La Chronique Agora

Les marchés actions au plus haut… La Fed et la BCE à la manoeuvre

richesse

▪ S’il n’y avait pas eu le séisme au Népal, les médias économiques américains auraient tourné en boucle tout le week-end dernier sur les nouveaux records absolus de clôture inscrits par le S&P 500 et le Nasdaq Composite.

Et encore : le sinistre décompte des milliers morts ensevelis à Katmandou et dans sa région a été en partie éclipsé par le décès de Dan Fredinburg, un ingénieur américain — montagnard chevronné — responsable de programmes de premier plan chez Google… décédé des suites d’une avalanche au pied de l’Everest.

Le télescopage des Unes du week-end ne s’arrête pas à la mise en équivalence de la mort d’un Occidental (et de quelques autres moins "prestigieux") et de milliers de Népalais anonymes. L’actualité des affaires — qui se confond également avec l’actualité internationale — était largement dominée par le lancement de l’Apple Watch dans une dizaine de grands pays développés.

L’occasion de rappeler que le modèle "boîtier inoxydable" commercialisé en France coûte 649 euros, (environ 700 $)… soit le salaire moyen d’un Népalais en 2015.

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Je ne sais pas s’il existe meilleure illustration de l’échelle des inégalités

Je ne sais pas s’il existe meilleure illustration de l’échelle des inégalités — pas seulement entre l’Occident et l’Asie mais également au sein de l’Asie elle-même, puisque les habitants des grandes métropoles chinoises s’arrachent déjà l’Apple Watch… ou l’une de ses concurrentes moins chères, et parfois plus performantes, produites à Shenzhen.

▪ Vive les riches… et le QE
C’est le creusement des inégalités par le haut de l’échelle sociale qui a inspiré à Thomas Piketty Le capital au XXIème siècle… Un ouvrage controversé mais qui a au moins le mérite d’ouvrir le débat concernant l’enrichissement sans cause des plus riches et des ultra-riches (d’après une enquête du Sunday Times, la fortune des 1 000 étrangers les plus riches installés à Londres a tout simplement doublé depuis 2009 pour atteindre 765 milliards d’euros).

Un creusement abyssal, économiquement absurde et contre-productif, par le biais — et avec la complicité active — des banques centrales et de leur politique monétaire. Laquelle consiste à imprimer de la monnaie-dette sans contrepartie future (rien ne sera remboursé), qui va s’investir dans des actifs n’existant qu’à l’état de traces numériques et qui s’inflatent comme les pseudos-bénéfices d’un gigantesque schéma de Ponzi.

Le troupeau des Bisounours/permabulls bêlants nous assure cependant que les actifs immatériels (actions, obligations, ETF…) vont continuer de grimper inexorablement. En effet, la réunion de la Fed qui débute ce mardi devrait constituer l’occasion de rassurer les marchés sur la question des taux, les derniers chiffres macro-économiques plaidant pour un report de tout projet de hausse à fin 2015… et en cas de poursuite du ralentissement actuel, pourquoi pas un QE4 en 2016 ?

Les Bisounours/permabulls bêlants en profitent pour nous ressortir le mythe de la "Grande rotation" des bons du Trésor en faveur des actions. Les compagnies d’assurance ne trouvant plus de rendement sur l’obligataire en Allemagne ni sur deux tiers des OAT françaises en circulation, elles n’ont plus d’autre choix que d’arbitrer en faveur des actions. Ces dernières offrent encore un rendement mirobolant de 2,5%, selon une méthode de calcul hédoniste des profits anticipés en 2016, basé sur des hypothèses de hausse des profits qui postulent une croissance mondiale rugissante.

▪ Qui va acheter ?
Et tout comme il y a deux ans — peu après le coup d’envoi du QE3 aux Etats-Unis — ils ne répondent pas à une question d’importance : si les grands fonds de retraite vendent leurs portefeuilles obligataires par centaines de milliards chaque année… qui leur rachète ce papier qui n’offre et n’offrira plus jamais aucune rémunération (et au plus haut historique, naturellement) ?

Ils font tous la même erreur en répondant : la Fed (comme il y a deux ans) ou la BCE (depuis mi-janvier).

En effet les achats de T-Bonds ou d’Eurobonds permettent juste d’éviter une faillite des Etats et d’un système bancaire gorgé de bons du Trésor émis par des emprunteurs insolvables.

La "Grande rotation" des obligations vers les actions est tout simplement impossible faute d’acheteur

La "Grande rotation" des obligations vers les actions est tout simplement impossible faute d’acheteur… Ou alors il faut que la BCE porte la taille de son QE à 100 milliards d’euros par mois et que la Bundesbank approuve la création de masses d’argent fictif à seule fin de permettre aux fonds de retraite — et surtout aux hedge funds qui prennent des leviers de folie à la hausse — de spéculer en bourse sur des titres ou des paniers de valeur (ETF) dont la valorisation bat déjà des records historiques.

Les Bisounours/permabulls bêlent si fort qu’ils n’entendent pas Alan Greenspan déclarer qu’"un événement de marché significatif, voir un bouleversement majeur… est sur le point de se produire, et que l’or est maintenant un bon investissement par opposition au dollar".

Janet Yellen lui donne entièrement raison : "l’argent n’est pas un moyen efficace de stockage de la valeur".

▪ La catastrophe menace
Les Bisounours entendent encore moins Christine Lagarde avertir que "le shadow banking représente un risque de catastrophe pouvant influencer l’environnement économique". Quant à Jamie Dimon, de JP Morgan, il redoute désormais une crise plus sévère que 2007/2008, de type "hyper-systémique".

Ils n’accordent aucune attention aux propos de la Banque mondiale qui évoque "l’imminence d’une prochaine crise du fait des risques d’instabilité portés par les marchés". Bill Gross, de PIMCO, évoque le "short du siècle" s’agissant du Bund allemand — pourtant l’actif le plus solide en terme de notation et de solvabilité de l’emprunteur.

Ils ne voient pas de quoi la BRI se mêle en avertissant régulièrement la communauté financière des risques de renversement brutal de la tendance sur les marchés mondiaux (elle est la seule à connaître l’ampleur exacte des encours de dérivés qui tournent au-dessus de nos têtes et qui tendent vers le million de milliards de dollars… ce qui signifie qu’il n’existe aucune contrepartie pour des montants de cet ordre).

Cette notion de contrepartie est fondamental

Cette notion de contrepartie est fondamentale : l’optimisme des Bisounours/permabulls bêlants repose sur la conviction que l’Europe peut s’appuyer sur un gigantesque réservoir d’épargne "qui dort".

Il est temps de la réveiller et de la basculer vers le compartiment actions… mais tout cet argent qui dort est bel et bien investi dans les dettes des Etats : en cas d’arbitrage, quel mécanisme miraculeux empêcher la bulle obligataire d’exploser ?

Mais si bien sûr : la mécanique céleste qui vole déjà à notre secours… vous savez bien, le fameux "alignement des planètes" (yen faible, taux zéro, matières premières importées à prix plancher) qui a si bien réussi à doper la croissance et éradiquer la déflation au Japon depuis 18 mois !

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