fragilité croissante, une instabilité, une connexion entre tous les éléments du système et vous continuez à empiler les risques parce que vous croyez que vous êtes tout-puissant. Voilà la situation.

Or tout repose sur la magie de la monnaie de papier ou numérique, c’est-à-dire sur la croyance erronée qu’ont les citoyens qu’elle vaut quelque chose et qu’elle sera honorée.

Tout repose sur le fait que les citoyens sont névrosés, aliénés.

Ceci ne durera que tant qu’ils ne subiront pas le choc de réalité. Les pays en guerre nous donnent le spectacle précurseur de ce qui se passera un jour : dislocation de toutes les certitudes, retour aux valeurs réelles, effondrement de tous les contrats, la force et le besoin reprendront leurs droits…

Je soutiens que la crise de 2008 était une crise de la périphérie du système. A ce titre, elle n’était pas grave car le centre, les pompiers – la machine à produire des dollars –, pouvaient toujours intervenir.

Cependant, je soutiens également que par leurs actions, les banques centrales ont fait en sorte que la crise se déplace et remonte au centre, c’est-à-dire au cœur du couple gouvernements/banques centrales.

Or qui pourrait sauver ce couple, le cœur, s’il est défaillant ou s’il a une attaque ?

Seule une réforme globale et la création d’une banque centrale mondiale et d‘un gouvernement mondial pourraient sauver le système cette fois.

[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]

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