La Chronique Agora

Le début de la vraie inflation ?

▪ La grande nouvelle de ces derniers jours est passée quasiment inaperçue. L’inflation — qui baissait depuis 30 ans — a peut-être entamé sa remontée.

Il est trop tôt pour en être certain. Mais le mois de janvier montrait une inflexion à la hausse. Les prix ont grimpé de 0,4% pendant le mois, selon les ronds-de-cuir du Bureau américain des statistiques de l’emploi.

L’année dernière, le taux central d’inflation des prix à la consommation aux Etats-Unis n’était que de 0,7%. Rien, en d’autres termes. Les autorités gonflaient désespérément la masse monétaire de base. Mais les banques ne prêtaient pas. Et les gens ne trouvaient pas d’emplois. L’argent n’est donc jamais arrivé dans l’économie de consommation. On était, après tout, dans une Grande correction.

Au lieu de ça, l’argent brûlant est allé à l’étranger, où il est allé spéculer sur des actions étrangères et des produits mondiaux — comme l’alimentation et l’énergie. Les matières premières ont grimpé en flèche. Des émeutes de la faim ont eu lieu. Le coton vient d’atteindre un nouveau sommet record. Le pétrole s’échange à plus de 100 $ le baril, dans le cas du brent.

Que s’est-il passé ensuite ?

La roue tourne. L’inflation a commencé à revenir s’infiltrer aux Etats-Unis.

L’inflation est sortie des Etats-Unis — grâce aux autorités américaines. Les banques centrales du reste du monde avaient du mal à tenir le rythme. Elles devaient augmenter leur propre masse monétaire pour absorber les liquidités en dollars US. Rapidement, le monde entier a semblé être entré en ébullition.

Mais à présent, les étrangers réexportent l’inflation vers les Etats-Unis. Que pensez-vous de ça ? Il doit bien y avoir un comité prêt à mener l’enquête. Un membre du Congrès prêt à se rendre ridicule en demandant à ce qu’on l’interdise.

En attendant, si les Américains veulent acheter des aliments importés de l’étranger, ils doivent payer 30% de plus qu’il y a un an. Ou si vous voulez acheter un baril de pétrole, il vous en coûtera 60% supplémentaires.

Et voilà que cette inflation importée fait grimper les prix à la consommation dans tous les Etats-Unis. Quasiment toutes les entreprises américaines utilisent de l’énergie importée. Tous les Américains mangent. Pour autant que nous en sachions, on ne peut pas acheter du café ou des ananas dans les 48 états. Et donc… imaginez un peu ça… les prix grimpent.

En janvier, les prix à la consommation centraux — qui ne comprennent pas directement l’alimentation et l’énergie — ont grimpé de 0,4% aux Etats-Unis.

Attendez une seconde. Si ça se produisait tous les mois, ça mettrait l’IPC à 4,8% pour l’année. Ce serait bien plus élevé que les 2% d’IPC maximum permis par Bernanke. Si le taux grimpe encore — Bernanke l’a promis à la télévision — il lui mettra un sac en plastique sur la tête… comme il le ferait pour un parent âgé.

▪ Evidemment, nous ne savons pas si la désinflation a vraiment atteint un plancher ou pas. Et nous nous rappelons le début des années 80, lorsque l’inflation a atteint un sommet. Personne ne savait vraiment si Paul Volcker avait le contrôle de la situation. Il s’est passé des années avant que cette nouvelle tendance s’éclaircisse.

Il est très probable que nous voyons le même phénomène une nouvelle fois… mais faussé, comme s’il se reflétait, grotesque et absurde, dans un miroir déformé.

Cette fois-ci, nous découvrirons que Ben Bernanke a complètement perdu le contrôle. Il voudra peut-être augmenter les taux. Mais avec 30 millions de personnes au chômage… y parviendra-t-il ?

Et imaginons que cette inflation mette les profits des entreprises sous pression — c’est déjà le cas, d’ailleurs. Combien de temps avant que les investisseurs ne commencent à se débarrasser des actions ? Au début des années 80, ils ont commencé, lentement, précautionneusement, à acheter des actions. Cette fois-ci, ils les vendront.

Ainsi, Ben Bernanke — gardien de la devise américaine, garant du plein emploi, gage d’un marché haussier à Wall Street — se retrouvera dans une position très inconfortable. Il aura le sac en plastique entre les mains. Il voudra étouffer l’inflation. Ses mains trembleront. Sa voix aussi.

Et il ne pourra pas le faire…

Mais bon ! Tout ça est encore à venir… peut-être dans longtemps. Si la désinflation a effectivement pris fin, il pourrait se passer des années avant que nous en soyons certains… et des mois ou des années avant que le coup de bluff de Bernanke ne soit démasqué.

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile