Où l’on apprend avec épouvante que la science économique est une science humaine malheureusement encombrée par le charlatanisme et le scientisme mathématique.
Pour certains, le libéralisme réduit la société à une longue litanie de chiffres, agrégats comptables, annoncés d’un ton inquiet ou joyeux par des messieurs sérieux en costume cravate.
Les messieurs sérieux grondent ensuite les vilains Français qui ne font pas assez d’efforts pour augmenter le PIB ou réduire le déficit commercial.
Comme ces messieurs ne sont visiblement pas communistes, le libéralisme hérite de ces porte-parole pas particulièrement libéraux.
En réalité, le libéralisme est une philosophie politique basée sur la liberté individuelle. Les individus n’ont pas à être grondés parce que la somme de leurs actions ne plaît pas en haut-lieu ou n’offre pas une base de taxation suffisamment importante.
Le libéralisme, c’est aussi la liberté de produire et d’échanger. C’est une des facettes du libéralisme au même titre que la liberté d’expression ou la liberté des moeurs. Les penseurs libéraux se sont naturellement pas intéressés à l’art de produire, d’échanger et à ses conséquences.
La bonne science économique permet d’éclairer l’action humaine et se situe à des années lumière de gronderies collectives fondées sur des agrégats comptables.
« La méthode mathématique doit être rejetée, et pas seulement en raison de sa stérilité. C’est une méthode entièrement fautive, partant de postulats faux et conduisant à des déductions fallacieuses. Ses syllogismes ne sont pas seulement stériles ; ils détournent l’esprit de l’étude des problèmes réels et déforment les relations entre les divers phénomènes. »
Ludwig Von Mises
La dérive mathématique
Des méchants sorciers ont transformé la science économique en vilain crapaud pour être sûrs de la garder rien que pour eux.
La première potion maléfique que ces créatures de la nuit ont fait ingurgiter à la pauvre économie, ce sont des équations mathématiques basées sur des agrégats très approximatifs.
La science économique était à l’origine une science humaine littéraire, sa triste dérive mathématique, stérile, voire nocive sur le plan conceptuel, date de la fin du XIXe siècle avec l’école néoclassique.
A l’époque, des économistes complexés par la réputation de la science physique ont voulu imiter ses méthodes et son langage.
Cependant, la science économique n’a pas pour objet des molécules ou des atomes dans un milieu reproductible, mais des êtres conscients et libres immergés dans une société qui n’est jamais deux fois la même.
Ces fondements comme son langage ne peuvent être les mêmes que ceux de la physique.
Les statistiques folles
La deuxième potion est administrée par les médias ou par les politiques sous la forme d’avalanche de chiffres qui permettent soit de se réjouir, soit de s’attrister sans d’ailleurs très bien savoir pourquoi.
L’économie devient alors une litanie de chiffres imprévisibles aussi exaltants que la météo marine et aussi significatifs pour l’avenir que les entrailles de poulet pas frais.
Les statistiques peuvent être utiles mais elles ne sont en aucun cas un élément central de la science économique.
D’abord, elles ne permettent pas d’établir des corrélations fiables. Deux mesures qui augmentent ou diminuent dans le même sens ne prouvent rien sans un lien basé sur la compréhension du comportement humain. Les jambes cassées et les fromages de chèvre augmentent dans les mêmes zones géographiques, mais cela ne sert à rien de casser des jambes pour favoriser la production de fromages de chèvre.
Ensuite les statistiques ont tendance à créer des entités autonomes collectives comme le « PIB », le « commerce extérieur », alors que le fondement de l’économie c’est l’action humaine individuelle. La science économique ne peut partir que des individus et de la réalité qu’ils perçoivent.
La transformation de la jolie économie en vilain crapaud n’est pas forcément volontaire mais elle rend service à beaucoup de monde :
– A certains économistes qui deviennent ainsi des gourous aussi respectés qu’incohérents.
– Aux étatistes bien conscients de la chance d’avoir des électeurs révulsés par le crapaud. Ils jouissent ainsi du bonheur de dire tout et son contraire avec un air de matamore imbécile, pardon, un air volontaire.
La dictature de l’Homme moyen fictif
La démocratie s’appuie fréquemment sur des sentiments considérés comme des vices chez les individus.
L’envie d’abord. Votre voisin gagne plus que vous ? Jamais vous ne pourrez lui dire en face l’aigreur qui vous ronge, heureusement grâce à la démocratie, l’envie est transformée en acte citoyen soucieux d’égalité.
La haine. Votre voisin est trop bronzé ou pas assez, trop bourgeois, trop bohème ou trop prolo ? Jamais vous ne pourrez lui dire en face le mépris qu’il vous inspire, heureusement grâce à la démocratie, votre haine est transformée en acte de citoyenneté soucieux d’un bien commun. Et si le voisin couine, c’est bon signe.
La désinvolture. Prendre des décisions pour votre vie est trop compliqué ? Trop risqué ? Trop fatigant ? Heureusement, grâce à la démocratie, même incapable de gérer votre propre vie, vous allez pouvoir gérer celle de tout le monde sans complication, risque ou fatigue.
L’uniformité. La règle de la majorité n’est jamais utilisée en art, en science ou en sagesse. Au contraire : les individus, seuls ou s’associant, développent des idées contre la majorité en place. La démocratie, en s’étendant bien au-delà des choix strictement collectifs impose à la société la marque de la majorité. L’homme médian fictif et médiocre supplante les individus en chair et en os.
La démocratie lave plus blanc : elle transforme des vices en vertus, mais le prix à payer est lourd : toujours plus de pouvoir à la classe politique et à la bureaucratie.
[NDLR : Pour en savoir plus sur le libéralisme, cette philosophie qui conduit à une éthique de vie, commandez le livre de Daniel Tourre, Pulp Libéralisme, ici. 232 pages de textes limpides, d’idées lumineuses qui éclaireront utilement votre façon de voir l’actualité.
N’hésitez pas à offrir ce livre accessible à tout public. Ce n’est pas de la philosophie absconse et éthérée.]