La Chronique Agora

Les trouble-fêtes de la croissance (1)

Par Jean-Claude Périvier (*)

En tant qu’êtres humains, nous produisons, nous consommons… et nous rejetons. Pour des tas de raisons : parce que c’est usé, parce que c’est obsolète, parce qu’un nouveau produit sort sur le marché, parce que tout n’est pas absorbable, parce qu’il y a des effets de bord dans la consommation qui génèrent des sous-produits non-consommables, etc.

Partout dans le monde, nous jetons ; et c’est bien là le problème. Le monde des déchets est immense dans sa diversité comme dans sa quantité. La tendance est forte et durable, et les entreprises amenées à se développer seront nombreuses. Montez dans le train tant qu’il est temps !

Qu’est-ce qu’un déchet ? "Est un déchet tout résidu d’un processus de production, de transformation ou d’utilisation, toute substance, matériau, produit ou plus généralement tout bien meuble abandonné ou que son détenteur destine à l’abandon", selon l’article L 541-1 du Code de l’environnement. Voilà pour la définition administrative — en France du moins.

La France : juste quelques millions de tonnes de déchets
La production française de déchets est de l’ordre de 600 millions de tonnes (déblais – remblais non compris). La plus grande partie est constituée de déchets agricoles et de déchets de chantiers (travaux publics et démolition). La fraction des déchets de chantiers qui ne peut pas être valorisée représente 110 millions de tonnes de déchets inertes acheminés en décharges. Les déchets radioactifs, eux, ne se mesurent pas en poids, mais en volume et en activité.

On retrouve partout dans le monde cette diversité de déchets — d’origines industrielle, artisanale, domestique… En France, le poids des déchets des ménages augmente de façon inquiétante, passant de 217 kg/habitant/an en 1975 à 373 kg/hbt/an en 2000, et environ 450 kg/hbt/ an aujourd’hui ! Vous rejetez en moyenne chaque année six fois votre poids !

Toutes nos activités se transforment en déchets. Créer un service ou un produit génère des déchets ; consommer génère des déchets ; gérer ces déchets crée aussi des déchets. Toutes les activités humaines produisent des déchets, même celles liées à l’environnement.

Rendu nécessaire pour notre vie quotidienne — et obligatoire, peu à peu, par les Directives et les Lois, notamment la Convention de Bâle de 1986 –, le traitement des déchets s’apparente à la fois à la gestion de l’environnement et aux problématiques de développement durable. Car le volume des déchets est directement lié la croissance mondiale. Mais bien avant la mondialisation, c’est le rythme de la croissance de la population mondiale qui fait du traitement des déchets une urgence planétaire. L’effort pour maîtriser ce problème est titanesque.

C’est à l’heure actuelle un défi sans précédent dans l’histoire de l’humanité et son évolution. Un défi mondial tel que nous les aimons car il sera pour nous source de profits.

Le monde des déchets : des milliards de tonnes
L’origine des déchets est multiple et nous manquons de données. Tout bilan mondial sur la production de déchets est difficilement réalisable, même par les spécialistes.

Il est plus facile de se baser sur la collecte — les chiffres sont un peu mieux connus — pour se faire une idée des quantités de déchets produits. Une étude CyclOpe/Veolia évalue le gisement mondial de déchets collectés à 2,5 milliards de tonnes par an. Autrement dit, la société actuelle produit à peu près autant de déchets chaque année que de céréales ! Sur ces 2,5 milliards de tonnes, la moitié sont des déchets municipaux. Et vous l’aurez deviné, la collecte de ces déchets est très logiquement liée à la richesse et à l’urbanisation de chaque pays considéré.

Ainsi, un Américain produit en moyenne 700 kg de déchets par an contre 150 kg pour un Indien. Entre les deux, les situations varient en termes de collecte comme de nature des déchets : plus les peuples sont riches, et plus leurs déchets se chargent d’emballages plastiques, de papier, de verre, de métaux. Il en résultera évidemment des modes de traitement différents.

Mais gardez bien en tête que le phénomène est lié à la croissance de la population mondiale ainsi qu’à l’évolution du mode de consommation. D’où ma référence aux Chinois, mais aussi aux autres pays émergents qui rejoignent les pays grands consommateurs.

Chance pour nous : l’utilisation durable des ressources est devenue un enjeu et un facteur de compétitivité. Et la valorisation des déchets s’inscrit maintenant dans la mondialisation.

Vous êtes peut-être chauffé aux déchets
La valorisation énergétique a évidemment pris toute son importance dans le contexte actuel : renchérissement du coût de l’énergie, sécurité et indépendance énergétique, conformité au protocole de Kyoto.

Dans 35 pays, on compte plus de 600 unités d’incinération avec récupération d’énergie. Environ 50% de ces volumes sont incinérés en Europe et au Japon. La quantité d’énergie issue de cette valorisation énergétique équivaudrait à 600 000 barils de pétrole par jour ! Cette contribution n’est pas négligeable. En Europe, les 400 unités d’incinération approvisionnent 27 millions d’habitants en électricité — ou 13 millions d’habitants en chaleur.

Ce mode de valorisation devrait se développer dans le monde entier, en particulier dans les pays émergents, très en retard dans ce domaine même si de nombreuses polémiques et questions restent en suspens au sujet des incinérateurs.

Nous verrons la suite dès demain…

Jean-Claude Périvier
Pour la Chronique Agora

(*) Parallèlement à sa carrière dans le conseil aux entreprises et l’intelligence économique, Jean-Claude Périvier s’intéresse à la Bourse et à l’investissement depuis 1986. Analyste de talent, il excelle à détecter et anticiper les tendances futures… pour en déduire les meilleures opportunités de gain. Sa toute nouvelle lettre d’information, Défis & Profits, sera lancée très prochainement : restez à l’écoute !

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