La Chronique Agora

Les escroqueries ? J'en fais une affaire personnelle

Par Marc Mayor (*)

Selon un ami proche, psychologue de grand renom, tout ce qui commence dans le narcissisme se termine dans la douleur.

Par conséquent, je vais tenter de cacher ma fierté aujourd’hui. D’abord, il faut vous expliquer pourquoi, dans les rares cas où un escroc est finalement condamné à de la prison et à de lourdes amendes, cela me fait tant chaud au coeur.

Droiture et honnêteté
De son vivant, mon père aurait pu donner des leçons de droiture à un fil à plomb. D’une honnêteté exemplaire, il partait du principe que tout le monde était aussi intègre que lui. Un jour, il s’associa avec un drôle d’homme, patron de fiduciaire et colonel à l’armée suisse. Ce dernier avait déjà été condamné pour escroquerie, mais mon paternel, humaniste impénitent, ne jugea pas bon d’exiger un extrait de casier judiciaire avant de se mettre en affaires avec le diable.

Dans un premier temps, cette erreur lui coûta l’intégralité de ses biens matériel, voire même un peu plus, puisqu’il laissa même des dettes ; il avait en effet emprunté pour tenter de racheter les fautes de l’autre.

Dans un deuxième temps, cette affaire le mina suffisamment pour qu’il y laisse la vie, alors que l’heure de son 54ème anniversaire n’avait pas encore sonné.

Ceux qui ont vécu ce type de drames, en direct ou par procuration, vous le diront : quelle que soit l’injustice, il est nécessaire de tirer un trait et d’aller de l’avant.

Depuis, je traque et dénonce les cas de fraude boursière
Toutefois, spécialiste de la haute finance, depuis cette histoire j’ai toujours été attiré par les cas de fraude boursière ; depuis 10 ans, mon rôle consiste, entre autres, à les dénoncer.

C’est ainsi que, dans la matinée du 18 juillet dernier, je proposais dans un rapport spécial à l’intention de mes lecteurs de vendre à découvert l’action GTX Corporation, qui valait plus de deux dollars au moment de la rédaction.

Ceux qui ont agi promptement ont obtenu un prix de vente de 1,95 $ à l’ouverture du 18 juillet 2009.  Je flairai là l’escroquerie…

+94% en 10 mois
Bien leur en a pris, puisque le titre cote 0,11 $ à la rédaction de ces lignes, pour un profit de 94% en 10 mois, soit +122% annualisé. Comme le disait Jeff Sharpe, l’attitude "assez ridicule" de GTX et de ses promoteurs a fini par se faire remarquer.

Les escrocs se suivent et se ressemblent : comment profiter tout en les faisant condamner
Si j’ai ressorti cette histoire, c’est que cette semaine, le fondateur et ex-président du conseil d’administration de GTX a finalement été condamné. Pour escroquerie.

Conspiration visant à commettre une fraude aux papiers-valeurs, conspiration visant à commettre une fraude électronique et conspiration visant à commettre un blanchiment d’argent : voici le triptyque fédérateur des chefs d’accusation dont ce cher David Hagen vient d’être reconnu coupable.

Lourdement condamné
Tandis que l’homme qui avait dépouillé mon père n’avait jamais connu la prison — ayant obtenu le sursis, pour sa première condamnation –, les juges américains risquent d’avoir la main plus lourde avec le sieur Hagen. En effet, David avait déjà été condamné pour ses agissements à la fin des années 80, dans une affaire de fraude postale.

Le jury a ordonné à notre homme de rembourser 28 millions de dollars gagnés illégalement, et l’impénitent pourrait être condamné à 45 ans de prison.

La petite goutte qui fait déborder le vase…
Bien que n’y étant pour rien dans cette affaire, j’ose imaginer parfois que, tout comme un flocon de neige en trop peut faire rompre la branche d’un arbre centenaire, ma recommandation d’alors a peut-être contribué à affaiblir ce malhonnête personnage et ses associés. Mes clients n’ont pas seulement gagné beaucoup d’argent : ils ont surtout renvoyé à l’ombre une vermine qui n’aurait jamais dû sortir de prison.

Récemment, un observateur s’étonnait de m’entendre prôner une attitude égalitaire, voire altruiste ; c’est vrai que cette approche n’est pas habituelle dans le monde de la Bourse.

Je lui répondrai que gagner un peu plus d’argent est agréable, sans plus ; c’est un peu comme marquer un septième but quand vous menez déjà six à zéro. Mais avoir l’impression qu’un père et ami vous sourit de là-haut, c’est quand même autre chose…

Meilleures salutations,

Marc Mayor
Pour la Chronique Agora

(*) De nationalité suisse, Marc Mayor est le fondateur d’Inside ALPHA, service d’information et de conseils financiers. Actif en Bourse depuis 1987, Marc Mayor a affiné au fil des ans une approche solide et disciplinée de l’investissement, basée sur le money management, une gestion rigoureuse du risque et des stratégies neutres au marché. Marc intervient régulièrement au sein de L’AGEFI Suisse, et participe à de nombreuses conférences pour investisseurs individuels. Vous pouvez le retrouver sur le site Le Coin des Insiders.

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